Une revendication des ONG tombe à point pour demander un contrôle plus rigoureux des armes vendues à destination des pays où la révolte gronde, et plus largement partout où les chefs d'État se conduisent en dictateurs s'estimant suffisamment forts, grâce aux armes achetées sur le dos du contribuable, pour imposer leur volonté et faire barrage à toute notion de démocratie et de droits de l'homme. Qu'ils soient monarques ou présidents, ces tyrans doivent comprendre une fois pour toutes qu'ils ne doivent régner qu'avec l'assentiment du peuple et sous son contrôle.
Le journal Le Monde a publié un article fort instructif dans ce sens. Le voici.
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LEMONDE.FR avec AFP | 05.04.11 | 15h39
Face à la multiplication des conflits armés au Moyen-Orient, des ONG tirent la sonnette d'alarme sur les exportations d'armes : trois ONG ont réclamé mardi 5 avril un meilleur contrôle du parcours des armes vendues à l'étranger par la France. Les députés doivent entamer ce mardi l'examen du projet de loi sur le contrôle des exportations et importations d'armes conventionnelles, en vue d'un vote le 12 avril.
Pour Amnesty International France, le CCFD-Terre Solidaire et Oxfam France, "les députés ont le devoir de s'assurer que la loi française contienne des dispositions contraignantes pour éviter que des armes françaises ne soient vendues lorsqu'il y a un risque qu'elles participent à des violations des droits humains, du droit international humanitaire, ou entravent le développement économique et social des populations".
"LA DONNE A CHANGÉ"
Les trois ONG réclament ainsi un contrôle renforcé de "l'utilisation finale et de l'utilisateur final" des armes et matériels achetés, parfois réexportés vers des pays politiquement "fragiles". C'est d'autant plus nécessaire que "la donne a fondamentalement changé : les clients traditionnels de la France, les régimes du Maghreb et du Moyen-Orient, ne peuvent plus être qualifiés de stables", a estimé Nicolas Verken, d'Oxfam France, lors d'un point presse. Si la France "exige des pays importateurs la délivrance de certificats de réexportation", cela reste insuffisant, a souligné Zoheb Behalal, du CCFD.
Les ONG disent avoir recensé des cas de détournement de l'usage du matériel exporté pour lequel il avait été vendu en Israël, au Tchad, au Pakistan. Sur le terrain de la transparence, "l'opinion publique doit savoir régulièrement ce qui a été exporté et ce qu'on a interdit d'exporter", a exigé Nicolas Verken. Selon lui, l'argument selon lequel la publication précise et "lisible" de telles informations pourrait favoriser les concurrents de l'industrie de l'armement française ne tient pas, car "le Royaume-Uni, premier exportateur d'armes", publie régulièrement la liste des licences d'exportations accordées et refusées.
DES RISQUES MAL ÉVALUÉS
Ces déclarations interviennent au moment même où les députés britanniques publient un rapport soulignant que "le gouvernement actuel, tout comme son prédécesseur, ont mal évalué le risque que les armes autorisées à l'exportation vers certains pays en Afrique du Nord et au Moyen-Orient puissent être utilisés dans la répression au sein de ces pays", écrit la Commission de la chambre des communes sur le contrôle des exportations d'armes.
La Commission se félicite que 156 licences d'exportation ont été annulées depuis les soulèvements en Libye, Bahreïn, Égypte et Tunisie. Mais le nombre de ces révocations "montre à quel point la politique en la matière a été mal évaluée", estime le président de la Commission, John Stanley. "Le gouvernement doit dire comment il compte réconcilier le conflit potentiel d'intérêts entre l'accent de plus en plus souvent mis sur la promotion de l'exportation d'armes et sa défense fervente des droits de l'homme", ajoute le rapport.
La Commission cite en particulier des licences qui avaient été accordées l'an dernier pour des exportations vers la Libye de munitions pour des armes légères, des armes anti-émeutes ainsi que des gaz lacrymogènes. Des gilets pare-balles et des jumelles infra-rouge ont été exportées vers le Yémen, des munitions pour armes légères vers la Syrie, des fusils à lunettes vers l'Arabie saoudite, selon le rapport.