Depuis hier matin, l'annonce par le Canard enchaîné de sa publication dans son numéro d'aujourd'hui d'un papier relatant le voyage gracieux en Égypte du Premier ministre François Fillon, lors de ses dernières vacances de fin d'année, a jeté la consternation dans le monde politique français. Il y a là, en effet, un coup rude pour la droite au pouvoir et une occasion inespérée pour la gauche de se requinquer aux dépens de son adversaire à l'approche d'une échéance cruciale, celle des présidentielles de 2012.
Si la gauche d'une façon générale s'est dit scandalisée par une grave faute du chef du gouvernement venant se greffer sur celle, commise au même moment et de manière quasiment identique, de Michelle Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères qui est encore loin de son épilogue, la droite fait front unique pour contrer particulièrement les responsables du PS, qui s'abaissent, selon elle, à des débats de "caniveau" très lointains des vrais problèmes posés aux Français aujourd'hui.
Pour amortir les effets du scandale, le cabinet du Premier ministre s'est vite empressé de publier, dès hier après-midi, un communiqué qui donne quelques détails sur le voyage effectivement réalisé en Égypte, durant les fêtes de Noël, par Fillon et sa famille, sur l'invitation du gouvernement égyptien. Il précise même qu'un avion de ce dernier a été mis gracieusement à disposition des commensaux, pendant qu'un autre, de type Falcon, emprunté au gouvernement français, pour assurer l'aller-retour du voyageur de marque et des siens, se retrouvait bloqué à l'aéroport du Caire pendant la durée du séjour, soit une dizaine de jours, et que son équipage était également pris en charge dans un hôtel de grand luxe aux frais de l'État égyptien.
Tous les arguments sont donc réunis pour donner à l'opposition en France suffisamment d'éléments pour critiquer la conduite irréfléchie du Premier ministre qui, par de nombreux côtés, se trouve être moins excusable encore que celle de M.A.M.
La révélation de ce nouvel errement a immédiatement donné lieu à de nombreuses prises de position qui le fustigent mais dévoilé en même temps des pratiques non moins déplorables et largement ancrées dans l'esprit du monde politique français. Ainsi, selon l'ancien ministre de la Justice de Mitterrand, Robert Badinter, évoquant tout particulièrement le président Chirac, bien d'autres privilèges autrement plus importants et répétitifs ont profité directement à ce dernier au Maroc, sous le règne de Hassan II.
D'autres observateurs ont également rappelé à cette occasion que Sarkozy, lui-même, qui a séjourné au Maroc durant la même période de fin d'année 2010, a sans doute bénéficié d'autres largesses que celles qui lui avaient été offertes en Égypte même lors de ses premières vacances dans ce pays avec sa fiancée devenue un peu plus tard sa dernière épouse.
Les mœurs politiques françaises, comme on le voit, expliquent par voie de conséquence nombre d'égarements des positions officielles sur la question sahraouie, par exemple, et de bien d'autres encore. Les intérêts personnels des gouvernants ont souvent pris le dessus sur la raison et la justice, ce qui est loin d'être de simples billevesées.