Par-delà les problèmes de la faim et de la malvie, l’Afrique subsaharienne vit dans une situation sanitaire désormais devenue dramatique. La pandémie du sida, qui ronge nombre de ses Etats depuis maintenant plus de deux décennies, est loin d’être contenue et moins encore maîtrisée. En dépit des efforts, un peu plus apparents il est vrai ces dernières années, de la communauté internationale pour y distribuer des médicaments ou financer des centres de soins, la maladie s’étend hélas avec une rapidité vertigineuse et menace désormais l’équilibre même des ménages et le devenir de leurs enfants.
Au Mali notamment, où Philippe Bernard, du journal Le Monde, a glané quelques informations rapportées dans l’édition du 8 écoulé, la maladie semble s’être installée durablement, à cause surtout des pesanteurs sociologiques difficiles à combattre. Le sida reste un tabou total, comme partout ailleurs en Afrique, a-t-il relevé. Ensuite, faute de communication entre eux, les conjoints ayant contracté le virus ne se donnent même pas de peine de se déclarer, et moins encore de prendre les élémentaires précautions d’usage pour éviter la transmission de leur maladie. Quand, de surcroît, les deux conjoints ont récolté ce dernier à l’extérieur, chacun de leur côté, on use alors de vingt subterfuges pour laisser son partenaire dans l’ignorance complète, feignant ainsi de mesurer les conséquences regrettables accompagnant la conception de leur progéniture.
Bien que les coûts des traitements médicaux aient pu être rabaissés de 90 %, grâce à l’aide internationale, ou que la gratuité des soins soit même par endroits assurée, nombre de séropositifs n’osent, par ailleurs, même pas se rapprocher des centres de soins, à cause tout simplement de cette gêne qu’ils éprouvent à s’auto-désigner en public. Il est permis dès lors de penser que s’ignorent beaucoup de ces séropositifs que rebute le seul examen de dépistage.
En offrant ainsi plus de liberté à la maladie de se propager - l’Afrique compte aujourd’hui des dizaines de millions de séropositifs -, il est fort à craindre, à moins d’une découverte imminente d’un vaccin et d’un traitement radicaux susceptibles d’enrayer définitivement l’expansion du virus, que toute l’Afrique et par suite le monde entier ne soient contaminés dans les moindres délais.