Un sens bien drôle de la démocratie chez Bush

Sous un titre très évocateur de "Washington aime les bons dictateurs", le quotidien indien The Asian Age évoque la condamnation du bout des lèvres, par la Maison Blanche, de l'agitation de style dictatorial de Pervez Musharraf. Il estime qu'elle en dit suffisamment long sur l'ambivalence de Bush quand à son appréhension du problème de la démocratie.

Tandis que de par le monde s'attendait-on à juste raison, de la part de Washington, à une réaction vigoureuse condamnant les dernières mesures prises par le général-président pakistanais à contre-courant de l'esprit démocratique, Bush s'est juste contenté d'inviter son cher allié à se départir de sa casquette de général et d'organiser au plus tôt des élections législatives. Or, l'on sait aujourd'hui toutes les laborieuses tractations opérées en sous-main depuis des mois pour convaincre le dictateur d'Islamabad de rouvrir le volet démocratique au Pakistan, et d'y accueillir, dans un premier geste d'apaisement, l'égérie de l'opposition, Mme Benazzir Buttho, qu'il avait lui-même évincée du pays sous un fallacieux prétexte de corruption. Tournant en dérision le champion autoproclamé de la démocratie dans le monde, le journal ajoute que c'est pourtant bien Bush qui s'était engagé, au lendemain du 11 septembre, de répandre la démocratie dans tous les pays musulmans, Pakistan et Afghanistan compris.

Au plan irakien, poursuit The Asian Age, Bush et ses collaborateurs avaient cru découvrir que les fléaux d'Asie du sud tenaient leur origine de l'absence de démocratie. Mais il est clair aujourd'hui, que " l'engagement du président Bush envers la démocratie est sélectif, pour ne pas dire factice ".

Ainsi, relève le quotidien indien, après avoir proclamé, en janvier 2006, que la démocratie était " la seule voie vers l'indépendance, la dignité et le progrès ", a-t-il rejeté la victoire du Hamas ou encore celle du Hezbollah au Liban, en 2005. Par contre, déplore le journal, l'histoire apporte la preuve chaque jour que Bush préfère " traiter avec des dirigeants autoritaires ".

Pour appuyer sa démonstration, The Asian Age observe que le président américain, tout comme ses prédécesseurs " chouchoutent le président Hosni Moubarek ", tout en sachant pertinemment que ce dernier règne en dictateur sur l'Egypte.

Il ne s'étonne finalement pas que Bush et son équipe éprouvent quelque peine à rappeler à l'ordre leur ami Musharraf, un allié sûr sur lequel ils continuent tant d'investir dans leur guerre contre le terrorisme.