La sortie impromptue de Sarkozy, s'interdisant de parapher au nom de la France l'hypothétique accord qui se prépare à l'OMC en déclenchant du coup la mise au point du négociateur européen Mandelson, donne aux médias l'occasion de s'appesantir sur l'objet des blocages qui marquent le difficile débat entre le nord et le sud sur les questions agricoles.
Le nord, que la crise alimentaire mondiale vient de rappeler à l'ordre au G8 de Tokyo à cause des subventions extravagantes qu'il distribue à ses paysans, entend récupérer d'une main ce qu'il accepte malaisément de concéder de l'autre. Ainsi, exige-t-il des pays émergents qu'ils baissent notablement les droits de douane frappant les produits industriels importés, en contrepartie d'une réduction d'un peu plus de moitié desdites subventions.
Autrement dit, le sud, qui a abandonné quasiment les cultures agricoles sous l'effet de la concurrence profitant aux seuls paysans du nord, est invité à reprendre partiellement ses cultures sous réserve d'ouvrir plus largement ses frontières à l'industrie des pays riches. Le principe des vases communiquants est, comme on le voit, toujours de rigueur, l'essentiel étant que les pays riches continuent de produire pour accroître leur richesse au détriment des pays pauvres que l'on accule toujours à la misère.
Parce que certains pays émergents, comme le Brésil, la Chine et l'Inde sont conscients des dangers qu'impliquent sur leur économie les nouvelles exigences du monde riche, les négociations piétinent. Et Sarkozy se dit justement peu disposé à faire des concessions en l'absence de cette contrepartie attendue des pays notamment émergents. Mandelson, le commissaire européen chargé de discuter avec les pays du sud, se dit suffisamment conscient de l'importance des enjeux pour ne pas accepter qu'une prise de position aussi maladroite qu'incongrue de Sarkozy vienne lui mettre les batons dans les roues.