Le statut de l'Inde fabricant et pourvoyeur de produits pharmaceutiques à bon marché à travers le Tiers-Monde secoué notamment par le sida semble désormais inexorablement remis en cause.
Malgré le soutien des organisations humanitaires qui s'y approvisionnent à profusion pour se porter elles-mêmes à l'aide des pays pauvres, l'Inde, membre de l'Organisation mondiale du commerce, ne peut se permettre longtemps de croiser le fer avec les multinationales d'essence occidentales auxquelles elle soustrait, de façon quasiment irrégulière, une part considérable du marché mondial. Par les lois qu'elle a promulguées pour promouvoir et protéger ses propres productions de médicaments, constitués en grande majorité de simples copies des médicaments originaux sur la base desquels d'ailleurs les fabricants locaux obtiennent anormalement l'homologation indispensable pour la commercialisation de leurs produits, l'Inde se place de toute évidence en porte-à-faux par rapport à ses propres engagements au sein de l'OMC.
Entrée en négociations sur le sujet avec l'Europe mais aussi avec les USA, il lui faudra nécessairement finir, et peut-être même avant la fin de l'année en cours, par se mettre au diapason. En d'autres termes, ne pouvant se placer à contre-courant des règles internationales qui prévoient la protection de la production intellectuelle - en la circonstance, il s'agit de brevets d'invention souvent très onéreux -, New Delhi devra souscrire forcément au devoir de verser les royalties dues aux firmes occidentales qui ont mis au point les médicaments copiés ou desquels ont été tirés des génériques.
Par cet accord, ces firmes seront donc fondées à faire saisir, le cas échéant, les médicaments copiés ou génériques produits en Inde et destinés à l'exportation. Or, c'est précisément là le principal sujet de préoccupation des organisations humanitaires comme des pays où sévit tout particulièrement le sida. Sachant l'énorme différence de prix à la baisse, grâce à laquelle des centaines de milliers de malades peuvent se soigner aujourd'hui, l'on craint que l'alignement de l'Inde sur les producteurs internationaux ne signe la condamnation de ces malheureux, tout particulièrement en Afrique.