L'Expansion.com avec AFP - 22/03/2012
Le dernier projet portugais de ligne à grande vitesse qui devait relier Lisbonne à Madrid en 2013 a été abandonné mercredi. La faute à la crise et à une décision de la Cour des comptes dénonçant des irrégularités dans le contrat accordé au consortium victorieux.
Le Portugal devra se passer de TGV pendant encore plusieurs années. Le gouvernement de centre-droit arrivé au pouvoir en juin dernier à décidé de "suspendre définitivement" la réalisation de la ligne devant relier Lisbonne à Madrid en 3 heures à partir de 2013.
Cet abandon fait officiellement suite à la décision de la Cour des comptes de retoquer mercredi le contrat signé en mai 2010 pour la construction du tronçon de TGV qui devait traverser le Portugal d'ouest en est sur 167 kilomètres de Poceirao (près de Lisbonne) à Caia (frontière espagnole). Elle a en effet estimé que l'accord avec le consortium Elos, emmené par les groupes portugais Soares da Costa et Brisa, ne respectait pas le cahier des charges initial, dénonçant des "clauses illégales et des irrégularités".
En fait, la majorité actuelle a toujours été hostile à ce projet phare des socialistes au nom de la réduction de l'endettement public, qui ne cesse de croître (110% du PIB fin 2011). Il représente en effet un investissement de 1,4 milliards d'euros.
Face aux difficultés économiques et financières du pays, le précédent gouvernement socialiste avait déjà décidé de reporter la construction des lignes Lisbonne-Porto (nord) et Porto-Vigo (nord-ouest de l'Espagne). Seule la liaison Lisbonne-Madrid, qui devait permettre de raccorder le Portugal au réseau européen à grande vitesse, avait été maintenue.
"Sans ce projet, nous ne créerons pas d'emplois à un moment où le chômage affecte gravement le secteur de la construction", a affirmé Ana Paula Vitorino, ancienne secrétaire d'État aux transports. Pour sa part, la ministre espagnole de l'Équipement Ana Pastor est restée très prudente, affirmant ne pas avoir pris connaissance des déclarations du gouvernement portugais. "Quand je les aurai entendues, je pourrais dire quelque chose", a-t-elle dit.
Le gouvernement portugais a réaffirmé de son côté que la priorité en matière de réseaux trans-européens, sera le "fret ferroviaire avec un écartement européen standard, à partir des ports de Sines (sud) et Aveiro (centre) afin de favoriser la compétitivité et les exportations portugaises". Il y a quelques mois, le Premier ministre Pedro Passos Coelho avait indiqué que la Commission européenne devrait donner son feu vert pour que les fonds européens destinés au TGV soient affectés au fret.
Face à ces projets, qui excluent la grande vitesse, le gouvernement portugais se dit prêt à "continuer de travailler avec l'Espagne, la France et les instances européennes". Côté portugais le projet de TGV Lisbonne-Madrid n'avait en fait pratiquement jamais débuté. Le gouvernement socialiste avait déjà annulé l'appel d'offres pour le tronçon Lisbonne-Poceirao (environ 30 km), qui comprenait la construction d'un troisième pont sur le fleuve Tage.
Le coût global du TGV ibérique était estimé à plus de 3 milliards pour les Portugais et près de 3,8 milliards côté espagnol, où les travaux ont en revanche démarré en 2007 et devraient être bouclés l'année prochaine.
Troisième pays de la zone euro à obtenir une assistance financière internationale, le Portugal a reçu en mai 2011 un prêt de 78 milliards d'euros en échange d'un programme de reformes et de rigueur afin d'assainir ses finances publiques et relancer son économie, en récession depuis 2011. Le groupe Soares da Costa a annoncé qu'il envisageait de réclamer à l'État quelque 300 millions d'euros pour couvrir les investissements déjà engagés dans ce projet.
(http://lexpansion.lexpress.fr/entreprise/le-portugal-renonce-au-tgv_288688.html)