Dans la seule wilaya de Blida, écrit Le Quotidien d'Oran de ce matin, on a estimé, au terme de l'année en cours, à quelques 104 milliards de centimes les ventes au noir, donc non facturées. Autrement dit, les droits fiscaux liés à ce montant s'élèvent à quelques 20 milliards au moins, l'équivalent d'environ le coût de réalisation de 200 logements sociaux.
Traduit à l'échelle nationale, un tel manque à gagner pour l'Etat se monterait à plus de 10 milliards de dinars, correspondant à un programme de 10 000 logements, un chiffre bien plus élevé qu'il ne faut pour enrayer définitivement les bidonvilles qui ternissent l'image du pays du nord au sud et d'est en ouest.
Il faut dire que ce phénomène de fraude fiscale, étendu à tout le territoire national, n'est pas toujours l'expression condamnable d'une foison de commerçants indélicats ou malhonnêtes qui fuient l'impôt pour préserver des marges de bénéfices excessives. Il résulte le plus souvent d'une action concertée menée par les principaux importateurs, inscrits au nombre des décideurs du pouvoir politique algérien, qui se sont accaparé l'essentiel du commerce extérieur pour réaliser d'énormes ponctions sur le budget de l'Etat.
Ces malfrats de grand chemin ne se contentent pas en effet d'éponger les liquidités disponibles au niveau des banques publiques pour servir leurs intérêts mais ils ont le front de magouiller au niveau des douanes, en faisant passer de fausses déclarations. C'est souvent des articles de peu d'intérêt qui sont déclarés à la place d'autres beaucoup plus importants ; sinon le jeu se fait sur les quantités à dédouaner qui restent minorées, quand ce n'est pas carrément par la soustraction à toute forme de déclaration douanière.
Telle manière d'opérer se répercutant naturellement sur les différents paliers de la commercialisation, les clients de ces gredins, qui n'ont pas même la ressource de s'approvisionner ailleurs - une espèce de monopole de fait étant mis en place -, se retrouvent démunis de factures d'achats et ne peuvent donc, à leur tour, que suivre le mouvement.
Les conséquences se retrouvent fatalement dans ces énormes fuites fiscales qui faussent totalement les données économiques du pays et amenuisent les ressources de l'Etat, aux dépens de la collectivité entière.