Le Monde diplomatique - oct. 2012
par Chase Madar
Arrestations arbitraires, détentions extrajudiciaires, tribunaux expéditifs… Malgré ses engagements, M. Barack Obama a poursuivi la politique de sécurité publique de son prédécesseur.
En 2008, le candidat Barack Obama promettait de fermer la prison de Guantánamo, d’abroger la loi de 2001 sur la sécurité intérieure (Patriot Act) et de protéger contre toutes formes de représailles les militaires ou membres des services de renseignement qui ébruiteraient les abus de leur administration. Le postulant démocrate à la Maison Blanche se faisait fort de dompter un appareil sécuritaire qui, depuis les attentats du 11-Septembre, s’était mué en une bureaucratie hypertrophiée et souvent incontrôlable.
Quatre ans plus tard pourtant, Guantánamo est toujours en service, ses tribunaux militaires ont repris leurs audiences, et le Patriot Act a été reconduit. Résolu à sanctionner toute divulgation d’informations sensibles, le ministère de la justice a engagé six procédures pour violation de la loi sur l’espionnage — soit deux fois plus que sous la totalité des gouvernements précédents. De plus, la liste des passagers interdits de survol du territoire américain, établie en fonction de critères souvent arbitraires et systématiquement opaques, a plus que doublé entre 2011 et 2012 ; elle compte désormais vingt et un mille noms. Fin 2011, la Maison Blanche promulguait la loi d’autorisation de la défense nationale (National Defense Authorization Act, NDAA), qui permet au gouvernement fédéral d’emprisonner sans jugement et pour une durée indéterminée tout citoyen américain soupçonné de terrorisme, au mépris des principes de l’habeas corpus et de la séparation des pouvoirs. L’administration Obama a enfin autorisé l’élimination physique, hors des frontières des États-Unis, de personnes désignées plus ou moins hâtivement comme « terroristes », quand bien même elles ne participent pas directement à des opérations armées. En dépit des bavures inhérentes à cette conception expéditive de la sécurité — comme cet adolescent américain de 16 ans, fils d’un responsable présumé d’Al-Qaida, tué par erreur en septembre 2011 au Yémen —, M. Obama a intensifié le programme « secret » d’exécutions sommaires visant des ressortissants étrangers, (...)
Chase Madar
Avocat des droits civiques et coauteur du rapport « Safety with dignity : Alternatives to the over-policing of schools », New York, juillet 2009.
Dossier "Fièvre électorale aux États-Unis."
(http://www.monde-diplomatique.fr/2012/10/MADAR/48242)