Aujourd'hui, quarante-septième anniversaire du cessez-le-feu signé entre la France et le GPRA, les Algériens ont totalement oublié de le commémorer. Rares sont les journaux qui évoquent seulement l'importance du 19 mars 1962, date historique restée pourtant célèbre. Elle mettait fin aux hostilités qui avaient duré plus de 7 années, et ouvrait de grandes espérances pour le peuple tout entier. A regret, aucune manifestation officielle n'était prévue non plus pour aujourd'hui, afin de rappeler cet important souvenir relégué au second plan par la campagne électorale pour les présidentielles qui s'ouvrait précisément à partir de ce matin.
Les accords signés le 18 mars 1962 entre les deux parties stipulaient en effet la fin de la guerre en même temps qu'ils prévoyaient un référendum d'autodétermination, début juillet suivant, qui allait lui-même déboucher sur l'indépendance totale de l'Algérie.
Mais, pour les Algériens, ce moment fort de leur histoire donnait aussi, malheureusement, le signal à de graves troubles à mesure plus violents qu'allaient orchestrer les criminels de l'OAS, conduits par le général d'armée Raoul Salan. Cette organisation criminelle, déjà en activité à cette date, allait redoubler de férocité, en assassinant sans discrimination tous les Algériens de souche se trouvant sur son passage. En quelques semaines, elle pouvait s'enorgueillir d'avoir réussi à dresser deux populations l'une contre l'autre, en les engageant dans une lutte à mort. Jusqu'à la veille de l'indépendance, les extrémistes pieds noirs mettaient ainsi les grandes villes à feu et à sang pour tenter d'y instaurer le chaos, dans l'objectif, bien sûr, de remettre en cause les accords signés.
En fin de compte, les négociations menées directement entre des représentants du FLN et des chefs de l'OAS comme Susini ont fini par calmer la situation. Susini, les poches bourrées d'argent, a fait cesser le feu chez ses partisans, avant de se volatiliser lui-même dans la nature.
L'arrêt des affrontements sonnait alors le début de l'exode douloureux pour les centaines de milliers de pieds noirs qui n'avaient jusque-là jamais envisagé une perspective aussi sombre. Abandonnés à leur triste sort pour la plupart, ils n'avaient d'autre issue que de se précipiter en masse vers les ports et les aéroports pour quitter le pays au plus vite, en laissant derrière eux tous leurs biens.