Les négociations entre le gouvernement de Karzaï et les Talibans ont commencé

Se référant à des sources afghanes et arabes non précisées, le Washington Post rapporte, dans son édition de ce matin, que les pourparlers ont été engagés entre les hauts responsables des Talibans et les représentants du gouvernement afghan.

Selon l'une des sources du quotidien : "Ils [les talibans] sont très très sérieux pour trouver une issue".

Apparemment, les responsables des Talibans venus à ces rencontres, s'y seraient décidés par crainte d'être devancés par les "jeunes loups" qui prennent une place de plus en plus importante dans la hiérarchie du mouvement des insurgés.

Il faut rappeler, en effet, que le mollah Omar et ses amis s'étaient toujours déclarés opposés à des négociations de paix tant que le pays se trouverait toujours occupé par des forces étrangères.

Un tel changement de cap signifierait donc que de nouvelles têtes auraient émergé qui remettent en cause la stratégie adoptée jusqu'ici par le mollah Omar et ses amis, la considérant comme désuète et dépassée.

Le président Karzaï a confirmé à la chaîne américaine CNN, hier, l'engagement de pourparlers de paix avec les Talibans pour mettre fin à la guerre qui s'éternise dans son pays : "Nous avons parlé avec les talibans de compatriote à compatriote, a dit Hamid Karzai à Larry King sur CNN. Il ne s'agit pas d'un contact officiel régulier avec les talibans, avec une adresse fixe, mais plutôt de contacts personnels non officiels, qui ont lieu depuis un bon moment."

"Maintenant que le Conseil pour la paix existe, ces pourparlers vont continuer de façon officielle et plus rigoureuse, je l'espère", a encore précisé le président Karzaï.

Le Haut Conseil pour la paix a été constitué lors d'une conférence nationale tenue en juin dernier. Il compte 68 membres, à la tête desquels l'ancien chef d'État afghan, Burhanuddin Rabbani, a été élu.

Karzaï a, néanmoins, tenu à souligner à CNN qu "il n'y avait pas de contact officiel avec une entité reconnue qui se rapporterait à un organe des talibans et ferait le va-et-vient régulièrement avec nous". "Cela ne s'est pas encore produit et nous espérons que nous allons pouvoir démarrer cela le plus tôt possible, a-t-il ajouté. Mais des contacts ont eu lieu bien sûr avec plusieurs éléments du gouvernement afghan, au niveau de la communauté et aussi au niveau politique."

D'après le Washington Post, repris par le journal Le Monde, parmi les sujets évoqués dans ces rencontres figurent le retrait des forces coalisées étrangères du pays et les attributions de postes gouvernementaux aux Talibans.

Dans un communiqué publié aujourd'hui, les Talibans démentent les affirmations de Hamid Karzaï à propos des négociations engagées avec leurs représentants.

Ils estiment qu'elles relèvent "d'une propagande sans fondement" et de "la guerre psychologique régulière".

Le président afghan n'a pas encore réagi face à ces dénégations.

"Il y a eu des contacts à Kaboul. Il serait extrêmement difficile pour un dirigeant taliban de se rendre à Kaboul sans être capturé ou tué... On en est à un stade très préliminaire des discussions. Aussi ne peut-on appeler ça vraiment des négociations, mais bien des discussions préliminaires", a indiqué un responsable de l'ISAF à l'AFP.

Cette déclaration sonne donc comme un contredit du démenti publié par les Talibans à propos des pourparlers entrepris entre leurs hauts responsables et les représentants du gouvernement de Kaboul.

Les USA et leurs alliés soutiennent, on le sait, ce rapprochement que l'on espère voir déboucher sur la cessation des hostilités et en même temps sur le retrait des troupes d'occupation étrangères qui guerroient là depuis maintenant bientôt une décennie sans parvenir à exterminer les Talibans ni à se faire accepter des autochtones.

D'après une mise en garde signée du mollah Omar et distribuée par les Talibans dans les mosquées du pays pachtoune au Pakistan, tout rapprochement avec les autorités de Kaboul en vue de négocier la fin des combats est passible de mort.

En d'autres termes, l'effervescence créée par l'entourage de Karzaï qui s'appuie sur un Haut conseil de la paix de 70 membres constitué à dessein pour engager les pourparlers avec les Talibans n'a sur le terrain aucune portée valable.

A priori il semble donc que les prises de contact annoncées jusqu'ici entre les belligérants se situent à un niveau inférieur du côté des Talibans n'engageant en rien la responsabilité de leurs plus hauts dirigeants.

On soupçonne, bien sûr, des questions de leadership chez certains de ces derniers qui ne souhaitent sans doute pas rater le train de la course au pouvoir. C'est en ces moments marqués par les premiers signes d'une paix prochaine que les les militants révolutionnaires s'activent en général pour prendre part à la distribution des porte-feuilles.