Tokyo sur la corde raide

Son différend à propos d'îles dont il dispute la propriété avec Pékin n'étant pas encore résolu, Tokyo s'embarque dans un autre qui semble prendre toutes les allures d'une crise majeure avec Moscou

L'incident est né de la visite rendue lundi par le président Medvedev à Kunashir, l'une des quatre îles des Kouriles, butin de la Seconde Guerre mondiale de Moscou que les Russes administrent depuis lors mais que les Japonais réclament et à cause desquelles le traité de paix entre les deux pays n'est à ce jour pas encore signé.

Medvedev y a passé une courte visite de 4 heures, qui a immédiatement mis le feu aux poudres du côté nippon, où l'on dénie toujours à Moscou la propriété de ces îles confisquées 3 jours après la capitulation du Japon en août 1945.

Certes, du temps d'Elstine, il avait été question un moment de les restituer au Japon, mais c'était sans compter avec la détermination des nationalistes et des communistes qui connaissaient l'énorme prix payé pour avoir raison de Berlin et de Tokyo lors du dernier conflit mondial. Plus près de nous encore, Poutine avait songé à restituer deux de ces îles sous condition, mais la proposition a été rejetée aussitôt par Tokyo. Depuis l'avènement de Medvedev, enfin, les Japonais espéraient qu'ils parviendraient à un arrangement avec lui, mais cela demeurait un simple vœu pieux.

Aussi, la surprise de Moscou devant le rappel, dès hier, de l'ambassadeur nippon accrédité chez lui est-elle à son comble : « La réaction de la partie japonaise sur le voyage du président Medvedev aux Kouriles est inacceptable. C'est notre terre, et le président russe s'est rendu sur une terre russe », a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.

Du côté japonais où les médias tirent à boulets rouges sur le gouvernement du centre gauche accusé d'avoir déjà traité avec mollesse le différend survenu en septembre dernier sur les îles disputées à la Chine, des sentiments patriotards s'éveillent pour tenter de peser davantage encore sur le pouvoir en place pris désormais en sandwich, entre Pékin et Moscou.