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 Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika

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M'hand

M'hand


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Date d'inscription : 10/05/2007

Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika Empty
MessageSujet: Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika   Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika EmptyJeu 2 Juin - 9:52

Le Soir d'Algérie publie comme suit la lettre adressée par l'ancien Premier ministre Mokdad Sifi à Abdelkader Bensalah, président de la Commission dite des Réformes mise en place par Bouteflika. Mokdad Sifi se déclare pour le changement radical et non pour le "replâtrage" du système
Voici sa correspondance intégrale.

**********************************************************************************
Monsieur le Président,

Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika Sifi10 Vous avez bien voulu m’adresser une lettre d’invitation à vous rencontrer pour participer à ce que vous qualifiez de « débat sur les réformes politiques cruciales et déterminantes pour l’avenir de notre pays », et à vous faire part de « mes opinions et propositions sur ces réformes attendues » telles qu’initiées par le président de la République.

Je vous remercie pour cette invitation et pour la considération que vous y manifestez à mon égard.

Je voudrais aussi vous exprimer tout le respect que je vous porte eu égard à vos positions patriotiques durant la décennie 90 qui nous avait réunis, en 1994-1995, dans la même équipe gouvernement-CNT, soudée pour la cause nationale, au moment où l’Algérie, en cessation de paiement et dont le tiers des communes échappait à l’autorité de l’État, subissait de plein fouet le terrorisme intégriste, l’isolement international et la lâcheté de beaucoup de personnalités politiques qui avaient préféré se terrer et se taire au moment où des Algériennes et des Algériens tombaient tous les jours, assassinés par les terroristes, et au moment où le pays, menaçant de sombrer, avait le plus besoin d’eux.

Au plan personnel, ma considération pour vous est sincère, parce que je n’oublie pas que vous n’aviez ni craint ni hésité à prendre des risques majeurs en acceptant de m’accompagner dans la délégation gouvernementale que j’avais conduite, par route, le 31 octobre 1995, à Aïn Defla, alors fief du terrorisme, et qu’au retour, entre Aïn Defla et Chlef, notre long cortège avait traversé, à la nuit tombée, une zone d’accrochage entre l’ANP et un groupe de terroristes, sans que les crépitements des armes, francs et intenses et semblant très proches, ne perturbent ni notre engagement, ni notre conversation, malgré la peur naturelle qui affecte tout un chacun.

Ceci pour vous rappeler que notre Algérie était revenue de loin à l’occasion des élections présidentielles du 16 novembre 1995, grâce à la marée populaire qui y avait participé, le peuple ayant renouvelé sa confiance envers ses dirigeants et mis le holà à la dérive du pays.

Aujourd’hui, nous n’avons plus les mêmes positions politiques et vous êtes chargé, de par votre statut, de noter et de rapporter à qui de droit, les messages de vos interlocuteurs.

Voici mon message principal qui est résumé dans un passage du discours du chef du gouvernement que j’étais et que j’avais adressé, au nom des pouvoirs publics, à la population de Aïn Defla le 31 octobre 1995, il y a 16 ans, et diffusé, le soir même, par la télévision nationale :

« Je sais les souffrances de la population de Aïn Defla qui n’a pas bénéficié suffisamment d’actions de développement et qui, après avoir enduré les affres du colonialisme, a continué, bien longtemps après l’indépendance, à être oubliée des décideurs centraux. C’est parce que les gouvernants ont failli que le sous-développement économique, la misère sociale et le sentiment de hogra ont favorisé l’émergence de la violence et de l’extrémisme.
C’est une leçon terrible que l’Algérie paie dans le sang de ses enfants et les larmes des veuves et des orphelins.
C’est une leçon que nul Algérien, à quelque niveau que ce soit, ne doit oublier, une leçon qui dit que : Quand on sème la hogra, on récolte la défiance
».

Au cas où cela peut apporter un plus, je vous joins, en annexe, le contenu de tout le discours de Aïn Defla, dont vous aviez bien pris connaissance en son temps, et qui, à mon humble avis, est plein de leçons et est susceptible de vous projeter en 1995, au moment où nous avions les mêmes positions politiques.

Je compte sur vous pour bien transmettre ce message à qui de droit. Vous êtes le mieux à même de le faire. Peut-être que le pouvoir saura tirer les leçons qu’il n’a pas encore su tirer depuis seize ans et qu’il cessera enfin de louvoyer en se voilant la face sur la misère et la hogra subies par le peuple.

C’est fort de ces principes qui m’ont toujours animé, que, s’agissant de cette initiative de consultation, je considère qu’il n’y a absolument aucune utilité pour le pays à ce que j’y souscrive.

Depuis près de 12 années, les partis et les personnalités opposés au régime dont certains sont invités aujourd’hui à votre débat, ont été empêchés de faire entendre leur voix et d’exprimer leurs opinions politiques face à l’autoritarisme du pouvoir qui a verrouillé les paysages politique et médiatique et imposé, par la force et la fraude, le viol de la Constitution et la gestion corrompue des ressources nationales.

Votre lettre m’invite formellement à formuler une opinion sur des « réformes politiques cruciales et déterminantes pour l’avenir de notre pays », alors qu’en réalité il n’est attendu de moi, comme des autres invités, qu’une simple déclaration verbale succincte à enregistrer, sans lendemain, portant avis et propositions sur de simples annonces d’aménagement des textes de la Constitution et des lois portant sur le système électoral, les partis politiques, la représentation de la femme dans les instances élues, le mouvement associatif, le code de wilaya, l’information et les cas d’incompatibilité avec la législature parlementaire.

Monsieur le Président,

Je ne vous ferai pas l’injure, à vous et aux membres de votre commission, de croire que quiconque puisse penser que les solutions aux problèmes politiques, économiques et sociaux du pays se résument à un simple réaménagement du texte de la Constitution ou des textes de lois.

Pour ma part, je pense que la crise que nous vivons aujourd’hui est précisément due au non-respect de la Constitution et des textes qui en découlent et au fait que des centres de pouvoir se placent délibérément au-dessus des lois.

La Constitution est violée dans ses fondements et dans tous les domaines qu’elle recouvre. Faut-il faire une autre constitution pour la violer de nouveau ? Quelle est alors la solution ?

Le système électoral pèche systématiquement et publiquement par la fraude avérée des élections, ce qui délégitime les pouvoirs législatif et exécutif, fait perdre totalement la confiance de la population dans ses gouvernants, alimente la suspicion et nourrit le phénomène de désobéissance civile et l’instabilité du pays. Faut-il changer la loi électorale et maintenir la fraude ? Ou bien changer ceux qui sont responsables de cette fraude ?

La loi sur les partis politiques autorise la création des partis que le pouvoir bloque illégalement depuis plus de 12 ans. Faut-il changer la loi ou le pouvoir ?

La Constitution fait de la femme l’égale de l’homme alors que le code de la famille, anticonstitutionnel, bride la femme jusque dans son intégrité morale.

Faut-il ignorer l’aliénation fondamentale de la femme et veiller plutôt à sa représentation dans les institutions élues ? Et cela tout en continuant à violer la Constitution en brimant la femme ?

Le problème du mouvement associatif, actuellement totalement ligoté, réside dans son aliénation au pouvoir qui le gère par la répression et la corruption pour neutraliser toute initiative qui échappe à son contrôle.

La solution ne consiste-t-elle pas, par une simple décision politique, à rendre son autonomie à la société civile ?

S’agissant du code de wilaya, la réalité est que le pouvoir, en violation de l’esprit de la Constitution donne des prérogatives exorbitantes aux walis, au détriment de celles des assemblées élues.

Faut-il traiter de ce code, au titre de cette consultation, pour qu’ensuite il subisse le même sort que le code communal ?

A quoi sert-il alors de traiter de ces lois et codes et des consultations les concernant si le problème se situe au niveau des pouvoirs ? Il faut donc traiter des pouvoirs.

Pour ce qui concerne la loi sur l’information, la liberté d’expression est consacrée par la Constitution mais elle est, dans les faits, brimée et réprimée. Les médias publics et notamment lourds sont illégalement monopolisés par le pouvoir à son profit exclusif et demeurent fermés à toute opinion différente au mépris de leurs missions de service public. Encore une fois, c’est le pouvoir qui est le véritable problème du pays. Que faut-il faire alors dans ces cas de viol permanent et généralisé de la Constitution par le pouvoir ?

Sur les plans économique et social, déjà caractérisés par l’absence flagrante de stratégie et de visibilité, les lois qui ne sont pas appliquées et celles qui sont violées sont légion, y compris les lois de finances, par circulaire, voire oralement, par ceux-là mêmes qui sont chargés de veiller à leur stricte application, portant ainsi gravement atteinte à l’autorité, au sérieux et à la crédibilité de l’État lui-même, ainsi qu’à la saine gestion des affaires dont il a la haute charge au plan national comme au plan international.

En vérité, tous les problèmes évoqués résultent également de l’absence d’une réelle opposition politique et d’autres contre-pouvoirs conséquents et d’instruments de contrôle efficaces, absence voulue et imposée par le pouvoir, avec pour conséquences des dérives morales ayant profondément affecté la société dans ses valeurs les plus nobles, au point de menacer sa cohésion et sa stabilité.

Un exemple illustratif de ce mode de gouvernance autoritariste est donné par la neutralisation du Conseil national économique et social, qui n’avait pourtant qu’un simple rôle consultatif, mais qui a fini par gêner par ses publications et ses prises de position quelque peu critiques à l’égard de l’exécutif.

C’est dire que le problème du pays n’est donc pas d’ordre juridique, mais d’essence politique. Il découle de la volonté délibérée et déclarée du pouvoir, illégitime d’ailleurs, de se situer au-dessus de la loi, allant à contre-courant des aspirations légitimes du peuple et notamment de la jeunesse, y compris universitaire, abandonnée, brimée, désemparée, sans projet, sans perspectives, sans possibilité de recours et poussée, ainsi, à tous les extrémismes, comme la harga, la drogue, la criminalité et autres délinquances et violences, à l’immolation et autres suicides. Et pourtant, le pouvoir ne cesse d’étaler la richesse du pays en ressources financières qu’il dilapide et distribue à tout va. Où se trouve alors la solution du problème ? Certainement pas dans les simples réaménagements des textes de lois.

Cette grave déviance a conduit à substituer à la souveraineté de la loi, des méthodes d'exercice du pouvoir basées essentiellement sur des critères népotiques, clientélistes et claniques. Cette forme de gestion permissive a eu pour corollaire, la déliquescence de l’État et de son administration, laissant le champ libre à la pesante et sclérosante bureaucratie, l’économie informelle, encouragée d’ailleurs, la corruption qui semble désormais s’imposer à l’État apparemment noyé qui s’évertue à la combattre par le discours et le slogan et des textes sans lendemain, aux pratiques maffieuses qui se généralisent et d’une manière générale aux forces de régression qui disputent à l’État leur part d’influence et de gouvernance informelle.

La crise profonde que vit actuellement le pays coïncide avec un environnement régional explosif qui voit les régimes arabes sclérosés et corrompus tomber, l’un après l’autre, dans un tragique jeu de dominos qu’exploitent, dans leur intérêt, certaines puissances occidentales. Cette exploitation est déclenchée, facilitée et encouragée par la faiblesse des pays concernés résultant de l’illégitimité des régimes en place et de l’absence de solidarité et de cohésion des populations autour de leurs gouvernants.

En réduisant la solution de cette crise majeure à de simples réformes juridiques, le pouvoir algérien, par cécité politique et culturelle, incompétence et léthargie, n’a pas saisi la véritable nature ainsi que la portée des révolutions des peuples arabes.

Ce sont ces analyses erronées qui poussent nos dirigeants à croire qu’ils seront épargnés parce que « l’Algérie n’est pas la Tunisie, n’est pas l’Égypte et n’est pas la Libye ! ».

En 1995, c’est le peuple algérien qui s’est levé comme un seul homme un certain 16 novembre pour participer, massivement, malgré l’interdiction et les menaces de mort des GIA (Urne égale Cercueil, disaient-ils), à des élections présidentielles sans précédent autour d’un seul mot d’ordre : Non au terrorisme !

Cet engagement et cet enthousiasme populaires exceptionnels, exprimés dans une conjoncture pourtant difficile, n’ont malheureusement pas trouvé l’écho qu’ils méritaient auprès du pouvoir qui n’a pas su se hisser à la hauteur des sacrifices consentis par le peuple. Bien au contraire, c’est l’autoritarisme, la suffisance et l’arrogance en direction du peuple qui ont toujours caractérisé la gouvernance du pouvoir depuis les élections présidentielles de 1995.

Aujourd’hui, ce peuple a perdu toute confiance dans ses gouvernants, et n’accorde plus aucun crédit à tout ce qui en émane. Le régime a été gravement discrédité aux yeux des citoyens, notamment par les affaires de corruption sans précédent dans l’histoire du pays, étalées longuement dans les médias nationaux et étrangers, et fortement décrié du fait de la dilapidation des ressources nationales.

À cet égard, vous n’ignorez pas que depuis plusieurs mois, la rue gronde dans l’ensemble du pays, les citoyens n’hésitent plus, malgré la dissuasion et la répression, à exprimer leur mécontentement. Cette agitation, au-delà des demandes sociales qu’elle exprime, traduit un déficit profond de confiance, de dialogue et de concertation, lui-même conséquence de la non-représentativité des «élus», tant locaux que nationaux et de l’autisme du pouvoir et de ses appareils.

Monsieur le Président,

C’est vous dire combien la situation ainsi brièvement décrite met en relief l’inanité de la démarche adoptée, fondée sur une simple révision de textes, pour le traitement d’une crise majeure de nature éminemment politique. Le pouvoir, qui n’admet pas d’alternance, s’est toujours donné comme priorité absolue de combattre et d’annihiler l’émergence d’une saine, sérieuse et nécessaire opposition politique organisée, en utilisant tous les moyens possibles, y compris la manipulation, la fraude, la corruption et la répression, et il a réussi à maintenir cette opposition à l’état embryonnaire, sans poids conséquent, sans capacité de mobilisation et sans véritable crédibilité. Aujourd’hui, paniqué et acculé par une crise majeure, conséquence de sa propre gouvernance erratique, il cherche à négocier un semblant de réformes avec une opposition squelettique. En conséquence, faute d’avoir affaire à une opposition dont il n’avait jamais voulu, il a aujourd’hui affaire au peuple face auquel il ne veut pas se retrouver tout seul. C’est l’impasse dans laquelle ce pouvoir s’est finalement lui-même enfermé.

A mon avis, le pays n’a pas besoin de ce genre de réformes, il a besoin d’un changement radical. Le peuple doit pouvoir choisir et élire démocratiquement ses dirigeants. Le pays doit bénéficier d’une véritable politique de développement basée sur une stratégie rationnelle et un programme cohérent et transparent sans corruption, qui réponde réellement aux besoins de la population dans tous les domaines.

La justice doit devenir réellement indépendante et servir de base à la construction d’une paix civile basée sur la justice et la vérité, sans impunité pour les voleurs, les criminels et les terroristes. Le Président n’as pas besoin d’écouter les avis des partis et des personnalités nationales pour savoir ce que le peuple veut. Il n’a qu’à écouter le peuple et surtout les jeunes qui sont les plus concernés par l’avenir du pays.

Or, à interpréter les multitudes d’émeutes et de manifestations qui secouent quotidiennement le pays dans la quasi-totalité des wilayas et des secteurs d’activité de l’État, et comme les Tunisiens, comme les Égyptiens, comme les Yéménites, comme les Syriens, comme tous les peuples opprimés, les Algériens veulent un changement radical du système de gouvernance.

Aujourd’hui que la révolution frappe aux portes des dictatures arabes, je ne souhaite pas que l’Algérie s’embrase. Je ne souhaite pas à notre peuple un retour à la violence des années de feu. Nous avons eu trop de morts, trop de disparus. Les larmes de dizaines de milliers de mères, d’épouses et d’enfants n’ont pas encore séché.

L’Algérie a les moyens financiers et les compétences humaines pour devenir rapidement un grand pays démocratique, fort surtout de la confiance et de la cohésion de son peuple. Il faut pour cela agir vite et avoir la lucidité et le courage de prendre des décisions historiques. Ces décisions urgentes doivent être prises maintenant, pacifiquement, avant que le peuple ne les impose dans le chaos des émeutes violentes, avec le risque de la destruction de la Nation.

À mon humble avis, il importe au plus tôt d’instaurer une période de transition, conduite par un gouvernement de transition représentatif adossé à un conseil de sages, chargé d’amender la Constitution, d’organiser des élections présidentielle et législatives et de veiller à libérer immédiatement le champ politique et le champ médiatique de toute entrave. L’Armée nationale populaire devra s’engager à accompagner ce processus et à œuvrer à son succès.

Cela sera très difficile mais le prix à payer sera mille fois moindre que celui que la Nation devra payer à la rue si le pouvoir continue à se murer dans son arrogance.

Monsieur le Président,

Vous comprendrez aisément les raisons qui m’ont amené à répondre de la sorte à votre invitation, car je n’aurais pas souhaité, en vous rencontrant, cautionner, par ma présence, la démarche retenue dans le cadre de vos consultations, démarche que je considère inappropriée face à l’enjeu éminemment politique de la crise. Démarche qui fera perdre un temps précieux au pays et susceptible, par ses atermoiements et temporisations, d’exacerber et de précipiter un dénouement violent de cette crise, dénouement que nous voudrions tous éviter à notre Nation et à notre Peuple.

Nous vivons un moment historique où de graves responsabilités historiques doivent être assumées par nos gouvernants et par chacun de nous.

Avec l’expression de ma haute considération.

Alger le 1er juin 2011
Mokdad Sifi




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Mahmoud

Mahmoud


Nombre de messages : 260
Date d'inscription : 08/06/2007

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MessageSujet: Re: Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika   Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika EmptyMar 7 Juin - 16:43

Maître Moncef Benouniche adresse, à son tour, à Bensalah, son opinion qui est aussi celle d'un très grand nombre d'Algériens agacés par le jeu aussi puéril que malfaisant du pouvoir. Voici sa lettre, telle que publiée ce mardi 7 juin 2011 par Le Soir d'Algérie.
*********************************************************************************

Monsieur le Président,
Je tiens, tout d’abord, à souligner que je ne suis sûrement pas sur la liste des personnes que vous comptez recevoir pour recueillir les points de vue sur les réformes envisagées par le chef de l’État, qu’il n’y a, d’ailleurs, aucune raison pour que j’y figure et que, en vérité, je m’en réjouis.

Le citoyen, engagé et convaincu que seule la République (res publica, chose publique insusceptible d’appropriation privée) peut être le socle fondateur du lien social, souhaite s’adresser à vous pour vous dire tout le mal qu’il pense (cela, aussi, lui arrive encore malgré tous les efforts déployés pour détruire tout ce qui y ressemble) de la démarche, de la méthode et du principe même de la mission qui vous a été confiée et qui consiste à tout changer pour que tout reste pareil.

Il faut bien se rendre compte qu’un demi-siècle est — à l’échelle de la vie d’un humain en tout cas — une période de temps tout à fait considérable et qu’il est inacceptable d’imposer une «gestion» du temps aussi méprisante et perverse destinée à geler ce qui ne saurait n’être pas soumis à l’évolution qualitative ; est-t-il nécessaire de rappeler cette sagesse incontestable qui précise que le pays n’est pas un legs des parents mais un prêt des enfants ?

République et lien social, citoyenneté et intérêt général, bien public et solidarité, respect et État de droit…, c’est cela que réclament avec force les «indignés» d’Algérie qui, très certainement, se posent la question de savoir s’il y a plus de raisons de rester ensemble que de se quitter ; question simple et terrible à la fois qui interroge le vivre-ensemble et le projet commun sans lequel aucune construction commune n’est possible, aucun avenir commun concevable. Ceux qui choisissent d’«être mangés par les poissons plutôt que par les vers» sont une épouvantable illustration de ce qui précède.

Monsieur le Président, répondre de façon aussi misérablement politicienne à une exigence de bouleversement social qui place l’homme au centre de toute préoccupation est une faute grave au regard des conséquences incommensurables qu’elle génère.

Chacun, dans ce pays, peut observer les multiples colères qui, partout dans ce pays, s’expriment pour dire le refus d’une mauvaise vie sans cesse plus étouffante, d’un système éducatif sans projet autre que la reproduction à l’identique de tout ce qui existe, d’une politique sanitaire qui conduit au matraquage des médecins protestataires, d’une politique judiciaire à laquelle nul Algérien n’accorde le moindre crédit, d’une politique de l’information totalement cadenassée…C’est, évidemment, autres choses dont nous avons besoin aujourd’hui et certainement pas d’une simple réforme de la Constitution — engagée par le système pour sa perpétuation —dont nous savons le peu de signification accordé par ceux-là mêmes qui en sont les gardiens ; il apparaît que c’est, d’abord, le respect de celle-ci qui aurait pu être la condition minimale pour donner crédit à la démarche dont vous avez la charge. En effet, pourquoi réformer une Constitution qui organise le maintien de ceux qui, bardés de certitudes, ont pour attitude son viol permanent et impuni ? Que signifie cette préoccupation devenue majeure des droits de la femme alors que l’égalité entre citoyens est un principe fondateur violé par un code de la famille inconstitutionnel et, peut-être, le plus archaïque du monde ?

Qu’est-ce que cette préoccupation soudaine relative à la société civile et au droit associatif exprimée par ceux là-mêmes qui ont formaté une société anémiée devenue étrangère à tout sens du débat ?

Comment les mêmes peuvent-ils faire une chose et son contraire ?

Comment être à l’écoute d’un des peuples les plus jeunes du monde, d’une jeunesse magnifique et désespérée quand, très précisément, tout a été fait pour la désespérer, lui interdire toute perspective autre que la fuite, l’immolation ou la servitude. Il reste, cependant, que les colères éparpillées peuvent aussi se rencontrer et fédérer leurs énergies — l’histoire la plus récente de nos voisins immédiats le prouve amplement — mais cela suppose, bien sûr, la traduction politique de la colère.

Monsieur le Président, croyez bien que je mesure l’immensité — et l’incongruité surtout — de la mission qui vous a été confiée dans la mesure où le résultat assigné est, très précisément, la perpétuation d’une situation caractérisée par la rupture, sans doute définitive, entre les jeunes gouvernés et les gouvernants grabataires.

Aucun changement ne peut être envisagé dans le système corrompu et autiste que subit le peuple depuis un demi-siècle ; il est temps de changer de système pour répondre à l’exigence de démocratie et de liberté hurlée par une population qui souhaite trouver plus de raisons de rester ensemble que de se quitter.

Veuillez croire, Monsieur le Président, en l’expression de mes sentiments citoyens.

Moncef Benouniche,
Citoyen démocrate.
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Houhou

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Date d'inscription : 24/05/2007

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MessageSujet: Re: Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika   Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika EmptyMar 7 Juin - 20:08

L'islamiste Djaballah a lui aussi, dans un pamphlet remarquable, décliné l'offre de donner suite à la convocation de Bensalah.

Pour lui, « Les réformes profondes nécessitent une large consultation qui prendra en compte l’avis de la majorité. Cela ne peut se concrétiser que dans le cadre d’une conférence nationale », a‑t‑il écrit.

Djaballh regrette « la non prise en compte de ses propositions adressées en mars dernier au président Bouteflika en vue d’organiser une conférence nationale pour consulter la majorité ».

Le fondateur d’El Islah a estimé que l’initiative du chef de l’État pour les réformes signifie que « tout appartient au pouvoir, du pouvoir aux partis en passant par les institutions ». « Aucune voix n’est au‑dessus du pouvoir. Les élites influentes sont au‑dessus des lois, de l’APN, de la justice, des partis et des institutions », a-t-il ajouté. « Vous vous occupez de l’image et de la forme, mais vous ignorez le fonds et l’avis de la majorité qui constitue la base d’un système démocratique », a‑t‑il encore souligné.

Djaballah conclue : « Les réformes profondes dans notre pays nécessitent la réforme des hommes, des lois et des politiques. Ces réformes ne pourront être menées que par des démocrates ».

avec TSA.



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Aharbal

Aharbal


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Date d'inscription : 27/05/2007

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MessageSujet: Re: Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika   Des voix bien discordantes à propos des réformettes empoisonnées de Bouteflika EmptyLun 20 Juin - 10:34

Ali Haroun, ancien ministre chargé des droits de l'homme dans le gouvernement d'Ali Kafi du H.C.E. (Haut comité d'État) mis en place au lendemain de l'assassinat de Mohamed Boudiaf, a répondu à son tour par écrit à l'invitation de la Commission Bensalah qui se proposait de l'entendre dans le cadre des consultations engagées autour des "réformettes" de Bouteflika.
Voici sa correspondance, telle que publiée par le journal Le Soir d'Algérie.
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Le Soir d'Algérie - 20.06.2011

Monsieur le Président,
Messieurs les membres de la commission,

Vous m’avez fait le grand honneur de m’inviter à vous fournir mon opinion sur le projet de réformes politiques annoncées par monsieur le président de la république dans son discours du 15 avril 2011. Je vous en remercie et y suis d’autant plus sensible, qu’en conscience j’ai toujours cru indispensable de répondre à l’appel de la patrie ou à l’invitation du pouvoir politique. Lorsque ma modeste contribution pouvait présenter une quelconque utilité. Je me devais aussi de vous répondre par déférence envers votre instance et certains de ses membres, dont la droiture, le patriotisme et la défense de l’État de droit ont été les axes de leur conduite.

Toutefois, je me sens troublé sur le sens de la démarche proposée car, je m’interroge sur la façon de procéder retenue pour ces consultations. Je m’inquiète aussi de la méthode qui détermine sélectivement les personnalités consultées, en occultant les jeunes réellement représentatifs, seuls susceptibles de vous éclairer sur leurs visions et leur espoir de mettre fin à l’exclusion et la malvie, dont ils souffrent depuis des décennies. De plus, la manière de mener le dialogue, l’acceptation finale des propositions et l’éventualité de les soumettre à un parlement, dont on finit par reconnaître la déficience en représentativité et sa totale obédience à l’Exécutif, laissent nombre de citoyens se demander, si ces consultations politiques n’ont pas pour unique finalité de convaincre la communauté internationale d’une réelle avancée démocratique. C’est pourquoi j’estime que ma présence devant vous ne créditerait pas davantage la démarche.

Quoi qu’il en soit, si le chef de l’État, président de la république, et premier magistrat, prescrit des “réformes politiques cruciales et déterminantes” pour l’avenir, l’on en déduit implicitement qu’il cherche à remédier aux maux dont souffre le pays. Or, l’on ne peut prescrire de médication efficace qu’après un examen objectif et approfondi. Un demi-siècle s’est écoulé depuis sa naissance, et jusqu’à ce jour l’Algérie est malade de ses rapports entre le peuple et le pouvoir, le gouverné et ses gouvernants, l’administration et ses administrés. Il n’y a pas lieu certes de remonter le cours de l’histoire, ni de rappeler à une Algérie adulte ses maladies infantiles de l’indépendance.
Cependant, depuis 1962, un fil conducteur relie tous les dysfonctionnements qui entravent notre évolution vers un État de droit. Il faut absolument l’identifier pour l’interrompre, si l’on veut vivre sur la base d’un réel consensus émanant de la volonté nationale et non d’un scrutin manipulé, comme il l’a été par les pouvoirs successifs qui ont géré le pays.

Les réformes politiques projetées auraient pour but de remédier aux insuffisances de la Constitution et des lois organiques. Or, si la loi fondamentale et les textes subséquents avaient été librement discutés, régulièrement votés, puis loyalement appliqués, les réformes ne s'imposaient guère.

L’on sait que les lois ne valent que par les hommes qui les appliquent et celles qui nous régissent n’ont été, ni élaborées par un législateur crédible, ni loyalement appliquées, mais au contraire, souvent dévoyées et parfois trahies.

Ces considérations exposées, quels sont les maux, et quels seraient les remèdes ?

1 - La Constitution :

a) La première, celle de septembre 1963 ne fut ni rédigée par l'Assemblée constituante, ni librement discutée. Après avoir investi une “commission de rédaction du projet de Constitution”, l'Assemblée désignée dans sa grande majorité par le chef de l'État fut poussée à perdre un temps précieux en discussions byzantines, pour permettre à notre premier président de la République de faire adopter dans un cinéma de la ville (sic) un projet de Constitution que, bien entendu, une Assemblée aux ordres allait entériner. Telle fut la première Constitution qui devait régir l'Algérie. Pour l'honneur du pays, une vingtaine de députés osèrent se prononcer publiquement “contre”, dénonçant ce “costume sur mesure” taillé pour faire du chef d'État un despote, par l’adhésion d'une prétendue majorité des “représentants de la volonté nationale”. Texte apparemment légal dans sa forme, mais totalement contraire à cette volonté nationale bâillonnée, il ne dura que 21 mois. Après quoi, les plus fidèles soutiens du Président et partisans du “oui” à la Constitution, allaient le destituer et l’emprisonner, sous l’accusation de “tyrannie”. La justification de la destitution devait être fournie par un “Livre blanc” dont on promettait la publication imminente. Ce livre n’a jamais paru et le Président demeura emprisonné sans jugement pendant 14 années.

b) Suite au 19 juin 1965, le second chef d'État limoge l'Assemblée nationale et renvoie les députés dans leur foyer. Après suspension de la Constitution, il allait pendant une dizaine d'années gérer le pays par ordonnances, un Conseil de la Révolution nommé par lui et “épuré” par lui, constituait un organe de façade, incapable de discuter et encore moins de s’opposer à la volonté du chef.

c) La Constitution de novembre 1978

Inspirée de la Charte du 27 juin 1976, établie par le parti unique sous le contrôle vigilant et sourcilleux du chef de l'État, la Constitution qui optait pour un socialisme “irréversible” — pour ne pas commettre l'hérésie de le déclarer éternel — fut votée le 19 novembre 1976 au score de 99,18% des voix. Et dans la foulée, le chef du Conseil de la Révolution se faisait élire président de la République, le 11 décembre 1976, avec 99,38% des voix.

Nous verrons plus loin comment qualifier ces scrutins manifestement fallacieux.

d) La Constitution de novembre 1989.

Intervenant après les révoltes d'octobre 1988, elle allait abroger l'option irréversible du socialisme, proclamé par la Constitution précédente, mettre un terme au parti unique et ouvrir les perspectives tant attendues du pluralisme politique qui, en réalité, s’avéra être un leurre.

e) La Constitution de décembre 1996.

Confirmant les timides avancées démocratiques, elle a eu le mérite remarquable de mettre un terme au pouvoir à vie du président de la République et d’instaurer l'alternance en limitant à deux le nombre de mandats présidentiels. Faisant exception à toutes les insuffisances et critiques adressées à nos pratiques électorales, il est à noter que le principe de l'alternance, ainsi que la condamnation de l’accès ou du maintien au pouvoir par la violence, avaient été proclamés lors des discussions de l’été 1993 et respectés par le Haut-Comité d'État à la fin de sa mission.

C’est dans la paix et la sérénité que pour la première fois le pouvoir fut transmis par le HCE au président Zeroual comme, en 1999, il l'a lui-même retransmis au président Bouteflika.

f) L'amendement de la Constitution du 12 novembre 2008.

À cette date, les deux chambres réunies en Parlement sont invitées à voter certains amendements, dont l'essentiel était l'abrogation de l'article 74 de la Constitution, les autres ne constituant que l'habillage accessoire pour faire passer le principal, c'est-à-dire la présidence à vie du chef de l'État alors en exercice. La proposition avancée par les trois leaders de l'Alliance présidentielle n'aurait pu se faire sans l'accord évident du futur candidat, tandis que l'acceptation fut donnée à main levée, et sans discussion, par l’ensemble des parlementaires.

Ce ralliement, offert sans un seul geste même symbolique de refus pour témoigner du désir de préserver la démocratie, aura été ressenti par beaucoup d’Algériens, comme une atteinte profonde à leur dignité d’hommes, de patriotes, de citoyens, et d'autres l’ont éprouvé comme un viol de la Constitution.

Heureusement, sous la rafale de liberté démocratique balayant nos contrées, ceux-là mêmes qui étaient les promoteurs du mandat permanent renient, aujourd'hui, ce à quoi hier, encore, ils avaient applaudi.

Ainsi depuis l’Indépendance, nos Constitutions ont subi, injures et dévoiements, si ce n’est violations et outrages.

2 - L’expression de la volonté populaire dans le système qui nous régit

Comme nous l'avons vu, les scores dans notre pays ne traduisent guère la réalité du scrutin, les relations État-citoyen étant dès 1962 des rapports de force et non de droit. Le pouvoir, qui par le biais de l'administration dirige en fait l'opération électorale, a d’abord fait usage de la violence d’État dont il dispose normalement.

Il faut rappeler que l’expression initiale de la puissance publique n’a pu germer qu'après le cessez-le-feu intervenu le 4 septembre 1962, non entre Algériens-combattants et Français-occupants, comme le 19 mars, mais entre Algériens eux-mêmes opposés dans un combat fratricide.

Aussi les vainqueurs n’ayant pas su dominer leur victoire, ils ont établi leur pouvoir sur les lauriers de leur succès. En définitive le pouvoir s’est imposé par la force des armes, ce que l’on oublie aujourd'hui après cinquante années d’indépendance. Cette violence suscitait l’inhibition, et parfois la peur du peuple qui, pour préserver sa tranquillité, s’inclinait sous le joug du pouvoir et la crainte de ses services de sécurité.

Lorsque le prétendant au poste suprême était seul candidat et le résultat acquis d'avance, aucune violence n'était nécessaire, sauf qu'on avait tout le loisir de bourrer les urnes ou plus simplement en triturer les résultats, pour montrer combien l'heureux élu était adulé par ses électeurs. Par la suite, avec l'accès au pluralisme, il demeurait encore entre les mains de l’administration-pouvoir, la possibilité de manipuler les scrutins, pour distribuer les sièges promis à ses affidés.

Il ne s’agit pas ici de critiques gratuites ou injustes, d’amertume ou de dépit.

Car comment croire que notre premier président de la République ait été élu avec 99,61% de voix favorables, le deuxième avec 99,38% et le troisième avec 98,95% lors du 1er mandat, 95,30% lors du 2e et 98,91% lors du 3e ?

Ces scores staliniens n'ont jamais rien traduit d'autre, que le résultat de l'indifférence, la résignation ou la peur, face au magouillage du pouvoir tout puissant. Ils n'ont certainement pu exprimer la réelle opinion de l'électeur trahi par cette évidente manipulation. Au-delà des campagnes présidentielles, ce mode opératoire fut également pratiqué lors des élections législatives et locales où le système des “quotas” a permis aux manipulateurs, de répartir les sièges à leur convenance au mépris de la volonté de l'électorat.

Aussi de telles pratiques néfastes sont-elles à exclure définitivement de nos mœurs électorales ?

3 – L’article 2 de la Constitution et son interprétation ambiguë :

Abrités derrière l’article « l’Islam religion de l’État », certains, par une interprétation dogmatique littérale et sectaire, ont pu exploiter la religion commune du peuple à des fins politiques exclusives, dans le but avoué d’accéder au pouvoir, pour substituer à la République «impie» l’État théocratique de leur choix.

Ainsi, les partisans de cette distorsion de l’article 2 ont été à l’origine de l’une des plus noires périodes de notre Histoire, et le terrorisme de la « décennie rouge» qui entraîna la mort de dizaines de milliers de nos compatriotes et des ravages incalculables, traîne encore des «effets résiduels» qui n’en finissent pas de finir, tout en provoquant quotidiennement au sein de notre armée et nos services de sécurité d’incessantes pertes en vies humaines.

Aussi, une interprétation claire de l’article 2 ainsi que sa traduction incontournable par la Loi fondamentale, doivent-elles affirmer le caractère intangible de l’État républicain et démocratique, mettant le pays à l’abri de toute résurgence d’un extrémisme destructeur.

Dans certaines démocraties, le droit à l’insurrection contre la tyrannie est reconnu dans la Constitution. Il importe donc que la nôtre inscrive dans son préambule le droit imprescriptible de s’opposer par tout moyen à l’intégrisme matrice du terrorisme dévastateur.

À cette fin, tout parti qui entend inclure dans son programme, de quelque manière que ce soit, l’utilisation de la religion, ne saurait prétendre aux autorisations légales pour participer à la vie politique.

La tolérance, vertu éminemment musulmane, semble disparaître de nos mœurs. Alors que notre première Assemblée nationale comptait 16 députés «français d’Algérie», dont l’abbé Berenguer qui durant la guerre fut le plus efficace des porte-parole du FLN en Amérique latine, aujourd’hui le mépris des dispositions de la Constitution — en particulier celle de l’article 36 déclarant la liberté de conscience et d’opinion inviolable — entraîne devant les tribunaux des citoyens accusés de détenir les livres de leur confession religieuse.

Ce sont de telles méconnaissances de notre Loi fondamentale qui situent l’Algérie parmi les pays peu respectueux de la Convention universelle des droits de l’Homme.

4 - L’unité et l’indivisibilité du peuple :

Depuis des temps immémoriaux, des hommes ont peuplé le territoire de notre pays. Ce sont les paléo-berbères dont l’histoire a retenu le nom et dont nous sommes les descendants. Que la souche initiale ait été enrichie, que la civilisation ait progressé par des efforts suivis et des enrichissements successifs, que l’Islam ait pénétré le cœur de nos populations avec le véhicule de la langue arabe…, tous ces facteurs ont contribué à forger l’unité multi-face du peuple algérien.

Et c’est cette indivisible unité que la Loi fondamentale doit préserver comme gage de notre personnalité éternelle. Il appartient à la Constitution de l’assurer non seulement comme affirmation de principe dans son préambule, mais encore dans ses articles en veillant à son application dans les faits. C’est pourquoi l’amazighité constituant l’un des trois fondements de notre personnalité tamazight doit trouver auprès de l’arabe le statut qui lui convient de langue nationale et officielle.

Avec le développement de relations internationales, pour des raisons économiques, sociales ou culturelles, récentes ou lointaines, du fait depuis ces dernières décennies du sous-développement que l’Algérie n’a pu transcender, une partie non négligeable du peuple vit désormais à l’étranger.

Cette émigration ou plutôt diaspora constitue une force intellectuelle, artistique ou financière remarquable, qui n’a pas au fond du cœur rompu le cordon ombilical avec la mère patrie. Nos lois ne devraient pas l’ignorer, car elle ne l’a pas fait quoi qu’on en dise.

Une autre partie, la plus importante de la population, est la jeunesse. Désespérée depuis quelques années au point de préférer se voir «manger par la mer que dévorer par les vers», elle demeure tout de même confiante dans la vie, capable d’efforts renouvelés, compétente comme elle le prouve hors de nos frontières.

Il est regrettable que ses représentants réels, capables de s’exprimer en son nom, n’aient pas été jusqu’à ce jour entendus.

Enfin, la moitié de notre peuple a été progressivement réduite au silence. Alors que la première Assemblée nationale constituante comptait dans ses rangs sur moins de 180 députés 16 femmes, – toutes issues de la guerre d’indépendance –, leur nombre n’a cessé de décroître dans les assemblées suivantes, dénotant ainsi le mépris dans lequel les pouvoirs successifs les ont reléguées, jusqu’à en faire des mineures éternelles, par le Code de la famille en vigueur.

5 – La place de l’Armée dans la République :

Notre armée, comme son nom l’indique, est nationale et populaire. En ce sens, elle est constituée par les enfants du peuple émanant de toutes les couches de la nation. A ce titre, il n’y aurait pas lieu de craindre la voir utiliser les armes confiées par la Nation contre le pouvoir politique émanant de cette même Nation.

Mais l’histoire en général comme la nôtre en particulier, rappelle que parfois le détenteur de la force armée s’empare du destin du peuple au mépris et parfois contre l’opinion populaire. Cependant, corps discipliné par essence, l’Armée est aux ordres de ses chefs et c’est leur ambition qui, quelquefois, l’entraîne à transgresser sa mission naturelle. Il faut objectivement le reconnaître, l’Algérie indépendante est née dans la douleur. Sans doute, l’état-major de l’armée de 1962, titulaire du pouvoir de fait, — derrière le paravent d’un leader politique dont l’aura plus supposée que réelle se dissipera quelques mois plus tard –, s’est-il saisi du pouvoir par la violence.

Cette accession aux commandes supérieures de l’État allait promouvoir la primauté des militaires dans tous les domaines de la vie quotidienne. Le peuple supportait péniblement ces privilèges et parfois douloureusement le comportement de certains officiers supérieurs.

Ce qui, pendant longtemps, justifia sa réserve à l’égard de l’Armée. Mais celle-ci, totalement désengagée de l’action politique après 1988, concevait désormais son rôle dans les bornes de sa mission de défense de la République, de l’intégrité du territoire et dans les limites définies par la Constitution.

C’est précisément dans ce cadre que l’Armée a réagi en janvier 1992 conformément à l’option de ses supérieurs, préservant ainsi la démocratie menacée de se voir supplantée par une « chouracratie » d’un autre âge. Aujourd’hui et dans la mesure où la démocratie serait solidement instaurée, il ne paraîtrait pas nécessaire de confier à l’Armée la mission de garantir les institutions.

Ce devoir incombe tout naturellement au Président de la République, qui tient son pouvoir irréfragable d’une élection dans la transparence, la sérénité et le respect du pluralisme politique.

Soutenir la thèse contraire, serait craindre la suprématie d’un parti antirépublicain, qui par hypothèse ne devrait guère participer à la vie politique, dès lors que l’option républicaine démocratique irréversible aura été solennellement affirmée dans une Constitution émanant de la volonté nationale.

Les maux qui depuis 1962 altèrent la santé du pays ayant été rapportés, franchement et sans acrimonie, il est à espérer que ce diagnostic sans complaisance mais sans excès justifie la thérapeutique qui s’impose. Elle pourrait se résumer en quelques points :

1. Déclarer solennellement l’adhésion irréversible et inaliénable de l’Algérie aux principes fondamentaux de la République, c’est-à-dire la Démocratie, la Liberté, l’Égalité des citoyens et le respect des Droits de l’Homme.

2. Prendre les mesures adéquates pour interdire formellement toute manipulation des scrutins électoraux, cause des malheurs du peuple et respecter la volonté nationale, seule source de l’autorité légitime.

3. Prononcer la dissolution du Parlement dont on reconnaît que l’élection n’a été ni sincère, ni transparente, ni crédible.

4. Élire dans un délai maximum de 6 mois une nouvelle Assemblée chargée de procéder aux amendements proposés à la Commission de consultation en vue des réformes politiques, veillant particulièrement à assurer l’équilibre des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, ainsi que la liberté d’expression et d’information dans le cadre du respect des lois.

5. Permettre sans délai à tous les partis, y compris ceux en attente d’agrément, de préparer leur programme et le faire connaître aux électeurs, sous réserve qu’ils s’interdisent l’utilisation, quel qu’en soit le mode, de la religion à des fins politiques.

6. Permettre toute manifestation pacifique d’opinion par l’ouverture du champ médiatique et l’autorisation de tout moyen d’expression, tels les meetings, réunions, marches ou autres, sans exclusive concernant telle région ou ville du pays.

7. Assurer pendant cette période, la primauté de la Force du Droit sur celle du Droit de la Force, dont le pouvoir a souvent fait usage, de façon à édifier l’État de droit auquel le peuple aspire.

8. Pendant ce délai, le Président gère la période transitoire par voie d’ordonnances.

Messieurs les membres de la Commission,

J’ignore quel sera en définitive le sort réservé à ces propositions, par le Président de la République décideur final, mais il est à craindre encore une fois qu’elles soient poliment enregistrées mais concrètement ignorées entraînant de nouvelles déceptions. Pour notre part, nous avons été constamment à l’écoute du pays, surtout dans les moments de crise grave, sans autre ambition que celle de le servir et le défendre.

Aujourd’hui devant la tempête qui secoue le monde arabe et dont les retombées ne manqueront pas de nous atteindre, il est vital pour la sécurité, la paix, l’unité et la pérennité de notre pays, qu’il soit mis fin à la manière dont il a été géré depuis son accession à l’indépendance, pour consolider l’État républicain, assurer le progrès et consacrer la Démocratie.
Ali Haroun




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