TSA - 11.03.2011
Par Samir Allam
Sonatrach face à deux procédures d’arbitrage
Pour Sonatrach, l’héritage de la période Khelil s’annonce plus désastreux que prévu. Au‑delà des problèmes de corruption et de dysfonctionnements internes, le nouveau management de la société nationale des hydrocarbures doit gérer des litiges difficiles avec ses partenaires étrangers. Le groupe américain Anadarko a déjà lancé une procédure d’arbitrage et le danois AP Moller‑Maersk lui a emboîté le pas.
Le conflit opposant Sonatrach à Anadarko pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la compagnie algérienne. L'audience d'arbitrage qui doit déterminer si la plainte d'Anadarko est recevable aura lieu en juin prochain.
Dans son édition de ce vendredi 11 mars, le Financial Times affirme qu’Anadarko réclame 3 milliards de dollars à Sonatrach. La valeur des actifs algériens d’Anadarko a chuté de 8 milliards de dollars, passant de 10 à 2 milliards, suite à l’instauration de la nouvelle taxe, selon la même source.
Le groupe américain est confiant concernant l’issue de l’arbitrage. Mais il redoute que Sonatrach refuse de payer. Des craintes également exprimées par les diplomates américains en poste à Alger, et révélées par WkiLeaks. Dans un câble daté de février 2010, David Pearce, ambassadeur américain à Alger, exprimait clairement ses craintes de voir Sonatrach refuser de payer en cas d’arbitrage favorable à Anadarko. Dans ce contexte, selon le Financial Times, Anadarko envisage de saisir des avoirs de Sonatrach à l’étranger.
En fait, selon nos informations, le management de Sonatrach est également conscient qu’il n’aborde pas l’arbitrage en position favorable. Fin 2010, la direction du groupe algérien avait entamé des négociations pour un arrangement amiable avec Anadarko. Le groupe américain, l’un des principaux investisseurs étrangers en Algérie, était favorable à un arrangement. Mais les négociations ont échoué suite à des interférences politiques algériennes.
L'origine du conflit remonte au vote par l'APN en juillet 2006 de la loi instaurant une taxe exceptionnelle sur les superprofits réalisés par les sociétés étrangères activant dans le domaine des hydrocarbures. Cette taxe prévoit d'imposer entre 5 et 50 % sur la valeur de la production quotidienne moyenne pendant chaque mois durant lequel le prix du baril de brut dépasse les 30 dollars.
Depuis 2006, les deux sociétés, associées dans l'exploitation de gisements d'hydrocarbures dans le Sud algérien, sont en désaccord sur le paiement de la taxe sur les superprofits.
Anadarko pensait que le contrat de partenariat scellé avec Sonatrach lui procurait une certaine stabilité fiscale. Selon le groupe américain, ce contrat indique que c'est à Sonatrach de payer cette nouvelle taxe. Ce que le groupe algérien a refusé de faire. Une procédure de conciliation a été mise en place en octobre 2007 mais elle n'a pas abouti. Et en février 2009, Anadarko avait alors amorcé une procédure d'arbitrage contre Sonatrach, comme le prévoit le contrat de partenariat entre les deux sociétés.
Anadarko est présente en Algérie depuis 1989. Elle active dans le cadre d'un partenariat avec Sonatrach et deux autres partenaires : AP Moller‑Maersk et l’italien ENI. Anadarko affirme vouloir poursuivre ses activités en Algérie, malgré ce litige avec Sonatrach. Mais selon un analyste financier cité par Finacial Times, le groupe américain devrait vendre ses actifs « bientôt ».