Nombre de messages : 249 Date d'inscription : 07/04/2007
Sujet: Le prix Nobel de la paix décerné à trois femmes Sam 8 Oct - 20:16
Le figaro.fr - 07/10/2011
De gauche à droite, Tawakkol Karman, Ellen Johnson Sirleaf et Leymah Gbowee
VIDÉO - La présidente du Liberia Ellen Johnson Sirleaf, et deux militantes des droits de l'homme, la Libérienne Leymah Gbowee et la Yéménite Tawakkul Karman, sont récompensées «pour leur lutte non-violente pour la sécurité des femmes».
Le prix Nobel de la paix a été conjointement attribué vendredi, pour la première fois de son histoire, à trois femmes: deux Libériennes, la présidente Ellen Johnson Sirleaf - actuellement en campagne - et la militante Leymah Gbowee. La troisième est une Yéménite, la journaliste Tawakkol Karman.
Première femme arabe à recevoir la prestigieuse récompense, la Yéménite a été la première à réagir. Elle a immédiatement dédié son prix au «printemps arabe», cet élan de révolte populaire qui a renversé ou ébranlé plusieurs régimes autoritaires en Afrique du Nord et au Moyen-Orient cette année.
Les trois lauréates sont récompensées « pour leur lutte non violente en faveur de la sécurité des femmes et de leurs droits à participer aux processus de paix », a déclaré à Oslo le président du comité Nobel norvégien, Thorbjoern Jagland.
Ellen Johnson Sirleaf, première présidente élue d'Afrique
Première femme à être démocratiquement élue à la tête d'un pays africain en 2005, Ellen Johnson Sirleaf, 72 ans, a œuvré pour la reconstruction d'un pays ravagé par 14 ans de guerres civiles, qui ont fait quelque 250.000 morts et laissé une économie exsangue. Elle reçoit le Nobel quatre jours seulement avant une élection présidentielle incertaine au cours de laquelle elle brigue un second mandat. « Depuis son investiture en 2006, elle a contribué à assurer la paix au Liberia, à promouvoir le développement économique et social, et à renforcer la places des femmes », a fait valoir Thorbjoern Jagland.
D'abord soutien de Charles Taylor entré en rébellion contre le régime de Samuel Doe, elle en devient l'adversaire à la lumière des violences qui vaudront au chef de guerre devenu président (1997-2003) d'être jugé à La Haye pour des crimes de guerre et contre l'humanité.
Dès son investiture, elle a entrepris une opération de charme auprès des institutions financières internationales qui la connaissent bien: économiste formée à Harvard, cette mère de quatre enfants et grand-mère de huit petits-enfants a travaillé pour l'ONU et la Banque mondiale.
Ministre des Finances dans les années 1960 et 1980, son objectif est d'effacer la dette et d'attirer les investisseurs pour la reconstruction, ce qu'elle a en partie obtenu.
La lutte contre la corruption et pour de profondes réformes institutionnelles dans la plus vieille République d'Afrique subsaharienne, fondée en 1822 par des esclaves noirs affranchis venus des États-Unis, a toujours été au cœur de son action politique. Ce combat, d'où elle tire son surnom de «Dame de fer», lui a valu d'être envoyée deux fois en prison dans les années 1980 sous le régime de Samuel Doe. Mais la tâche est ardue, tant le Liberia est gangrené par les scandales de corruption et miné par les profondes déchirures issues des guerres fratricides.
Leymah Gbowee, «grèviste du sexe» pour en finir avec la guerre
L'accession au pouvoir d'Ellen Johnson Sirleaf a été rendue possible par le travail sur le terrain de Leymah Gbowee, «guerrière de la paix» à l'origine d'un mouvement pacifique qui contribuera, notamment à l'aide d'une «grève du sexe», à mettre fin à la deuxième guerre civile en 2003. Lancée en 2002, son initiative originale voit les femmes - toutes confessions religieuses confondues - se refuser aux hommes tant que les hostilités se poursuivent, ce qui oblige Charles Taylor, ex-chef de guerre devenu président, à les associer aux négociations de paix.
« Leymah Gbowee explique la démarche de la «grève du sexe »
Contre les démons de la guerre, Leymah Roberta Gbowee a également recours à la prière. Elle exhorte les femmes à faire comme elle, à prier pour la paix, ce qu'elles font sans distinction de religion, souvent vêtues de blanc.
« Leymah Gbowee a mobilisé et organisé les femmmes au-delà des lignes de division ethniques et religieuses pour mettre fin à une longue guerre au Liberia et assurer la participation des femmes aux élections », a noté Thorbjoern Jagland.
Tawakkol Karman, journaliste féministe, symbole du printemps arabe
Issue d'un autre continent, la troisième lauréate, Tawakkol Karman, « aussi bien avant que pendant le printemps arabe », a elle aussi joué « un rôle prépondérant dans la lutte en faveur des droits des femmes, de la démocratie et de la paix au Yémen », a ajouté Thorbjoern Jagland.
Journaliste née en 1972, cette jeune femme frêle est une figure emblématique du soulèvement populaire contre le président contesté Ali Abdallah Saleh dans un pays conservateur où les femmes ne jouent pas de rôle de premier plan en politique. Elle a été l'un des principaux meneurs des manifestations estudiantines de janvier qui ont donné le coup d'envoi au soulèvement, ce qui lui valu d'être brièvement arrêtée.
Jusqu'à présent, seules 12 femmes avaient reçu le prix Nobel de la paix en 110 ans d'histoire, la dernière étant l'écologiste kényane Wangari Maathai qui vient de décéder.
Un record de 241 individus et organisations étaient en lice cette année pour le Nobel de la paix, une édition pour laquelle des acteurs du «printemps arabe» étaient donnés comme favoris.
Le prix sera remis à Oslo le 10 décembre, date-anniversaire de la mort de son fondateur, l'industriel et philanthrope suédois Alfred Nobel. Il consiste en une médaille, un diplôme et un chèque de 10 millions de couronnes suédoises (environ un million d'euros).