Déjà l'assurance avec laquelle Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, s'est rapproché de lui-même des services de police londoniens, pour être entendu à propos des poursuites exercées contre lui par le parquet suédois, laissait planer des doutes quant à sa culpabilité réelle. Quand on est innocent, en effet, on ne s'embarrasse généralement pas de craintes d'être confondu surtout en matière de justice. Par contre, comme coupable, on y réfléchit par deux fois et on tente plutôt de prendre ses distances de la police et de la justice parce qu'il suffit parfois d'un mot, d'un détail, enfin d'un fil ténu pour être déstabilisé et mené au cachot.
D'un autre côté, s'il est un pays au monde qui a été le plus fortement rudoyé par Wikileaks à travers la divulgation de ses propres secrets diplomatiques, c'est bien Washington. Et ce dernier, on le sait, ne lésine jamais quant à la panoplie des moyens qu'il peut mobiliser sans le moindre état d'âme pour sévir et procéder au besoin à l'élimination physique de (ou des) adversaires ; les services de la CIA ou du FBI collectionnent là-dessus un palmarès inégalé jusqu'ici.
Or, dans cette histoire de viol mettant en cause Assange, bien cousue à vrai dire de fil blanc, l'on ne peut s'empêcher de faire le rapport avec un possible complot concocté par l'agence CIA, au demeurant très expérimentée en la matière.
C'est précisément ce à quoi André Fediachine consacre toute une étude parue dans Ria Novosti que voici, pour les lecteurs de Thilelli.***********************************************************************************
Assange accusé de viol : affaire de sexe commanditée par la CIA ? 09/12/2010 - Par Andreï Fediachine, RIA Novosti
En attendant les audiences à l'issue desquelles il sera statué sur son extradition en Suède, Julian Assange est derrière les barreaux en Grande-Bretagne. Cette situation n’étonne personne, car tout le monde s’y attendait. Comment ne pas finir en prison après de tels tsunamis dirigés contre les États-Unis et de telles explosions partant dans tous les sens.
Après de tels scandales on ne reste pas longtemps en liberté. Bien que son incarcération soit loin de ressembler à la "
fin de la chasse mondiale après Assange", selon l’expression d’un journal américain d’extrême droite. Il ne faut pas exagérer. Il s’est livré lui-même à la police : le mandat électronique de recherche a été rendu public et le lendemain il rencontrait déjà les policiers britanniques. Les avocats étaient convaincus qu’on le relâcherait sous caution. Ce ne fut pas le cas.
Il existe tellement de bizarreries dans toute cette affaire qu’elles ne sont explicables qu’en s’ingérant indélicatement dans le domaine délicat des relations intimes entre les sexes. Avec toutes les fonctionnalités que cela implique.
Seulement en SuèdeCela ne pouvait arriver (ou être provoqué ?) qu’en Suède. Il convient de noter que la Suède est le pionnier de l’égalité des sexes (ce qui sous-entend, entre autre, la protection juridique stricte des droits des femmes). Comme beaucoup de choses dans l’économie et le quotidien des Scandinaves, cet aspect juridique est poussé à un tel extrême que la Suède fait de l’ombre non seulement aux sœurs scandinaves "
en retard", le Danemark, la Norvège, la Finlande, l’Islande, mais également au reste du monde.
Généralement, un tel "
socialisme des sexes" plonge dans la joie les ferventes féministes, et dans l’horreur le camp sexuel opposé.
Encore en 1964, les Suédois (à 25-30 ans avant qu’ils n’aient commencé à le faire en Europe, mais sont loin d’avoir terminé) ont adopté une loi réprimandant sévèrement le "
viol conjugal". La législation suédoise dispose de la plus grande liste d'actes ou de tentatives d'actes qui pourraient être qualifiés de "
rapports sexuels non consensuels", ou, dans le langage normal, de rapports non consentis. Autrement dit, tout ce qui est qualifié ou pourrait être considéré comme un viol. Le "
catalogue" est si vaste qu’aucun autre pays ne lui arrive à la cheville.
Mais les accusations portées contre Julian Assange sont difficiles à "
caser", même dans une liste aussi importante d'actes masculins indécents. Il n’y avait pas de non consentement. Et le trio impliqué (Assange est accusé par deux Suédoises) le reconnaît. Les deux plaignantes n’accusent pas le principal dénonciateur du web de viol dans le sens traditionnel du terme.
Les deux femmes affirment avoir été consentantes mais le cyberdélinquant a, soit sciemment "
déchiré son préservatif" (premier cas, l'épisode est tiré directement de l’interview de l’une d’elles accordée au quotidien suédois Aftonbladet), soit (second cas) il a "
utilisé" sa partenaire sans se protéger lorsqu’elle dormait et elle n’a rien remarqué. Cela arrive. Mais cela ne paraît amusant que dans le langage de la rue. Enveloppé dans les accusations du modèle suédois avancé, cela semble très sérieux, pouvant se conclure par une condamnation et un séjour en prison pour : "
contrainte illicite", "
détournement délibéré" et "
rapport sexuel en abusant d’une partenaire endormie." En Suède cela pourrait se traduire par quelques années de privation de liberté.
Incroyable, mais les deux Suédoises affirment qu'elles ne se connaissaient pas du tout avant les rapports pendant le sommeil et/ou avec des "
ustensiles" sciemment endommagés, et ne se sont rencontrées que la veille de leur arrivée au commissariat de Stockholm. Et elles seraient venues pour une "
consultation", à savoir quel chef d’accusation pourrait être avancé contre Julian Assange et demander s’il n’était pas possible de l’obliger à subir un test de dépistage du VIH. Le procureur de district a estimé que tous les éléments du viol étaient réunis et a dressé la liste des accusations. Cela est arrivé le 20 août. Le 22 août, le procureur principal de la Suède a abandonné les accusations pour "
absence de preuves."
Mais en septembre, le procureur du district de Gothenburg, et non pas celui de Stockholm, a rouvert le dossier "
suite à l’apparition de nouvelles preuves" et de nouveaux témoignages. Toute l’affaire a démarré de là. Et on ignore ce qui a poussé le procureur à rouvrir l’enquête. On parle de certains "
arrangements politiques"…
Que risque le principal " terroriste " du cyberespace ?Les auditions sur l’extradition d’Assange en Suède débuteront le 14 décembre. Selon les lois britanniques, elles ne doivent pas durer plus de 21 jours. Mais les avocats du fondateur de Wikileaks ont déjà déclaré qu’en cas de décision défavorable pour leur client, ils sont prêts à faire appel auprès de la Cour supérieure de Londres, puis à s'adresser à la Cour suprême. Dans les deux cas les audiences pourraient durer plusieurs mois. Six mois au minimum.
Mais la défense ne craint pas que l’accusé soit remis aux autorités suédoises : le tribunal suédois ne reconnaîtra pas forcément Julian Assange coupable. Mais la Suède a un accord avec les États-Unis pour l’extradition, avec une liste relativement grande d’accusations, selon lesquelles un individu peut être "
remis aux Américains."
Tant que l’affaire se passe en Suède, tant que le procès n’est pas terminé, tant qu’il n’est pas relâché (ou mis en prison), personne ne mettra la main sur le "
bad boy du net." Mais ensuite… Ensuite les États-Unis ne seront plus les seuls à pouvoir exiger l’extradition. Wikileaks s’est fait de nombreux ennemis en "
marchant sur les pieds" d'un grand nombre de dirigeants, de présidents, de ministres, de ministères, etc.
Il y a peu de raisons de s’en réjouir. Notamment, lorsque le ministre américain de la Défense déclare que "
l’arrestation d’Assange est une bonne nouvelle", les conservateurs américains exigent de le mettre en prison, de l’assimiler à Al-Qaïda et aux talibans, et de l’éliminer s’il s’avérait impossible de l'emprisonner. Le ministre américain de la Justice a une nouvelle fois déclaré que les experts du ministère vérifiaient l’éventualité d’accuser Assange d’espionnage conformément à la législation américaine.
Les actes de l’Australien ne tombent pas sous le coup de cette loi : personnellement, il n'a rien commis de répréhensible que ce soit sur le territoire américain ou contre les États-Unis. Mais les Américains ont déjà créé un précédent contre les hackers informatiques : les ingérences dans le cyberespace américain peuvent être considérées comme un crime perpétré sur le territoire américain.
Toutefois, les lois suédoises interdisent l’extradition s’il existe des raisons de croire que l’individu extradé sera poursuivi au pénal pour ses "
convictions politiques." La philosophie d’Assange, qui consiste à ne pas permettre au Grand frère de faire tout ce que bon lui semble en restant impuni, semble parfaitement correspondre à une telle définition.
En ce qui concerne les plaignantes contre Julian Assange, leur situation est peu enviable. Bien qu’officiellement en Suède et en Grande-Bretagne leurs noms soient tenus secrets, et que le tribunal ait ordonné de ne pas les rendre publics, Internet déborde d’informations, de photos, de descriptions des parcours professionnels, d’habitudes et bien d’autres éléments au sujet des deux femmes. Jusqu’à présent, le monde n’avait jamais eu connaissance dans les moindres détails et de manière aussi répandue des célèbres affaires de viol. L’affaire est examinée en long et en large, au microscope et au télescope.
De plus, les amateurs de la théorie du complot ont également de quoi faire. L’une des "
victimes", Anna Ardin qui a organisé le voyage d’Assange en Suède, d’après certaines sources, avait travaillé pendant un certain temps à l’ambassade de Suède aux États-Unis (c’est la vérité), avait été en contact avec des groupes d’immigration de Cuba (également vrai) qui avaient des liens avec la CIA, et, par conséquent, est elle-même en relation avec la CIA. Et pour cette raison, les tenants de la théorie du complot en concluent qu’Anna Ardin est un agent américain, et toute l’affaire contre Assange n’est qu’une ignoble provocation politique. Sur internet on trouve également des recommandations sur ce qu’il convient de faire avec les "
provocatrices." Cela se passe de commentaire.
http://fr.rian.ru/discussion/20101209/188079645.html