Le Monde.fr | 12.04.2012
par Anna Benjamin
C'est l'épilogue de combats vieux de plus de cent ans : les États-Unis vont verser 1,023 milliard de dollars à quarante et une tribus amérindiennes, afin de régler une série de procès. Les tribus avaient deux revendications : percevoir des redevances pour les droits d'usage de leurs terres et de leurs ressources naturelles, comme le gaz, le pétrole, les pâturages et le bois, et récupérer l'argent perdu dans leurs comptes de transferts de propriété mal gérés par le gouvernement fédéral américain. Sur ce dernier point, le quotidien américain Cronkite News, qui cite Matt Fletcher, directeur du centre de droit à l'Université de Michigan, rappelle que "le ministère de l'intérieur a pendant longtemps fait une mauvaise gestion des comptes des Indiens. (...) Ils ne savaient souvent pas combien d'argent était sur les comptes, où il devait aller et d'où il venait."
Ce règlement met un terme "au long litige qui pesait sur les plaignants et les États-Unis", explique dans un communiqué le ministre de la justice, Eric Holder. "Il résout, de façon juste et honorable, les griefs historiques [des Amérindiens] sur la gestion des fonds alloués aux tribus, de leurs terres et autres ressources non financières, qui ont été, pendant bien trop longtemps, une source de conflit entre les tribus indiennes et les États-Unis", assure le texte.
"Il renforce la relation du gouvernement avec les peuples tribaux et contribue à rétablir une relation de travail positive avec leurs dirigeants, et donne plus de pouvoir aux communautés amérindiennes", a déclaré de son côté le ministre de l'intérieur, Ken Salazar.
UNE NÉGOCIATION DE PRÈS DE TROIS ANS
Le processus de règlement financier a commencé en 2009 après qu'un groupe de tribus a demandé à l'administration de Barack Obama d'accélérer les négociations. À l'époque, les États-Unis faisaient face à près de cent procès. "Toutes les tribus ont de mauvaises relations avec le gouvernement fédéral", a souligné à l'Associated Press Gary Hayes, chef de la tribu Ute des montagnes, qui va recevoir près de 42,6 millions de dollars. "Mais les graines que nous plantons aujourd'hui nous profiterons à l'avenir et continueront pour les générations futures", a-t-il ajouté.
Cet accord fait suite aux 3,4 milliards de dollars de règlement proposé en juin 2011 par le gouvernement fédéral à 300 000 Indiens, sur les 4,5 millions vivants aux États-Unis. Le Wall Street Journal rappelle que soixante-dix tribus restent encore en litige et que le ministère de la justice continue à travailler pour résoudre ces situations.
Pour la tribu des Nez-Percés, citée par le quotidien américain, il existe encore des créances non réglées liées à la vente de bois ou de calcaire. Les comptes gérés par le gouvernement des États-Unis étaient dans "un tel désarroi qu'il était presque impossible de déterminer le montant exact de l'argent que devaient les États-Unis à la tribu", estiment les Nez-Percés.
23 MILLIONS D'HECTARES EN GESTION
Depuis 1887, les autorités américaines sont en charge des 23 millions d'hectares qui appartiennent à des propriétaires indiens individuels et aux tribus. Le ministère de l'intérieur gère environ 100 000 contrats de location de terres et 2 500 comptes de transferts de propriété pour plus de 250 tribus. Il supervise ainsi les baux lucratifs pour la production pétrolière et de gaz, la récolte du bois et l'agriculture.
En 2008, une cour d'appel fédérale avait statué : les Indiens ne pouvaient prétendre qu'à 455 millions de dollars de réparations, alors même que les Indiens estimaient que Washington leur devait 47 milliards de dollars.
(http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2012/04/12/les-tribus-indiennes-vont-recevoir-un-milliard-de-dollars-de-dedommagement_1684618_3222.html)