La Grèce en proie à des violences depuis hier

Des échauffourées mettent aux prises, depuis hier soir à Athènes, des jeunes avec des policiers. On enregistre jusqu'ici de nombreux blessés, y compris parmi les forces de l'ordre, ainsi que des dégâts matériels importants dans de nombreuses artères d'Athènes mais aussi de Salonique et de Patras.

A l'origine, un accrochage au centre ville de la capitale, à 21 heures hier, entre une trentaine de jeunes projetant des pierres contre un véhicule de police a vite dégénéré. L'un des agents a en effet dégainé et tiré trois balles sur la poitrine de l'un des manifestants, le touchant mortellement. Aussitôt, des groupes de protestataires ont déferlé sur les lieux, scandant des slogans hostiles au pouvoir de droite en place.

Depuis ce matin, des milliers de manifestants ont pris le relais dans la capitale mais aussi à Salonique, Patras et Heraklion, incendiant des voitures, des locaux commerciaux, des sièges de banques, et brisant des vitrines sur leur passage.

Devant l'ampleur des réactions populaires, le gouvernement de Caramanlis s'est trouvé contraint de tenter d'apaiser les tensions. Il a commencé par présenter ses condoléances à la famille de l'adolescent tué en l'assurant que tout serait mis en oeuvre pour punir les responsables de ce crime. D'ores et déjà une mesure de suspension du commissaire de police du quartier concerné a été prononcée, deux policiers se trouvant dans le véhicule d'où le feu a été tiré ont été arrêtés, le premier pour homicide volontaire et le second pour complicité.

Moralité : où qu'ils se trouvent, les jeunes d'aujourd'hui ont beaucoup mûri ; ils connaissent leurs droits dans toute leur étendue et entendent ne pas se laisser marcher sur les pieds. La passivité qui avait toujours prédominé dans le passé n'a plus cours aujourd'hui. Et ce n'est pas parce que un flic ou un gendarme est armé qu'il faut obligatoirement se plier à son autorité. Tant pis pour les Américains s'ils cultivent, et ils restent les seuls, cet autoritarisme qu'offre une arme à un représentant des services d'ordre.

Les violences se sont poursuivies sans interruption en Grèce, depuis le soir du samedi au cours duquel le jeune adolescent de 15 ans a été froidement abattu par un policier. Il n'y a guère eu de répit, y compris le jour de l'enterrement du défunt. Ce matin encore, c'est l'ensemble des travailleurs du pays qui ont décidé d'un mouvement de grève générale destiné à paralyser le pays, en signe de protestation contre la répression d'ores et déjà engagée contre les manifestants. Dans la nuit d'hier, 41 personnes, dont 25 étrangers, ont encore été arrêtées, selon un communiqué de la police, qui ne précise pas le nombre total des arrestations opérées jusqu'ici.

Les syndicats ont appelé, aujourd'hui, à un grand rassemblement populaire devant le parlement, à la place du défilé qui était initialement prévu au centre de la capitale.

Le gouvernement de Caramanlis que ces mouvements populaires déstabilisent semble avoir pris la mesure des risques d'une confrontation directe avec le peuple. Il aurait déjà instruit les forces de police de l'impérieuse nécessité de ne pas provoquer les foules et moins encore d'utiliser le feu pour calmer les esprits surchauffés.

Même si les services de police grecs, dans un souci d'apaiser les populations, déclarent que les violences ont beaucoup baissé d'intensité depuis hier, des tensions persistent encore dans tout le pays et donnent lieu à de nouvelles échauffourées avec les services de sécurité. Les manifestants ont notamment lancé contre ces derniers des cocktails molotov, devant la faculté d'agronomie de la capitale. Ils ont essuyé comme riposte des bombes lacrymogènes. Des jeunes ont profité de ce désordre pour s'en prendre, dans d'autres quartiers, aux magasins pour les piller.

Mais la colère des jeunes Grecs n'a pas manqué de susciter dans d'autres pays d'Europe une certaine sympathie qui a parfois dégénéré en affrontements avec les services de police locaux. Ainsi, à Madrid et Barcelone, en Espagne, l'on parle de blessés parmi ces derniers et d'arrestations au sein des manifestants. En France, deux véhicules ont été incendiés devant le consulat grec de Bordeaux dont on a même brûlé la porte d'entrée. Dans d'autres villes européennes, comme Londres, Paris, Berlin, Rome, etc., des attroupements se sont constitués en témoignage de compassion pour la mort du jeune adolescent grec abattu par un policier. Mais l'on ne signale pas de heurts jusqu'ici avec les services de police.