Le Monde.fr avec AFP | 16.04.2012
Plus de soixante-dix ans après les faits, la réticence de la Russie à faire toute la lumière sur le massacre perpétré à Katryn, près de Smolensk (ouest de la Russie), est pointée du doigt. Dans un arrêt rendu lundi 16 avril, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a estimé que Moscou aurait dû mieux coopérer avec elle et traiter avec plus d'humanité les proches des victimes de ce massacre perpétré en 1940.
Dans leur arrêt, les juges ont estimé à la majorité qu'il y avait bien eu violation par la Russie de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme (interdiction des traitements inhumains) concernant dix des quinze ressortissants polonais qui avaient formulé des requêtes auprès d'elle en 2007 et 2009. Les requérants dénonçaient le caractère "inadéquat" de l'enquête menée par les autorités russes sur le massacre de Katyn.
Ces requérants polonais étaient des proches de douze victimes du massacre de Katyn, au cours duquel près de vingt-deux mille Polonais, parmi lesquels de nombreux officiers, furent massacrés sans jugement sur ordre de Staline au début de 1940. Pendant longtemps, Moscou avait laissé croire que ce massacre avait été perpétré par les Allemands.
"TRAITEMENT INHUMAIN"
Les juges de Strasbourg ont souligné un "manquement de la Russie à son obligation de coopérer avec la Cour au sens de l'article 38" de la Convention (obligation de fournir toutes facilités nécessaires pour examiner l'affaire). Ils ont considéré que la Russie avait "failli à son obligation de coopérer avec la Cour en refusant de fournir copie de sa décision de clore l'enquête, et que sa réaction face à la plupart des démarches entreprises par les proches des victimes pour découvrir la vérité sur ce qui est arrivé en 1940 s'analyse en un traitement inhumain".
Ils ont toutefois estimé qu'ils ne pouvaient pas examiner au fond le principal grief mis en avant (obligation d'enquêter sur la perte de vies humaines), les faits remontant à 1940 alors que la Russie n'a adhéré au Conseil de l'Europe qu'en 1996 et que l'entrée en vigueur de la Convention européenne des droits de l'homme ne remonte pour elle qu'à 1998. Cet arrêt est encore susceptible d'être soumis à l'instance suprême de la CEDH, la Grande Chambre, dans un délai de trois mois.
(http://www.lemonde.fr/europe/article/2012/04/16/la-cedh-pointe-le-manque-de-cooperation-de-moscou-dans-le-massacre-de-katyn_1686046_3214.html)