L'affaire des 26 milliards n'a rien d'une gaudriole. C'est une réalité qui doit en principe atterrir devant les tribunaux, après avoir échoué lamentablement entre les mains du parlement. Les conclusions de la Commission d'enquête ad hoc, bien qu'elle aient été déposées dans les règles, se sont perdues, il est vrai, dans les méandres de la médiocratie parlementaire.
Les dossier est, en effet, si lourd, ses enchevêtrements si compliqués, ses implications si nombreuses sur la nomenklatura qu'il y a fort à parier que le procès ne s'ouvrira pas de sitôt, du moins avant le départ de Bouteflika. On dit que de nombreux personnages de son entourage, d'anciens pontes du régime les plus en vue ont mouillé plus ou moins dans cette affaire, où des centaines d'experts ont été appelés à l'aide.
Brahimi, l'ancien Premier ministre de Chadli, qui avait, pour la première fois, révélé publiquement ces détournements commis sous le règne de ce dernier, était encore, faut-il le souligner, bien en-dessous du chiffre réel, puisque, depuis lors, on a dû réviser à la hausse ce montant. Et, pour bien préciser les choses, ces détournements colossaux de fonds publics ont été réalisés, principalement, à travers de fausses importations d'unités industrielles. Nombre de machines importées dans le cadre de soi-disant investissements avaient été achetées au marché aux puces, pour des montants dérisoires ; elles ont fait l'objet de fausses factures pour du neuf et la contrepartie des fonds transférés a servi le plus souvent à des investissements personnels en Europe. D'autres malfrats se sont servis des libéralités offertes au profit des investisseurs pour mettre main basse sur des terrains industriels à très bon marché qu'ils ont ensuite lotis pour y construire des hôtels, des maisons, etc., qu'ils ont revendus par suite à prix d'or.
Et, pour démêler tous ces imbroglios, facilités du reste par le copinage de l'engeance se partageant le pouvoir, la justice se heurte, de plus, au problème des interférences de ce dernier qui nomme et dégomme les magistrats qui ne lui obéissant pas au doigt et à l'oeil dans la défense de ses intérêts.