Le Monde.fr avec AFP | 10.04.2012
L'extradition par le Royaume-Uni de l'imam radical Abou Hamza vers les États-Unis, qui l'accusent d'attentats anti-américains, ne viole pas la Convention des droits de l'homme, a estimé mardi la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH). La cour de Strasbourg demande toutefois dans son arrêt que l'extradition de l'imam et de cinq autres prisonniers soit bloquée pendant trois mois, jusqu'à la fin du délai d'appel.
Mustafa Kamal Mustafa, dit "Abou Hamza Al-Masri", et cinq autres hommes actuellement détenus au Royaume-Uni s'étaient tournés vers la CEDH. Ils estimaient que leur incarcération probable dans une prison "
supermax", un "
pénitencier américain de sécurité maximum", à Florence, dans le Colorado, ainsi que la peine de réclusion à vie sans libération conditionnelle à laquelle ils pourraient être condamnés s'apparenteraient à un "
traitement dégradant ou inhumain" (interdit par l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme). "
Il n'est pas du tout certain que, s'ils étaient extradés, les requérants seraient reconnus coupables des charges qui pèsent contre eux", a toutefois observé la cour, estimant par ailleurs qu'une peine de réclusion à vie n'était pas "
disproportionnée" au regard des accusations de terrorisme. Enfin, les requérants "
n'ont pas démontré qu'il y aurait un réel risque (de violation de l'article 3 de la convention) en conséquence de leur sentence".
Borgne et manchot, il arbore un crochet, Abou Hamza est accusé par Washington d'avoir pris part à des enlèvements de touristes occidentaux au Yémen, d'avoir facilité la mise en place d'un camp d'entraînement terroriste aux États-Unis et d'avoir aidé le financement de candidats au djihad désireux de se rendre au Proche-Orient pour y subir un entraînement à des actes terroristes. Il est visé en tout par onze chefs d'accusation liés au terrorisme. Abou Hamza a été condamné en février 2006 à sept ans de prison pour incitation au meurtre et à la haine raciale. La CEDH avait bloqué en juillet 2010 la procédure d'expulsion, ce qui avait suscité de vives réactions en Grande-Bretagne.
AL-QAIDA MENACE EN CAS D'EXTRADITION D'ABOU QATADAAl-Qaida menace de s'en prendre au Royaume-Uni si Londres en vient à extrader l'islamiste Abou Qatada en Jordanie, affirmant que cela "
ouvrira la porte du Mal" pour les autorités britanniques. La CEDH avait bloqué en janvier l'extradition d'Abou Qatada - condamné en 1998 en son absence à quinze ans de travaux forcés pour la préparation d'attentats - au motif que des preuves obtenues sous la torture pourraient être retenues contre lui.
La Grande-Bretagne tente de trouver un moyen pour se débarrasser de l'islamiste, qui fut un temps considéré comme le chef spirituel d'Al-Qaida en Europe. Le Jordanien, âgé de 51 ans et qui a passé une grande partie des six dernières années en prison au Royaume-Uni malgré l'absence de charges, a été libéré sous conditions le 13 février. Il pourrait être totalement libre de ses mouvements sous trois mois.
Au début de mars, la ministre de l'intérieur britannique, Theresa May, avait eu un entretien avec son homologue jordanien portant sur le cas d'Abou Qatada, que Londres voudrait renvoyer dans son pays. Le gouvernement jordanien avait assuré le 15 février à James Brokenshire, secrétaire d'État chargé de la sécurité britannique, en visite dans le pays, qu'Abou Qatada serait jugé "
équitablement" s'il rentrait dans son pays.
Dans son communiqué, Al-Qaida a proposé qu'Abou Qatada puisse choisir son pays d'accueil parmi ceux du Printemps arabe, théâtre d'une poussée des mouvements islamistes, affirmant par ailleurs que l'homme "
n'a aucun lien organisationnel avec Al-Qaida".
(http://www.lemonde.fr/europe/article/2012/04/10/londres-autorise-a-extrader-des-imams-radicaux-al-qaida-menace_1682966_3214.html)