Le Monde.fr avec AFP | 18.11.2014
Le quotidien Libération et France Inter ont dévoilé, lundi 17 novembre, le contenu du procès-verbal de Gérard Limat, comptable de l'ex-maire de Corbeil-Essonnes (1995-2009), Serge Dassault. Les confessions de celui qui se présente comme «
l'homme à tout à faire » de l'avionneur ont permis de mettre au jour un incroyable système de mise à disposition d'argent liquide.
Selon son témoignage, M. Limat aurait remis au moins 53 millions d'euros à Serge Dassault entre 1995 et 2012. Entendu sous le régime de la garde à vue début octobre par les policiers de l'office anticorruption de Nanterre, ce Suisse de 74 ans a été mis en examen pour «
complicité de financement illégal de campagnes électorales et d'achat de votes » et «
blanchiment » dans le cadre de l'enquête sur la corruption électorale présumée à Corbeil.
LES BONS SERVICES DE COFINOR
Au centre de ce dispositif : la société financière genevoise,
Cofinor, une chambre de compensation dont la spécialité était, selon une description faite il y a quelques mois auprès de l'Agence France-Presse par un enquêteur, d'envoyer «
où vous voulez dans le monde votre argent que vous lui remettez en Suisse ». Le liquide que Gérard Limat dit avoir apporté à Serge Dassault, à Paris, était initialement puisé sur des comptes au Liechtenstein, au Luxembourg ou en Suisse, avant d'arriver sur ceux de
Cofinor.
«
Cofinor me donn[ait] un rendez-vous pas trop loin de l'Arc de Triomphe », le livreur «
me remet[tait] un sachet en plastique “passe-partout” (Carrefour, Dior, Fnac, etc.), lequel contien[ait] l'argent en numéraire entouré de papier journal. Ce n'était que des liasses de billets de 100 euros. » Le comptable se rendait alors au siège du groupe à Paris, où il déposait «
le sac dans un coin de bureau ». M. Limat a affirmé ne pas avoir été au courant de l'usage de ces fonds et n'a de fait pas établi de lien entre ces livraisons d'argent liquide et l'achat présumé de voix à Corbeil-Essonnes entre 2008 et 2012.
LA SOCIÉTÉ ISKANDIA AU LIBANCe système aurait pu perdurer si les banques n'avaient pas adopté des dispositions concernant la lutte contre le blanchiment d'argent. Pour les enquêteurs, ce blocage des établissements financiers européens pourrait avoir encouragé Serge Dassault à créer la société
Iskandia au Liban, et disposer ainsi de liquidités pour récompenser des acheteurs de voix présumés après les élections de 2010 qui ont vu la victoire de son homme de confiance de l'avionneur, Jean-Pierre Bechter.
Agé de 89 ans, l'homme d'affaires avait été mis en examen en avril pour «
achat de votes », «
complicité de financement illicite de campagne électorale » et «
financement de campagne électorale en dépassement du plafond autorisé ». S'il a reconnu des dons, il a toujours réfuté avoir acheté des voix d'électeurs lors des municipales de 2008, 2009 et 2010.
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Comprendre l'affaire Dassault en 5 minutes »
Comprendre l’affaire Dassault en 5 minutes par lemondefr
(http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/11/18/le-comptable-suisse-de-serge-dassault-lui-aurait-remis-53-millions-d-euros-en-cash_4524945_823448.html#xtor=AL-32280515)