Un billet, signé Aziz Farès, paru dans Le Soir d’Algérie, interpelle Ouyahia, l’ancien chef du gouvernement algérien, qui aurait osé cette sortie peu surprenante, en vérité, venant de lui : "Un caprice (l’ouverture du champ audiovisuel au privé) qui peut s’avérer dangereux pour la « sécurité nationale et la moralité » si l’on s’amuse à passer du jour au lendemain d’une télévision et une radio à 100 % publiques vers des chaînes à 100 % privées".
Le même billet dénie à juste titre ensuite à Ouyahia le droit de s’approprier le rôle de juger de la pertinence des messages que peuvent véhiculer ces médias audio ou télévisuels. Et il a parfaitement raison : les Algériens sont adultes et tout aussi responsables de leurs actes quand ils décident, et sans le moindre regret, de se brancher quasi unanimement sur les télés occidentales qui leur apportent bien plus en termes d’informations, de communication, de savoir, etc., plutôt que sur la Une nationale, toujours aussi débile et insipide que par le passé, puisse-t-elle au demeurant disposer d’un budget et d’un personnel dix fois plus important qu’aujourd’hui.
Ce que ne comprennent pas des gens bornés comme Ouyahia, car il n’est pas le seul hélas, c’est que ses compatriotes sont très nombreux à en savoir bien plus profondément et plus largement que lui dans les domaines à la fois moral, politique, social, culturel, scientifique, etc., et qu'ils ne ressentent nul besoin de confier leur progéniture à des écoles étrangères ; ce que lui, en revanche, avec son complexe de colonisé, ne s'empêche pas de faire. Ne se souvient-on donc pas de l'entrefilet paru il y a quelques années dans El-Watan qui indiquait que le fils Ouyahia passait son bac à Paris ?
Il est vrai que son mentor, qui trône, lui, à El-Mouradia, a cru devoir, de son côté et à une autre époque, en 1972/73, dénier à ses compatriotes le droit, du reste devenu inaliénable à l’échelle planétaire, de disposer d’assemblées élues. Devant un auditoire médusé, composé essentiellement d’étudiants assis autour du regretté Medeghri, alors ministre de l’Intérieur, qui concoctait au même moment les nouvelles lois portant création des A.P.C. et A.P.W., Bouteflika avait osé dire à peu près ceci : "Les Algériens n’ont pas encore atteint la maturité suffisante pour se faire représenter dans des assemblées élues…" Le malheureux avait tout simplement oublié que s’il y avait un peuple bien rodé, avant même son indépendance, au fonctionnement des assemblées élues et à leur rôle, c’étaient bien ses compatriotes qui avaient très tôt pris place à l’assemblée nationale française, parmi leurs collègues français.
Alors, cette rengaine d’Ouyahia et consorts n’indispose en réalité que des complexés de son espèce, les Algériens d’hier comme d’aujourd’hui mesurant à sa juste valeur tout l’intérêt qu’il y a d’ouvrir les médias, sans réserves, au privé, la solution de tous leurs déboires étant très certainement à trouver là et non dans ce cloisonnement médiéval qui constitue la faiblesse même des dictatures rétrogrades.