Dans une conférence de presse qui était à tout le moins très attendue, Charles Pasqua, ancien ministre de l'Intérieur du gouvernement Chirac, règle ses comptes, après avoir été lui-même jugé et condamné à un an de prison ferme dans l'affaire de l'"angolagate".
Au côté de ses deux principaux amis, Pierre Falcone, cet homme incarcéré devenu célèbre par ses multiples implications dans les ventes d'armes à l'Afrique, et Marchiani, ancien préfet du Var, poursuivi et condamné dans une autre affaire de détournement le mettant en avant avec lui-même, Charles Pasqua a écopé de cette peine qu'il décrie aujourd'hui en la jugeant aussi injuste qu'insensée.
Dans la foulée de ses protestations véhémentes, Pasqua a même cru devoir impliquer personnellement Chirac, l'ancien président de la République, ainsi que son Premier ministre de Villepin et ses ministres des Affaires étrangères et de la Défense nationale. Pour lui, il est incontestable que ces hommes, et d'autres ayant occupé des fonctions moins élevées, étaient parfaitement au courant des tractations connues sous le nom de l'"angolagate". En l'occurrence, il ne s'agissait rien moins que de ventes considérables d'armes, en 1995/96, au gouvernement angolais qui se trouvait alors en butte avec les rebelles de l'Unita, une formation d'opposition menée par Savimbi. Les armes provenaient des pays de l'Est et de la Russie, et les négociations étaient organisées par le principal meneur Pierre Falcone, a indiqué Pasqua. Ce dernier s'est même fait fort de préciser à son auditoire les références des courriers des services spéciaux ayant fait état de ces trafics à l'intention des principaux responsables de l'Etat.
Pasqua, que le tribunal avait suspecté d'avoir touché, à titre personnel, des commissions dans ce trafic illégal, s'en est défendu fermement une fois encore devant les journalistes, estimant que, si versement de commissions il y aurait eu, il relève du pouvoir de la justice d'en rechercher et révéler les bénéficiaires.
Refusant fermement de jouer au larron, l'ancien responsable du S.A.C. (organisation marginale mise en place à une certaine époque pour lancer le gaullisme) déclare en avoir eu assez de servir de bouclier, pendant que d'autres hommes politiques de premier plan, qui ont beaucoup de choses à se reprocher, passent librement entre les mailles de la justice.
De toute évidence, l'homme qui, à 82 ans, n'a plus rien à perdre après avoir assisté à la condamnation de son propre fils Pierre, vient de décrocher la timbale par ses révélations retentissantes, qui risquent d'empoisonner encore longtemps l'atmosphère de la vie publique en France.