Benchicou en a publié, sur son site Lematin.net quelques allocutions, dont la sienne, où il porte un regard, bien sûr, singulier sur la lutte contre l'impunité. Le milieu de la presse algérienne ne m'étant pas inconnu, j'ai inséré le commentaire ci-après qu'il a aussitôt publié. Je le présente, néanmoins, sous sa forme initiale, les sites de la presse algérienne se faisant fort de présenter maladroitement tous les commentaires qu'ils reçoivent en forme de pavés aussi rebutants qu'illisibles parfois.
« C'est vraiment dommage que ce "discours" ait été rédigé à la diable ! Il saute du coq à l'âne et se veut superficiel, le fond du problème étant ailleurs.
Le monde du journalisme algérien se divise, en vérité, en deux catégories : il y a, d'abord, les patrons eux-mêmes et, ensuite, les rédacteurs. Ces derniers sont certes beaucoup plus nombreux, mais ils restent peu motivés par le devoir de respect à la déontologie.
Côté patrons, s'il est vrai qu'ils doivent agir comme gestionnaires essentiellement préoccupés par le besoin de faire des bénéfices, et parfois d'énormes bénéfices à se distribuer, ils restent extrêmement rares à se préoccuper de politique au sens noble du terme ou à joindre leurs efforts aux actes militants pour la bonne cause ressortissant de la fonction même des éditeurs de presse. L'argent seul les intéresse et ils savent le trouver en multipliant à l'infini les tarifs de la publicité. Le reste, nous le savons, ils n'éprouvent pas même le devoir de respecter la législation du travail puisqu'ils continuent, nombreux, à faire travailler des gens au noir. Ils utilisent gracieusement, ce faisant, les locaux du contribuable, éludent leurs engagements fiscaux et ne s'embarrassent nullement de la morale pour quémander la publicité à l'ANEP. Ils se comportent, enfin, comme de véritables requins à l'endroit de leurs propres confrères, quand ils sont sollicités dans le cadre de prestations de services, tout particulièrement. Ainsi, ceux d'entre eux qui disposent d'une imprimerie de presse font baver leurs confrères clients, en leur imposant des règlements d'avance, des chèques certifiés, etc. Pour tout dire, la lutte contre l'impunité, sujet du débat, reste donc très loin de leurs véritables préoccupations immédiates.
Côté rédacteurs, l'absence d'une rémunération, sinon à la hauteur des grasses marges offertes par une publicité débridée, tant en surface qu'en valeur, du moins à la mesure des exigences secrétées par une inflation galopante, explique la vacuité des rares pages de grands journaux consacrées à l'information proprement dite. On a souvent peine à croire que les auteurs et les correcteurs de nombreux articles des canards les plus en vue aient relu leur prose avant publication définitive. Par un phénomène paradoxal, les journaux de l'Etat, qui ne sont pourtant pas aussi bien vendus que ceux du privé, présentent nettement moins d'incorrections grammaticales et orthographiques et sont surtout bien mieux rédigés.
Enfin, autre preuve de la déroute qui marque l'itinéraire de la presse privée, particulièrement francophone, rien n'est fait jusqu'ici pour assurer sa pérennité au plan de la formation de la relève. Apparemment, seul l'objectif de l'argent facile, qu'offre la publicité de façon incontrôlée, motive l'existence des journaux dits faussement indépendants.
Il n'est pas vain, enfin, de faire observer que les lecteurs algériens montrent, par leur désaffection incontestable pour ces journaux publics ou privés, le rejet de toute espèce de tutelle que ces derniers tentent de leur imposer. Ils s'estiment assez intelligents, par eux-mêmes, de faire, au besoin, librement le choix de leurs dirigeants. Le mauvais choix vers lesquels la presse, privée en particulier, les a dirigés jusqu'ici (rappelons-nous le "choix du consensus", ou du "messie") les rend désormais soupçonneux de toute espèce de cogitation venant d'elle sur le sujet. Et là, c'est encore un autre sujet.»