Pénurie du lait

Bien que les Algériens, dans leur ensemble, aient fini par exécrer ces chaînes interminables que l’Algérie du socialisme spécifique avait instaurées durablement sous une espèce de règle inexorable qui régentait la vie de tous, les voilà de nouveau s’agglutiner, dès les aurores, devant les dépôts de l’Onalait, pour accéder, c’est bien le comble ! à quelques sachets de lait qui, au plus fort des restrictions de l’Algérie de la mamelle, n’avaient pourtant jamais manqué dans les échoppes et autres épiceries de quartiers.

Incapable de régler un problème élémentaire de prix public du lait, aliment de première nécessité, le gouvernement, par ses hésitations aussi aberrantes qu’intolérables, semble attendre que le peuple en vienne à investir carrément la rue pour briser et jeter en autodafé tout les symboles de l’Etat, matériel et infrastructures publics, pour se décider à trancher dans le vif. De crainte, précisément, qu’une augmentation du prix du lait ne s’ouvre immédiatement sur une perspective aussi extrême, qui, du coup, ferait payer au régime une part de ses dérives, à l’exemple des escroqueries qui le mettent directement en cause dans la ruine de milliers de déposants des banques mises en faillite, ou encore dans la remise en liberté de milliers d’assassins barbares étrangement assortie de dédommagements de toute sorte qui leur ont été gracieusement distribués sur le dos du contribuable, etc., les gouvernants cherchent désespérément une porte de sortie qui se ferme à eux.

Faute d’une production locale suffisante de lait, les importations de lait en poudre qui se paient rubis sur l’ongle sont forcément censées obéir à la chute à mesure plus prononcée du dinar, devenu une monnaie de singe. Et, du coup, les traiteurs de lait en poudre, qui sont en déficit, ne peuvent éternellement supporter des pertes de plus en plus lourdes.

Rapporté à l’échelle macro-économique, ce petit problème de lait, resté sans solution depuis de longs mois, donne la mesure de l’incapacité et de l’incompétence des dirigeants à conduire les affaires publiques.

Sans conteste, nous pouvons affirmer sans le moindre risque d'erreur que l'Algérie, loin de se reprendre et moins encore de progresser, contrairement aux promesses faites en l'air par son premier responsable, en 1999, se détache quasiment du peloton de queue pour se cantonner dans la seule place qui est la sienne, celle de la dernière des nations. C'est quand même le comble que des Etats, démunis de tout, font l'effort d'avancer et réussissent même à savourer le fruit de leur labeur, pendant que l'Algérie, pays pétrolier au demeurant, recule délibérément sans discontinuer.

Tiens pas plus tare que ce matin il y avait plus de lait dans les magazins. La gréve d'aprés les journeaux a reppri depuis aujourdhui. Mais alors nous alons resté sans lait.

Si, par enchantement, un semblant de solution commençait vraiment à poindre sur cette question, tout au long de la campagne électorale passée, voici le problème tout entier resurgir au lendemain du scrutin.
Cela laisse à penser que, complaisamment avec les décideurs au niveau supérieur de l’Etat, les producteurs avaient donc pleinement joué le jeu, durant cette période. Dit autrement il est permis de dire que, tout comme on a laissé dériver aujourd’hui les prix des fruits et légumes qui se trouvaient alors à peu près contenus dans des limites respectables, l’on s’achemine en définitive vers un relèvement substantiel du prix du lait dans les tout prochains jours.

Et rebelote, la crise du lait resurgit en Algérie, à la veille de l'une des plus grandes fêtes du pays, l'Aïd Kebir.

Depuis déjà 3 ou 4 jours, le lait devenait rare dans les épiceries avant de disparaître totalement, les seuls points d'approvisionnement accessibles restant les magasins de l'entreprise publique de l'ex Onalait. Du coup, des chaînes interminables se forment aux portes de ces derniers, dès le petit matin ; des chaînes qui rappellent tristement celles qui avaient habituellement cours à tous les coins de rue, du temps du socialisme de "la mamelle".

Aujourd'hui, ce sont les distributeurs privés qui se considèrent insatisfaits des subventions à eux allouées par l'Etat pour maintenir fixe le prix de 25 DA le sachet vendu au détail. Le surenchérissement des produits de consommation courante pesant fortement par ailleurs sur les revenus déjà trop maigres des ménages, les pouvoirs publics s'en étaient résolus l'été dernier à subventionner sur fonds publics les pertes subies par ces distributeurs privés.

A ce jeu, cependant, les consommateurs restent privés d'un produit de base extrêmement indispensable notamment pour la croissance de leur progéniture. L'Etat, de son côté, en rouvrant les vannes aux subventions publiques, empiète sur une règle d'or des économistes, celle de la liberté des prix, à cause de laquelle des décennies durant les Algériens, plutôt insouciants, avaient donné libre cours à un gaspillage effréné qui a conduit le pays aux limites de la cessation de paiement. Car, il faut aussi le rappeler, la production de lait reste encore très insuffisante au niveau local, la majeure partie de la consommation provenant essentiellement de l'extérieur.

Les autorités redoutent, enfin, que, sitôt réglé le problème du lait, ne sonne celui du pain, autrement plus préoccupant, les boulangers préférant à juste titre cesser leur activité plutôt que de poursuivre leur activité à perte.