Dans un petit entrefilet, paru en page 23 d’aujourd’hui, El-Watan s’offusque d’entendre Mokri, du MSP, « confondre la famille de la presse et la famille des hommes d’affaires ».
Bien naïf est le malheureux correspondant qui rapporte le propos. N’ayant sans doute aucune idée, particulièrement chez El-Watan, du montant des affaires brassées par ce journal, et partant des marges bénéficiaires faramineuses que se partagent régulièrement ses associés, ce pigiste croît probablement que les propriétaires de journaux perçoivent sensiblement les mêmes rémunérations que les journalistes qui cravachent dur pour gagner leur salaire de fin de mois, parfois même non déclaré, donc hors de toute protection sociale.
Quand on sait qu’une page de publicité d’El-Watan ou d'El-Khabar – plus de la moitié de l’espace total y est le plus souvent consacrée ici et là – coûte au client la bagatelle d'environ 100 000 DA, il est facile de faire le compte des recettes colossales nettes, grâce auxquelles d’ailleurs ces deux journaux se sont permis récemment l’investissement si important d’une nouvelle rotative flambant neuf. De là à faire le lien avec les bénéfices répartis dans les mains d’une petite dizaine d’associés, c’est à se demander pourquoi l’Etat continue-t-il d’ouvrir ses locaux, pour un loyer dérisoire, à des journaux de cette dimension, d’un côté ; et, de l’autre, pourquoi le fisc épargne-t-il à ces entreprises florissantes les retombées de contrôles tatillons qu’il s’acharne bien souvent à distribuer sans discontinuer à l’ensemble des autres entreprises privées du pays.
Le fait, de surcroît, est qu’aucune de ces entreprises de presse, petite ou grande, bénéficiaire ou déficitaire, n’obéit jusqu’ici aux dispositions élémentaires légales qui les contraignent à publier régulièrement leurs bilans annuels, comme cela se pratique couramment du reste à travers le monde.
Alors ! Mokri a-t-il eu tort de prendre la famille de la presse pour des hommes d’affaires ?