Karzaï renvoie à leurs foyers les sociétés de mercenaires

Plus de 40 000 mercenaires sont actuellement employés dans la sécurité des personnes et des bâtiments abritant certains services civils de la coalition ou des ambassades, des institutions internationales installées en Afghanistan pour y apporter leur aide ou leur assistance.

Karzaï, échaudé par les débordements criminels de ces sociétés de mercenaires, comme Blackwatter, initialement installées en Irak par la clique Bush, entend prévenir tout dérapage. A ce titre, il vient de signer un décret mettant fin officiellement à l'existence de ces sociétés paramilitaires spécialisées dans le gardiennage, la protection des convois de ravitaillement, d'ambassades, d'organismes divers internationaux, etc. Dans un délai de 4 mois, ces sociétés doivent donc disparaître, et leurs effectifs libérés.

Karzaï compte ainsi récupérer l'essentiel de ces 40 000 mercenaires armés qui sont afghans. Il leur offre d'ores et déjà l'insertion dans les services de police ou de l'armée. Par contre, il ne sera plus délivré de visas aux autres, de nationalités étrangères, qui devront aussitôt restituer leurs armes ou les emporter en quittant le territoire. Toutes les armes qui seront donc trouvées en possession de sociétés illégales de mercenaires seront aussi confisquées, en vertu de ce décret.

Bien sûr, nombreux sont ceux au sein de la coalition qui trouvent la décision prématurée, estimant les forces officielles afghanes toujours incapables d'assurer elles-mêmes la sécurité dans le pays et moins encore pour se délester d'une partie de leurs effectifs pour remplir les missions dévolues jusqu'ici à ces sociétés de mercenaires.

Huit de ces sociétés de mercenaires sont désormais considérées comme dissoutes en Afghanistan, suite à la décision prise par Hamid Karzaï en août dernier de chasser toutes ces entreprises et d'attribuer leurs missions respectives à la police d'État.

"Le ministère de l'Intérieur nous a informés aujourd'hui de la dissolution de huit sociétés privées de sécurité", a déclaré au cours d'une conférence de presse tenue à la présidence afghane, son porte-parole, Waheed Omer.

"Le processus de dissolution de ces huit sociétés privées de sécurité et la collecte de leurs armes ont été menés à bien", a ajouté ce porte-parole.

Xe, l'ancienne société Blackwater, et White Eagle Security Services sont au nombre de ces sociétés de mercenaires assurant surtout la sécurité du personnel gouvernemental et d'ONG internationales.

Au total, d'après l'AFP, c'est quelques 52 entreprises de mercenaires de ce type qui exercent en Afghanistan avec un effectif estimé à 26 000 personnes.

Les assassinats de nombreux civils attribués à l'ex Blackwater en Irak faisaient planer de sérieuses craintes de leur renouvellement en Afghanistan, d'autant que l'armée américaine, connue pour ses propres excès, a toujours couvert effrontément les crimes gratuits de ces mercenaires devant les tribunaux américains.

Sous la pression de l'OTAN et des ambassades accréditées à Kaboul, le président Karzaï est revenu, du moins partiellement, sur sa décision d'interdire l'activité des sociétés de mercenaires en Afghanistan. Un communiqué en ce sens a même été rendu public aujourd'hui par la présidence, qui prend en considération : "les préoccupations exprimées par les forces de l'OTAN et les ambassades étrangères concernant la dissolution des sociétés privés".

Désormais, "les entreprises qui fournissent une protection aux ambassades, résidences diplomatiques, bases militaires et dépôts peuvent continuer leurs opérations dans ce cadre", indique ce communiqué.

Il semble que les milieux internationaux à Kaboul avaient trouvé la mesure initiale particulièrement trop hâtive. Aussi, les diplomates et certains personnels de l'OTAN envisageaient-ils de quitter la capitale afghane pour aller s'installer dans les pays voisins mieux sécurisés.

En revanche, les sociétés non concernées par la protection des bases militaires et des ambassades devront être dissoutes, selon les termes du communiqué qui précise : "Les autres sociétés privées de sécurité représentent une sérieuse menace pour la sécurité interne et la souveraineté nationale, et le processus de dissolution doit se poursuivre sans exception".

Pour rappel, 52 entreprises de mercenaires exercent actuellement en Afghanistan avec un effectif de quelques 26 000 personnes.

Pressé sans doute de rapporter sa décision d'interdire désormais les sociétés de mercenaires activant en Afghanistan, à l'exception de celles chargées de la protection des ambassades et des bases de l'OTAN, le président Karzaï s'est montré cette fois très ferme. "Le gouvernement afghan est résolu à dissoudre ces sociétés et souhaite une coopération sincère et réelle de la communauté internationale", a-t-il déclaré, lors d'une rencontre avec le représentant de l'ONU à Kaboul, Staffan de Mistura, le commandant des forces internationales, le général David Petraeus, le représentant civil de l'Otan, Mark Sedwill, et les ambassadeurs américain, allemand et britannique.

Les Américains qui semblent défendre le projet de mise en veilleuse de la décision de Kerzaï jusqu'à ce qu'une solution transitoire soit trouvée arguent pour se justifier de la prétendue protection de projets de développement à préserver en Afghanistan.

Ils sont loin apparemment de comprendre que le mal commis par ces sociétés de mercenaires qui agissent en marge des lois, surtout quand elles se sentent en pays conquis comme en Irak et en Afghanistan, est encore plus inacceptable que celui imputé à la soldatesque des coalisés.