Jamais, depuis son indépendance, l'Algérie n'a vu ses relations avec Paris se détériorer aussi profondément que depuis l'avènement de Sarkozy à la tête de l'Etat français. Certes, elles traversaient des périodes en dents de scie, quand des différends imprévus venaient à surgir pour les agiter de temps à autre. Mais, en aucun cas elles n'ont jamais été autant troublées par le fait de l'une ou l'autre partie au cours des dernières années.
Sur des sujets sensibles, comme l'affaire des moines de Tibhirine il y a un an, l'affaire de Hasseni, le diplomate algérien arrêté à Marseille puis relâché, et d'autres encore, l'Elysée ou Matignon s'étaient fait fort de provoquer Alger, au point où des députés algériens, acculés aux extrémités, ont, ces dernières semaines, poussé le bouchon jusqu'à initier une loi sur la criminalisation du colonialisme français.
Plus récemment encore, c'est le discours tenu ce matin par François Fillon, le Premier ministre français, sur le sujet du Sahara occidental qui vient jeter un nouveau trouble à la veille de l'anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, un moment chargé de symboles qui n'a guère besoin de rappeler les douloureux souvenirs de la colonisation. Contre toute attente, Fillon, répondant à son hôte, le Premier ministre marocain, Abbas el-Fassi, en visite dans la capitale française, a estimé que la formule dite "d'autonomie interne", proposée par Rabat, lui paraît la mieux indiquée pour régler le problème de l'ex colonie espagnole. C'est celle « qui nous semble être la base la plus pertinente pour sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons ». « Nous faisons tous nos efforts pour encourager la négociation autour de cette proposition et nous soutenons notamment tous les efforts de l'Onu et de son envoyé spécial pour y parvenir », a-t-il déclaré.
El-Fassi en a alors profité, depuis Paris, pour charger Alger de tous les maux, allant jusqu'à non pas plaider la cause de la réouverture de la frontière algéro-marocaine, fermée d'ailleurs par le Maroc, qui constitue une véritable soupape pour l'économie marocaine quasiment étouffée depuis le fermeture, mais l'accuser d'avoir ainsi bloqué le processus de rapprochement des peuples d'Afrique du Nord (le mot Maghreb ne me paraissant pas juste).
Pour cet illustre hôte français, qui se veut être un donneur de leçons, l'Algérie gaspille aujourd'hui ses revenus du pétrole dans l'armement et son soutien au Polisario, aux dépens du développement du pays et des besoins du peuple algérien.
Quant aux propos plutôt mielleux de Fillon, tout semble indiquer que la diplomatie française préfère privilégier sa propre perception toute singulière du problème saharien que de se ranger derrière une décision rendue à l'échelle internationale par l'ONU reconnaissant expressément au peuple saharien le droit à l'autodétermination.