La résiliation en question du contrat Sonatrach/Repsol et Gas natural

Rien ne va plus, entre l’Algérie et l’Espagne, depuis l’annonce de la résiliation du contrat gazier algéro-espagnol, annoncée en grande pompe par Sonatrach.

De part et d’autre, les rapports se tendent désormais au point de rechercher, d’un côté comme de l’autre, des dédommagements en compensation.

Considérant que le retard de plus de deux années pris par ses partenaires Repsol et Gas natural porte un gros préjudice à l’exploitation future du gisement de gaz en jeu, Sonatrach entend les poursuivre pour des dommages et intérêts, par simple application des clauses contractuelles.

Les sociétés espagnoles, estimant, elles, avoir été indûment chassées d’un partenariat non seulement juteux mais fortement recherché par leur pays pour son caractère hautement stratégique - l’Europe entière étant plus que préoccupée par la fourniture aléatoire du gaz russe -, tentent désespérément de s’accrocher à leur droit de reprendre leur place aux côtés de Sonatrach, et se préparent à enclencher une procédure d’arbitrage international pour se faire reconnaître, elles aussi, des dédommagements.

Les tribunaux seuls, s’ils devaient effectivement examiner le dossier dans le fond, pourraient, bien sûr, nous révéler l’exacte vérité des manquements éventuels de l’une ou de l’autre partie au contrat. Mais, en attendant, il est fort à craindre, d’ici là, qu’un tel différend déteigne sur l’ensemble des relations commerciales, pourtant bénéfiques et louables, que les deux pays entretiennent depuis déjà de longues décennies.

Il faut espérer, enfin, que la volte-face de Sonatrach, si tel est évidemment le cas, ne tienne pas son origine du changement de cap intervenu il y a plus d'an, à l’occasion de la révision de la politique pétrolière. Dans le cas contraire, avoir attribué aux Espagnols, dans le cadre de cette politique avant sa révision, une participation de 80 % dans l’exploitation du gisement de Gassi Touil aura été l’une des plus grosses bourdes à ajouter aux dérives d’un ministre de l’Energie, dont le peuple algérien commence à évaluer les conséquences, à l’exemple de l'énorme gâchis de BRC.

L’autre hypothèse, saisie au vol par l’Agence marocaine de presse, prétendrait, à en croire les journaux espagnols El Mundo et ABC parus aujourd’hui, que l’Algérie aurait agi ainsi en représailles contre le soutien du gouvernement espagnol à la proposition marocaine d’autonomie du Sahara.

Rien, ni dans les déclarations officielles d’Alger, ni dans la presse publique, ni même dans la presse privée ne semble pourtant accréditer la thèse que le gouvernement algérien ait montré quelque agacement par suite de la position officielle espagnole, à propos du Sahara occidental, si tant est qu’elle soutient formellement la proposition marocaine.

Aussi, faut-il s’attendre à ce que la presse marocaine exploite en bloc ce différend algéro-espagnol pour tenter de peser encore sur l’opinion, afin de nourrir l’espoir que le projet d’autonomie avancé demeure l’unique solution au problème du Sahara occidental.

Le politique espagnol Cezar Vidal considère, lui, que la décision prise par l’Algérie est « strictement politique » et que le gouvernement espagnol paie ainsi ses « bévues » sur la scène internationale.

« L’Espagne a traditionnellement mené une politique équilibrée dans la région du Maghreb, malgré des relations difficiles avec le Maroc et l’Algérie ; cela permettait d’entretenir des relations de bon voisinage avec l’ensemble des pays de la région, et notamment des contrats fructueux », a indiqué le commentateur espagnol, avant d’ajouter :

« Ces dernières années, cet équilibre a été rompu, suite au changement de cap pris par le gouvernement socialiste qui s’est orienté vers un rapprochement unilatéral avec Rabat ; d’où le mécontentement de nos partenaires algériens ».

Intervenant dans un point de presse, hier à Alger, Chakib Khelil, ministre algérien de l’Energie, a démenti les allégations de la presse internationale qui ont prêté à Sonatrach l’intention de prendre des participations dans l’entreprise espagnole CEPSA. Il n’y a pas eu d’offre d’achat à ce sujet, a précisé le ministre.

Revenant sur l’affaire de Repsol, ce dernier a considéré que « la résiliation du contrat n’a pas été décidée du jour au lendemain et n’ a pas été prise à l’improviste ou à la légère », avant d’ajouter que « Ce n’est qu’après avoir épuisé toutes les possibilités que Sonatrach a pris la décision d’aller à l’arbitrage international ».

S’agissant de l’éventuelle substitution de Repsol par GDF invoquée ici ou là par les médias, Khelil s’est montré catégorique : « Sonatrach va prendre les opérations en main et n’a pas de partenaire et n’en prendra pas dans ce projet ».

Se voulant rassurant, enfin, à propos des relations algéro-espagnoles, le ministre a affirmé : « Il n’y aura aucun effet négatif sur les entreprises étrangères. Les entreprises espagnoles vont continuer à travailler en Algérie, notamment dans la prospection, et nous ferons de même en Espagne ».