A force d'obéir aveuglément aux ordres, la justice algérienne finit par prendre elle-même des initiatives déplorables qui mettent en cause sa véritable raison d'être. Ainsi, le cas rapporté, ce matin, dans le journal El-Watan par son correspondant de Béchar, est typique de ces errements qui portent de graves préjudices aux justiciables. Il est vrai que les gouvernants d'Alger éprouvent si peu de respect pour cette institution que ces derniers ont toujours des raisons de s'inquiéter même quand ils s'estiment à bon droit de faire triompher les valeurs si chères d'équité et de bon sens dans les procès qui les engagent. Sans plus tarder, je livre donc l'article de Mohamed Nadjah.
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Chronique judiciaire de Béchar
Incarcération abusive d’une infirmière
« Les faits : une infirmière de Béchar, âgée d’une quarantaine d’années qui avait pour mission depuis dix ans d’évacuer les malades vers Alger, se trouve depuis plus d’un mois en prison.
« Au cours de ses fréquents séjours dans la capitale, l’aide-soignante se lie d’amitié avec une mère de famille et sa fille qui lui offrent, durant des années, leur hospitalité. Mais récemment, tout a basculé. Une dispute entre la mère algéroise et sa fille âgée d’une vingtaine d’années, éclate et la fille s’enfuit du domicile sans donner de nouvelles. L’infirmière, qui vient assez souvent leur rendre visite à l’occasion de ses déplacements à Alger, est aussitôt accusée par la mère d’avoir enlevé sa fille. Elle débarque à Béchar et porte plainte contre elle pour enlèvement, tout en déclarant avoir été agressée par l’infirmière et fournit preuve à l’appui un certificat médical d’incapacité de trois jours.
« Jugée sur le champ par le tribunal, l’infirmière se voit infliger une lourde peine d’emprisonnement de deux ans ferme, (une sanction jugée disproportionnée), pour agression en attendant de comparaître pour le deuxième délit : le kidnapping. Coup de théâtre : en apprenant, il y a une dizaine de jours, la nouvelle de sa disparition par voie de presse, la jeune fille se présente le lendemain au tribunal de Béchar, pour réfuter les dires et les accusations de sa mère contre l’infirmière. Elle explique au juge qu’elle a volontairement fugué du domicile parental parce que sa mère aurait voulu la marier de force. Depuis, l’affaire, rendue publique, continue de soulever maintes interrogations sur la condamnation et l’incarcération précipitées de l’aide-soignante.
« Selon des informations recueillies auprès d’une source crédible, cette fonctionnaire de la santé ne disposerait d’aucun antécédent judiciaire. On se demande, ici, après les révélations fracassantes de la jeune fille innocentant l’infirmière, si la justice va procéder à la réparation morale et financière de l’accusée qui a été souillée auprès des siens et de son employeur par ce scandale ? Telle est la question que l’on se pose ici, au sujet de cette rocambolesque affaire.
Par M. Nadjah »