Après s'être attaquées aux camelots de Tizi Ouzou, il y une semaine environ, les forces de l'ordre ont entrepris, hier, d'expulser d'autres camelots, cette fois à la place des Martyrs, dans la basse Casbah d'Alger, provoquant dès lors des affrontements et même des blessés et des arrestations.
Vers 7 h 30, hier matin, les "hommes bleus", comme on les appelle, sont venus donc en masse sur les lieux, encore inoccupés par les marchands dits de l'informel, lesquels ne commençant à s'installer qu'à partir de 9 h environ. Ils se sont emparés des marchandises que les plus insolents des premiers arrivants s'employèrent à exposer, en dépit de l'interdiction reçue, d'où les heurts...
Il est vrai qu'à partir de 10 h, toute la zone comprise entre le marché dit de la Lyre, la rue de Chartres, la place des Martyrs et le lycée Abdelkader, est envahie jour après jour par des centaines d'étals hétéroclites, serrés les uns contre les autres, disposés sans ordre à même le sol sur la voie publique, chaussées et trottoirs confondus. Du coup, la circulation automobile y devient impossible et la circulation humaine non seulement ralentie par les divers obstacles dressés parfois à dessein mais risquée. De nombreux voleurs à la tire y opèrent en toute quiétude, loin en effet de toute présence policière. Les magasins se retrouvent du coup non seulement concurrencés par ces camelots déversant une foison de marchandises devant leurs portes mais surtout inaccessibles. Et leurs protestations indignées auprès des pouvoirs publics restent toujours inaudibles.
En essayant de "crever l'abcès" sur cette place des Martyrs, les policiers ne pouvaient, au pire, que s'attirer les foudres de ces ambulants le plus souvent marginaux, et, au mieux, que recevoir leurs sempiternelles récriminations, eux qui transforment nombre d'artères des villes et des villages en bazars où s'amoncellent tous les chiffons et autres produits contrefaits provenant de Chine et de Turquie.
Il faut rappeler qu'à la faveur des manifestations populaires qui ont embrasé aussi l'Algérie lors de l'augmentation des prix du sucre et de l'huile en janvier dernier, à l'heure où le "Printemps arabe" commençait à donner ses premiers effets en Tunisie puis en Égypte, le pouvoir algérien avait lâché du lest, au nom de la préservation de la paix sociale. Mais ce recul, exploité à fond par quantité de jeunes le plus souvent désœuvrés, a permis une floraison de nouveaux marchés informels, un squat d'emplacements divers désormais offerts à leur merci.
Aussi, faut-il s'attendre, si l'opération de démantèlement se poursuit durablement, à des réactions en chaîne de ces bandes de camelots mus par le seul souci de gagner de l'argent et vite, sans le moindrement se préoccuper de l'illégalité de leur activité et moins encore de l'incidence dévastatrice sur l'économie nationale de la multiplication de leurs chiffons et autres produits importés sur la voie publique.