Une nouvelle crise résultant de la hausse vertigineuse appliquée ces dernières semaines aux principaux composants du béton, comme l'acier et le ciment, repose le problème lancinant des marchés publics que l'Administration algérienne continue d'adosser injustement, et dans une totale inconscience, sur la formule dite "prix fermes et non révisables", avec toutefois cette réserve, qui ne grandit pas le ministère en charge du dossier, que les compagnies étrangères opérant dans le pays sont exclues de ce système.
Tant que la corporation des entrepreneurs s'entêtera à activer en rangs dispersés, faute de s'organiser en structure pérenne, efficiente et essentiellement axée sur les intérêts de la profession et non sur les intérêts individuels de ses dirigeants, les pouvoirs publics continueront sans grand mal à leur imposer leur dictat, le plus souvent inspiré par une méconnaissance parfaite des difficultés réelles et des besoins d'un secteur aussi sensible qu'important. Ce n'est pas la première fois qu'ils imposent d'ailleurs leur seule approche des marchés sous cette formule qu'à la limite des pays sérieusement organisés et conscients des conséquences induites sur le marché peuvent se permettre de mettre en application chez eux, où les hausses de prix sont préalablement et toujours négociées directement avec les branches intéressées.
En Algérie, où les augmentations de prix continuent, de longue déjà, de s'inscrire en permanence dans des taux à deux chiffres, il faut être totalement fêlé pour accepter de soumissionner à des marchés totalement fermés à toute forme de révision des prix, même quand une stabilité apparente de ces derniers éloigne momentanément le spectre de leur chamboulement.
Aussi, les gesticulations récurrentes des entrepreneurs, à chaque fois que des augmentations abusives viennent rogner non seulement leur marge bénéficiaire mais surtout leurs capitaux propres, ne peuvent donc plus émouvoir la société elle-même et moins encore les pouvoirs publics, dont on feint toujours d'oublier qu'ils restent toujours sujets aux réflexes socialistes qui les agitaient hier encore.