L’agent orange

La première visite d’Etat rendue par le Vietnam aux Etats-Unis, depuis de longues décennies, est bien celle d’aujourd’hui. Le président vietnamien est appelé à rencontrer son homologue Bush, à Washington, pour aborder un certain nombre de sujets économiques mais aussi politiques, d'intérêt commun.

D’un côté comme de l’autre, il faut dire que les deux parties doivent plancher sur les différents problèmes inhérents, entre autres, aux séquelles de la guerre : restitution des dépouilles de soldats américains laissées sur les champs vietnamiens, soins à apporter aux nombreux malades et autres handicapés à vie qu’une campagne massive de défoliants et autres poisons déversés par l’aviation américaine avait générés durant le conflit, mise en place, par ailleurs, de représentations consulaires réciproques à hauteur des échanges commerciaux bilatéraux en pleine expansion, etc.

S’agissant notamment de ces handicapés, des photos extrêmement éprouvantes de ces générations d’enfants présentant des déformations abominables de leurs membres, de leur visage et de leurs yeux totalement exorbités, ont été diffusées, hier soir, à la télévision, pour nous rappeler toute l’horreur de la guerre totale que les USA avaient menée pendant près d’une décennie à ce peuple asiatique, connu pourtant pour sa pondération, pour son amour légendaire de la paix, son travail de fourmi, ses convictions égalitaristes inébranlables, etc.

L’agent orange, du nom ou de la teinte de ce poison, dit herbicide, qui a attaqué directement en réalité les êtres humains vivant sur les terres où il a été déversé, est à l’origine, en fait, de toutes ces déformations. Et la société DOW, entre autres, qui a fait fortune dans la production de cette arme chimique si nuisible, doit avoir bien mauvaise conscience de regarder de telles images imputables à son entreprise criminelle.

Quand on se rappelle encore que le Vietnam, moins d’une décennie plus tôt, venait juste de sortir d’une guerre aussi atroce, qui avait duré sept ou huit autres années contre le colonialisme français, et qu’en fin de compte, il s’est tiré admirablement et glorieusement de ces deux conflits à mort, il ne reste qu’à tirer un grand coup de chapeau à ce peuple, unique au monde, qui marquera profondément l’histoire du siècle qui vient de s’achever, et du siècle en cours grâce au combat qu’il mène avec un succès évident contre le sous-développement qui, lui aussi, fera date sans nul doute.

Par un simple hasard, j'ai découvert cette vidéo qui montre comment les Américains, durant leur agression vietnamienne, avaient massacré, au napalm et indistinctement, des populations rurales.

De telles horreurs, semblables à celles produites par les défoliants, n'avaient pas même été dénoncées, en leur temps, par la communauté internationale, parce que provenant sans doute de la première puissance mondiale, qui s'autoproclame, aujourd'hui encore, gendarme du monde.

Une telle vision apocalyptique préfigure les épouvantables tueries de l'agression engagée depuis 2002 contre l'Irak, mais, cette fois, avec la complicité tacite d'une trentaine de pays coalisés.

Les ravages causés sur celle-ci n'ont d'égale que la cruauté bestiale de ceux qui les ont conçus, planifiés, ordonnés et exécutés, au nom de ce qu'ils croient être la préservation d'une civilisation qu'il est permis de considérer plutôt comme dégénérée à vouer aux gémonies, à défaut de la détruire par le fond.

Avec la même sauvagerie employée à réduire en cendres des centaines de milliers d'êtres humains en août 1945 à Hiroshima et Nagasaki, les Américains se désignent comme des espèces de monstres capables de détruire la terre entière sans le moindre état d'âme.

Au fond, aventuriers, malfrats et assassins qu'ils étaient, tout au début déjà, pour conquérir dans le sang les territoires devenus les leurs aujourd'hui, ils ne sauraient se réclamer d'une race supérieure. Ils resteront toujours, en dépit de leurs richesses et de leur force, de leur science et de leur savoir, un simple instrument personnifié du diable mû par le seul souci de détruire l'être humain dans toute l'acception du terme.