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 50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes

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Aramis




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Date d'inscription : 18/06/2008

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MessageSujet: 50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes   50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes EmptyJeu 12 Mai - 0:16

El-Watan.com - 11.05.11 |
par Hacen Ouali

Décidément, Ahmed Ben Bella n’en finit pas de «surprendre» dans le sens le plus contestable du terme. L’ex-président algérien a sévi encore en déversant son fiel, voire sa haine envers des figures emblématiques de la lutte de Libération nationale.

Boudiaf, Aït Ahmed et Abane Ramdane en particulier. Ben Bella, 94 ans, s’est longuement livré à une périlleuse réécriture de l’histoire de la guerre de Libération, à l’occasion d’une « soirée à bâtons rompus » avec un journaliste de l’hebdomadaire français Jeune Afrique, qui en a publié le contenu dans son édition du 8 au 14 mai 2011. Sans aucun scrupule, l’ancien président, renversé le 19 juin 1965 par un coup d’État militaire fomenté par le colonel Boumediène, s’est attribué toute la gloire de la Révolution et de l’indépendance de l’Algérie. « Le 1er Novembre, c’est moi », décrète-t-il. Hallucinant. Aucun écrit de l’histoire ne mentionne son prétendu rôle central dans le déclenchement de la guerre.

Quand l’envoyé spécial de Jeune Afrique lui demande de quoi il est le plus fier de son parcours, il répond : « La poste d’Oran où j’ai volé de l’argent. C’est l’OS qui a servi à faire le 1er Novembre. » A ce sujet, Ben Bella persiste dans ses fanfaronnades en s’attribuant le rôle central dans l’attentat contre la poste d’Oran, en 1949. « Même si je respecte Aït Ahmed, bien qu’il ait été souvent beaucoup plus Kabyle qu’Algérien, l’organisation principale du coup, jusqu’au moindre détail, c’est moi », a-t-il déclaré. Une contrevérité historique. Tous les historiens les plus crédibles, Algériens et Français, attestent que l’attaque de la poste d’Oran a été organisée par Hocine Aït-Ahmed, alors chef de l’Organisation secrète (OS). Aït Ahmed qui avait succédé à Mohamed Belouizdad à la tête de l’OS, raconte dans son livre, "Mémoire d’un combattant", les détails de l’attaque contre la poste d’Oran. Le rôle de Ben Bella était secondaire. Les archives de la police française, par contre, affirment que c’est Ben Bella qui est à l’origine du démantèlement de l’Organisation en 1951.

Les dérives de l’ancien président, actuellement à la tête du fameux Comité des sages de l’Union africaine, ne s’arrêtent pas là. Personne ne trouve grâce à ses yeux. Tel que rapporté dans l’article de Jeune Afrique, Ben Bella ne cherche pas à « exagérer son rôle ! (sic) », « mais simplement à dire qu’il ne fut pas facile avant le déclenchement de la lutte armée de faire travailler ensemble les divers responsables du soulèvement et que c’est lui (Ben Bella) qui a réussi à aplanir les difficultés ».

Selon Jeune Afrique, Ben Bella pense en particulier à la coordination et à la cohésion du groupe des pionniers du FLN qui n’allaient pas de soi. D’autant que « parmi eux, il y avait des Kabyles », pensant surtout à Krim Belkacem qu’il trouve, par ailleurs, « courageux ».

Encore une assertion lourde de sens venant d’un ancien président de la République algérienne. Cinquante ans après l’indépendance, le premier chef de l’État algérien nourrit encore de la rancœur à l’égard du héros de la Révolution algérienne, principal artisan du Congrès de la Soummam, Abane Ramdane. Il ne fait aucun doute pour Ben Bella que celui qu’on surnomme « l’architecte de la Révolution » l’avait empêché d’aller assister au Congrès de la Soummam.

Même le véritable déclencheur de la Révolution, Mohamed Boudiaf, ne trouve pas grâce à ses yeux : « Il n’était pas un véritable combattant. Zéro sur le plan militaire. » Boudiaf se retournerait dans sa tombe. Pas étonnant que ces mots sortent de la bouche d’un ancien sous-officier de l’armée française.

Messali Hadj, un des pères du nationalisme algérien, est réduit par Ben Bella à un homme qui « faisait trop de cinéma. Il jouait trop un personnage avec sa barbe et sa tenue vestimentaire ». Pathétique.

Personne, alors, n’a les faveurs de Ben Bella ? Si. Il ne faut pas chercher dans les rangs des maquisards de la Révolution, mais plutôt de l’autre côté de la barricade. Le général de Gaulle. Pour Ben Bella, « l’arrivée au pouvoir de cet homme, qui est au-dessus de tous les autres, ne pouvait qu’être une bonne nouvelle. J’ai pensé tout de suite que c’était une bonne chose », assume-t-il. Faire les louanges de de Gaulle « n’a aucun rapport avec le fait qu’il m’a décoré, lors de la Seconde Guerre mondiale, à Monte Cassino », assure Ben Bella.

Lorsque l’interviewé évoque dans « ses confessions » les révoltes arabes, tunisienne en particulier, il se dit « sceptique » quant à la capacité des Tunisiens à réaliser une révolution. Il hasarde une curieuse comparaison avec les Marocains « qui, eux, sont des vrais combattants et pas des poules mouillées » ! Les Tunisiens seraient-ils génétiquement incapables de se muer en vrais combattants, alors qu’ils viennent d’ouvrir la voie du changement à toutes les sociétés arabes ?

Enfin, Ben Bella ne manque pas de rappeler au passage que son père et sa mère « sont tous deux Marocains ».
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À propos de Bouteflika : « je regrette qu’un homme de son âge ne soit pas encore marié ».

Interrogé sur l’actuel président, Abdelaziz Bouteflika, l’ancien président le considère « comme un petit frère » et espère « qu’il ne lui arrivera rien de mal ». Cependant, il ne s’empêche pas de lui reprocher son célibat. Ben Bella regrette qu’« un homme de son âge ne soit pas encore marié », tout en disant qu’« il n’est jamais trop tard pour bien faire ». De quoi mettre en colère le locataire d’El Mouradia.

Sur le plan politique, tout en précisant qu’il n’est pas tout à fait d’accord avec Bouteflika sur beaucoup de points, Ben Bella « préférerait autre chose, mais s’il y a des moins et des plus chez lui, pour l’instant c’est le moins mauvais et je m’en contente », confesse-t-il.
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Ouarziguen




Nombre de messages : 132
Date d'inscription : 25/06/2010

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MessageSujet: Re: 50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes   50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes EmptyMar 31 Mai - 12:55

Le Soir d'Algérie - 31.05.2011
par Nordine Aït Hamouda député RCD

Nordine Aït-Hamouda dénonce : "Ben Bella : l'homme des Français et des Égyptiens"

La dernière sortie de Ben Bella pose, une fois de plus, la place de l’Histoire dans la vie politique nationale. « Un âne bâté », c’est le qualificatif qu’use l’épouse d’Abane pour qualifier Ahmed Ben Bella. Cette réaction a suivi les ignominies qu’il a déversées contre Abane Ramdane et les acteurs du Congrès de la Soummam.

Signalons au passage que dans le procès que la veuve de l’artisan de la révolution avait intenté à Ali Kafi pour diffamation d’Abane, elle s'était retrouvée seule au tribunal. Les incohérences et les outrances de Ben Bella sont des constantes dans un parcours marqué par une indigence intellectuelle que n’ont suppléée ni les années passées en prison ni l’aisance matérielle dans laquelle il a toujours baigné dans le mouvement national et la vie politique algérienne en général quand il était libre.

Une instabilité originelle

La lecture de sa déposition, le 12 mai 1950, dans l’affaire de l’attaque de la poste d’Oran, devant l’officier de police judiciaire, Havard Jean, aujourd'hui sur le Net, est stupéfiante. Sans subir la moindre violence, il s’efforce, avec une précision d’horloger, de donner et d’enfoncer tous ses camarades et de faire valoir ses états de service pour la France. « J’ai fait la campagne de France 1939-1940, puis la campagne d’Italie. J’ai été démobilisé avec le grade d’adjudant en juillet 1945. Je suis titulaire de la médaille militaire avec 4 citations. Je n’ai jamais été condamné, je suis lettré en français. »

Bien évidemment, Ben Bella souligne son intégration française pour mieux se démarquer de ses coaccusés qui, eux, n’ont pas eu « la chance » d’avoir servi le drapeau français avec tant d’enthousiasme.

Ce qui l’amène à expliquer aux Renseignements généraux que : « Comme dans tous les partis politiques, il y a les réfléchis, les pondérés, les exaltés, les violents qui trouvent qu’on n’en fait pas assez… et c’est toujours sous la pression des perturbateurs et pour céder à leurs exigences que certains actes de violence sont commis. Parmi eux, je citerai le cas de l’attaque de la poste d’Oran. Je vais dans le détail vous dire tout ce que je sais. Je ne peux pas vous dire si c’est Madjid (Aït Ahmed) qui était à ce moment-là le chef de l’OS ou bien le député Khider, qui a imaginé ou conçu ce coup de force. En tout cas, cette affaire n’a pas pu se réaliser, à condition que ce soit Madjid qui l’ait conçue sans en référer à Khider. »

Tous les militants de l’OS, y compris les plus clandestins, y passent : avec leurs fonctions, les réunions, leurs dates et lieux, les sources d’argent de l’organisation pour conclure sur : « J’ai appris par Madjid lui-même que l’argent (de la poste d’Oran) avait été transporté chez Boutlelis, où le député Khider devait [en] prendre livraison. Le produit du vol (la poste d’Oran) a été entièrement versé au MTLD par Khide; la somme d’argent découverte chez Khider, le chauffeur, représentait un prêt consenti par l’OS pour lui permettre de monter un garage personnel. Si par la suite il me revenait certains détails, je ne manquerais pas de vous en faire part ou de les dire au juge d’instruction. » C’est un document qui s’apparente plus à un rapport de mission qu’à des informations arrachées ou glanées sur un ennemi.

Comment un homme aussi fragile a-t-il pu rebondir dans le mouvement national et, pire, s’imposer à tous ses acteurs ? Sans verser dans la paranoïa ambiante, nous verrons dans la suite de cette intervention que c’est parce que les grands choix d’après-guerre ont échappé très tôt aux Algériens.

Ben Bella, qui n’entreprit aucune action significative pendant son passage à l’OS, a, par contre, eu le temps de connaître tous les rouages de l’organisation.

Le résultat de sa collaboration avec l’administration française se chiffre par des centaines d’arrestations en chaîne (363 dont 251 présentés devant la justice), le démantèlement total de l’OS (hommes, armes, explosifs, caches, complicités…) et la reconstitution des liens de la structure clandestine avec le MTLD qui activait encore dans la légalité.

Le désarroi semé par cette « coopération » parmi ses codétenus à la prison de Blida avait poussé Amar Ould Hamouda (1) à tancer vertement Ben Bella pour avoir donné tous les militants de l’OS de l’Oranie dont il connaissait la plus grande partie.

Vu sous l’angle des dégâts qu'il n'aura de cesse d’assener à l’Algérie, on peut croire Ben Bella quand il déclare que son plus haut fait d’armes est l’attaque de la poste d’Oran.

Le personnage se plaçait déjà sur une démarche qu’il n’a jamais abandonnée : étranger aux souffrances et aspirations du peuple algérien, il sera rapidement repéré et sponsorisé par la France et plus tard par Gamal Abdennacer. Il s’est ainsi, très tôt, ouvert la voie pour se faire introniser à la tête du premier gouvernement de l’Algérie indépendante par la force de deux puissances étrangères contre la direction légale de la révolution. Ceci étant dit, et toujours sur le registre antialgérien, il passe sous silence dans ses sorties un autre exploit, il est vrai, obtenu après l’indépendance : l’élimination de 450 moudjahidine de Kabylie dans la crise de 1963, avec le concours de Boumediène.

Pour l’Histoire, il faut dire que, cette fois-ci, il a été grandement aidé par la politique d’exclusion de son ex compère de la délégation extérieure du Caire, Hocine Aït Ahmed, qui a semé doute et désespoir en voulant rester le seul opposant et en condamnant, dès le départ, une insurrection qu’il avait chevauchée en cours de route.

On remarque, cette fois encore, que la relation des deux compères est à la fois singulière et complexe. En effet, Aït Ahmed qui entretient des rapports en dents de scie avec Ben Bella s’est bien gardé de répondre à l’attaque de ce dernier. Mais ceci est une autre histoire.

L’histoire à contre-courant

Revenons au parcours de Ben Bella dans les années 50, à commencer par son évasion de la prison de Blida. Cette étrange évasion, de l’avis de plusieurs acteurs de l’époque et même de ceux qui connaissent cette prison, le mène directement au Caire, où, c’est désormais établi, il est aussitôt pris en charge par le chef des moukhabarates égyptiens, Fethi Dib, qui se chargera de le présenter à Nasser.

[Devenu] membre de la délégation extérieure du MTLD, les services égyptiens et français mettent tout leur poids pour le présenter comme le chef de l'insurrection algérienne, allant jusqu'à lui attribuer la paternité de l'appel du Premier Novembre alors que le rôle mineur des membres de la délégation extérieure est de notoriété publique. Mais, comme dans de nombreuses batailles, il y a ceux qui les préparent, ceux qui les font, ceux qui les subissent et ceux qui, tapis dans l'ombre, en guettent les dividendes en cas de succès : Ben Bella a toujours appartenu à cette dernière catégorie. Il le démontre encore aujourd'hui.

Pour l'enfant gâté, la détermination, la conviction et l'énergie de Boudiaf déployées pour ouvrir une issue à la crise du mouvement national et remobiliser ses camarades ne sont qu’une agitation d'activiste.

C'est monsieur Ben Bella qui aurait tout command[it]é à partir des résidences cossues des moukhabarates égyptiennes. L’imposture ne fait que commencer.

Sans légitimité politique et se cachant derrière les blindés de Boumediène, il se distingue, le 5 juin 1962, lors de la réunion du CNRA à Tripoli en menaçant le président Ben Khedda de lui « enlever publiquement le pantalon ». Au diable la légitimité de toutes institutions et la légalité du pouvoir! La culture du pouvoir officiel venait de naître.

Elle dure toujours. Auparavant, chargé d’acheminer des armes pour les maquis de l'intérieur, il les détourne, sur ordre de Nasser, au profit des opposants au président Bourguiba qui était en désaccord avec les prétentions du Raïs égyptien à régenter l'ensemble des pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Il est inutile de dire que ces armes ont été achetées grâce aux sacrifices des travailleurs algériens, en particulier ceux de l'émigration.

Le voyage de Ben M'hidi au Caire, fait au risque de sa vie, ne changera rien à la conduite de l'agent de Fethi Dib. Après une discussion houleuse avec Ben Bella, Ben M’hidi décide de rentrer au pays pour rejoindre, une nouvelle fois, la résistance.

Lui aussi rejette catégoriquement le fait que les Égyptiens s'immiscent dans les affaires de la délégation extérieure du FLN et dénonce particulièrement le choix fait par Fethi Dib sur Ben Bella pour en faire l'interlocuteur exclusif du FLN auprès du maître du Caire.

Pour le reste et avant d’être intercepté par les Français, en octobre 1956, alors qu'il n’a eu comme seule conduite que de se tenir loin du front de la lutte armée, Ben Bella s'est acharné à semer la division et la démoralisation par le biais de son acolyte Ahmed Mahsas, envoyé en Tunisie pour détruire la Wilaya I, casser du Kabyle et jeter l'anathème sur les résolutions du Congrès de la Soummam.

Il a fallu l’intervention radicale du CCE, qui a emprisonné Mahsas, pour arrêter le travail de sape commandité par Ben Bella.

Il est vrai que pour quelqu'un que les services égyptiens et français destinent à gouverner l'Algérie, la stratégie de la division était normale. Il fallait se préserver et détruire toute autre alternative.

C'est ce à quoi Ahmed Ben Bella s'attelle pendant que d'autres combattent et exposent leur vie. Il veut même délocaliser le Congrès de la Soummam pour que les militants de l'intérieur viennent vers lui à San Remo, en Italie. Après cela, il accusera Abane de l'avoir écarté de la réunion. Le monde à l'envers !

Les séquelles de la falsification

Aujourd'hui, à l'heure d'Internet et de la globalisation, les médias éclairent d'un jour nouveau des faits et des pseudo-légitimités, traités jusque-là par les seules officines du système.

L'épisode du détournement, par le gouvernement français, de l'avion menant Boudiaf, Khider, Aït Ahmed, Lacheraf, Ben Bella, du Maroc vers Tunis est à méditer.

La photographie des cinq insurgés diffusée dans la presse est le produit d'un montage exécuté par un gendarme français à l'aéroport d'Alger qui intima l'ordre à Boudiaf, qui tenait un classeur, de le remettre à… Ben Bella.

La surmédiatisation du rôle de ce dernier (on parlait de l'avion de Ben Bella) symbolisée aussi par la question de De Gaulle : « Je crois que quelqu'un m'a posé une question sur Ben Bella », alors que personne ne l’avait cité, en dit long sur le marketing français mené en faveur de l’homme d’Oujda. Plus tard, porté par l'ivresse du parvenu et, sans doute briffé par Pablo (Michel Rabtis dirigeant trotskyste français et conseiller de Ben Bella), il se hasarde même à disserter sur la théorie de « l'État et la Révolution » pour assener au milieu d'un discours prononcé à l'occasion du congrès du FLN (16-21 avril 1964) qu’« il faut combattre sans répit ceux qui affirment que la construction d'un État est un préalable à la révolution. »

Un telle voie aboutirait, si on la prenait, à remettre le pouvoir entre les mains de ceux qui possèdent la culture et l'expérience politique»! Sans commentaire.

Sans états d'âme, le protégé des services français et néanmoins agent direct de Fethi Dib était, tour à tour, respectueux de l'ordre de la France coloniale pour sauver sa peau en enfonçant ses camarades, arabiste contre les Kabyles pour éliminer de dangereux rivaux politiques, islamiste contre la liberté et l’islam populaire des Algériens et contre « ceux qui possèdent la culture » dans l'Algérie indépendante.

Pour compléter ce slalom, il arborera longtemps le col Mao avant de replonger dans l’exhibition islamiste.

Si le coup d’État de juin 1965 a eu raison de la mégalomanie du personnage, le système est toujours dominé par une mémoire de l'indigénat et, sur ce point précis, Ben Bella n’est que l’acteur le plus emblématique d’une tendance générale où chacun fait évoluer l’Histoire, non pas en fonction de l’apport de nouveaux documents ou témoignages, mais selon les positionnements politiques de l’heure. Des hommes comme Mohamed Harbi n’échappent pas à ces tentations. Cela fait deux fois qu’il s’en prend au livre écrit par Saïd Sadi sur le colonel Amirouche.

À deux reprises, il décoche ses fléchettes par le recours au jugement moral (Saïd Sadi, démocrate, n’aurait pas montré de la compassion avec les victimes du FLN) au lieu de traiter, en tant qu’historien, des faits, des témoignages et des documents constitutifs d'un ouvrage qui déconstruisent certaines de ses analyses. Sujets sur lesquels il était attendu en tant qu'historien : (fausse allégation d’un conflit entre Amirouche islamiste et sanguinaire, et Zighout à propos du contrôle de la ville de Sétif, rôle d’Ali Kafi…).

Son annonce de la menace de mort contre Bentobal par Krim est, même nuancée dans une mise au point, une surprise pour quelqu’un qui a tant écrit sur le mouvement national. M. Harbi dit avoir fait cette révélation après avoir pris connaissance du livre testament de Bentobbal auquel il avait eu accès.

Ni Omar Boudaoud ni Ali Haroun (responsables de la Fédération de France du FLN), qui étaient en contact direct avec Bentobal pendant la guerre et qui ont gardé une relation permanente avec lui, n’ont entendu l’ancien ministre de l’Intérieur du GPRA leur faire part d'un tel projet. Mieux, dans son ouvrage sur les Accords d’Évian (2), préfacé par M. Harbi, Haya Djelloul rapporte que Bentobal dément toutes les accusations qui ont été portées contre Krim. Se pose alors la question de la fidélité des mémoires de Bentobal qui a été « persuadé », dans une situation d'extrême fragilité morale, de ne [faire] publier son témoignage… qu'après sa mort ! Dans le même registre, et sur un autre personnage, monsieur Harbi, « reliftant » le profil de Abdelhafid Boussouf, en donne une image exactement contraire à celle qu'il a décrite auparavant (3). Autre sujet abordé dans la dernière interview accordée à El Watan, ses propres écrits dans Révolution Africaine, au lendemain de l'indépendance. Il se trouve que j’ai pu consulter les archives de cette revue où monsieur Harbi officiait. Ses positions n’ont rien à envier à tous les idéologues de l’époque. Cela d'ailleurs peut se comprendre dans un climat dominé par la violence générale ; mais de là à faire croire que l’organe central du FLN de l’époque était une tribune où s’écrivait librement l’histoire de la guerre, c’est prendre de grandes libertés avec la réalité. Il serait temps que les acteurs de la guerre parlent librement et déposent leurs documents ou témoignages pour un traitement serein et méthodique le moment venu.

Faute de quoi, la guerre de Libération continuera d’être la source de nouveaux abcès et drames.

Cette tradition qui consiste à accommoder l’Histoire aux conjonctures politiques est dangereuse et contagieuse… Le révisionnisme qui commence à polluer Avril 80 témoigne de la profondeur du mal.

La régression générale, produit d’une école squattée par l'idéologie et la diffusion d’une culture d’aliénation, ne pouvait que faire émerger le « leadership » d’un Belkhadem, d’un Mazrag ou d’un Benaïcha avec des faire-valoir kabyles, féministes ou technocrates, pour les besoins d'un scénario négateur de l'Histoire et dangereux pour l'avenir. Louisa Hanoune, avec laquelle j'ai eu récemment quelques échanges – aujourd'hui intégrée dans les manœuvres du système et qui garde ses verbiages aux relents gauchistes – résume bien les risques de ces confusions et dérives en déclarant : « Il faut des réformes et pas un changement » ! Tout est dit. Avant de terminer, je tenais aussi à interpeller Saïd Barkat (un délinquant en sursis) prompt à investir la surenchère nationaliste pour lui demander de réclamer que Ben Bella, qui revendique sa filiation marocaine, soit déchu de sa nationalité, dès lors qu’il a dénié à Saïd Sadi et à ses camarades leur qualité d’Algériens.

Je ne peux m’empêcher aussi de penser à Monsieur Lahouari Addi qui s’empressera, cette fois encore, de me répondre au motif que je m’attaque à « des symboles qu’on ne traite pas comme des moins que rien ».

Cette sensibilité à la carte manque de crédibilité, car elle ne se réveille que dans des cas bien répertoriés et précis. Son silence devant la haine récurrente de Ben Bella à l’endroit des martyrs de la révolution illustre cette indignation sélective. "La trahison des clercs", avait récemment déploré Maître Ali Yahia. Ce n'est pas la première fois que j'interviens à propos des manœuvres politiques qui prennent appui sur le détournement ou la falsification de l'Histoire.

Je le sais, il y a, pour moi aussi, une part de subjectivité dans mes interventions.

Je me suis néanmoins toujours interdit de manipuler des événements, des témoignages ou des documents. C'est sur ce minimum concret que j'appelle les acteurs, anciens ou nouveaux, à se fédérer. Pour le reste, laissons le jugement à l'Histoire.
N. A. H.

1*Amar Ould Hamouda, membre du BP du PPA/MTLD Responsable régional de l’OS
2*Le dernier combat, Haya Djelloul Casbah éditions 2008 Préface de M. Harbi
3*Le FLN, documents et histoire 54-62 M. Harbi G. Meynier Casbah Editions 2004

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M'hand

M'hand


Nombre de messages : 434
Date d'inscription : 10/05/2007

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MessageSujet: Re: 50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes   50 ans après l’indépendance Ben Bella règle ses comptes EmptySam 11 Juin - 21:38

Le document ci-après est une lettre - de contenu intéressant - adressée à l'ancien président de la République, Ben Bella, par Djemaâ Djoghlal, dont le journal qui la publie n'indique ni la fonction ni l'adresse. La voici, telle qu'insérée dans le quotidien, avec cependant quelques corrections d'orthographe et de ponctuation, que j'ai dû y apporter pour la clarté et la lisibilité du texte. J'ai également pris soin de compléter, selon ma propre lecture, les guillemets manquants et de préciser chaque fois l'auteur de chaque citation produite.
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Liberté - 11.06.2011

Djemaâ Djoghlal répond à Ahmed Ben Bella

“Monsieur le président, êtes-vous monarque de droit divin ?”

Monsieur le président (1)

Permettez-nous d’attirer votre attention sur cette requête que de nombreux Algériens, des deux sexes, de différentes générations et de toutes les classes sociales vivant dans le pays ou à l’étranger, auraient souhaité vous adresser, certains en vous bénissant, d’autres en vous condamnant.

En effet, vos prises de parole dans des médias étrangers alors que votre pays (2) s’est doté, au prix de milliers de sacrifices et de sacrifiés, de porte-voix des différentes tendances, y compris l’arabo-islamiste que vous affectionnez, il était plus judicieux de nous parler à travers ces canaux.

Donc, nous doutons comme de nombreux Algériens que vous répondiez à ce courrier, néanmoins, nous aimerions porter à votre connaissance et à celles des jeunes Algériens quelques réflexions inspirées par vos différentes déclarations. Le choix s’est délibérément fixé sur votre biographie autorisée, datant de 1965 (3), éditée en France et votre livre d’entretiens datant de 1984 (4) édité au Liban mais reproduit en Algérie lors des années noires qui ont failli plonger le pays dans un abîme sans fond.

Donc, reprenons quelques-unes de vos pages afin que vous nous apportiez soit des éléments d’histoire, soit des explications justifiant vos changements successifs. Certes, chacun d’entre nous peut et doit évoluer avec les bouleversements de son époque et aussi avec les expériences tirées de son propre parcours privé et public, mais condamner aujourd’hui ce que l’on encensait hier ou avant-hier peut être sans conséquence pour le simple citoyen. Mais cela conduit à des catastrophes nationales lorsque les affirmations émanent d’un “historique”.

Votre identité et celle des Algériens

Votre concept ou notion d’identité semble suivre vos humeurs. Or, s’il est permis à un saltimbanque de modifier son origine au gré de ses spectacles, pour un président d’un État surtout s’agissant “d’une république” cela relève de la Cour suprême pour “usurpation d’identité, faux et usage de faux”.

Monsieur le président, êtes-vous monarque de droit divin pour ne pas craindre les réactions de la justice algérienne ? La question hante de nombreux citoyens de cette république que vous semblez considérer “république bananière”. Pourquoi le célibat du président actuel de l’Algérie vous pose-t-il problème puisque vous êtes le premier à avoir violé [sur ce plan] la Constitution algérienne ? S’agit-il d’erreur de votre part ou de la défense de l’intérêt supérieur de la nation algérienne? Dans les deux cas, voyons ce que dévoilent vos écrits avant votre interview dans Jeune Afrique.

En 1964, pour gouverner l’Algérie vous détaillez (5) votre état-civil ainsi que ceux de vos proches comme étant ceux d’une famille algérienne ayant subi tous les affres du système colonial appliqué aux “indigènes algériens”. En page 42, vous précisez votre statut d’indigène algérien dans l’armée française “engagé contre le fascisme hitlérien, au 5e tirailleurs marocains où je fus affecté j’étais l’unique Algérien parmi des Marocains… Bon nombre de Marocains, à ma grande surprise, ne jeûnaient pas, ils furent surpris de me voir jeûner, car ils considéraient les Algériens, parce qu’ils parlaient français, comme plus occidentalisés qu’eux-mêmes (6)”.

En 1984, vous révélez une identité arabo-islamiste qui devait vous servir à reprendre en main les circuits messalistes dans les usines et les ghettos, en Europe, pour installer votre MDA et diffuser votre propagande islamiste moyen-orientale. Cette reprise en main et la diffusion de vos idées vous furent facilitées par le pouvoir français de l’époque qui avait une revanche à prendre sur l’Algérie indépendante, comme le montrera la suite des événements.

Ainsi, sans remords et au mépris de la dignité des Algériens, qui émergeaient douloureusement de quatre siècles de dominations turque et française, vous passez du statut de président algérien au rôle de sujet marocain au service de l’internationale islamiste moyen-orientale. “Mon père, [dites-vous] est originaire de la ville de Marrakech du arch des Ouled Sidi Rahal, il a émigré en Algérie suite à une histoire de vendetta. Il appartenait à une confrérie mystique, la tariqua soufia… Ma mère était la cousine germaine de mon père (7)” Il est étonnant que vous utilisiez le terme de “arch” qui désigne une configuration sociale qui n’existe pas, telle la djemaâ, dans les monarchies islamistes. Pour réussir votre campagne de recrutement dans ces milieux d’émigrés, majoritairement natifs des régions berbérophones, vous les rassurez par cette affirmation : “Pour moi, l’arabité ne se définit pas par l’origine ethnique… Le Maghreb, par exemple, n’est pas ethniquement arabe mais berbère, alors que culturellement, il est fondamentalement arabe… L’arabité est donc bien une notion culturelle et non pas ethnique.” (Cool Affirmation qui reflète bien votre ambiguïté et qu’ils ne pourront pas relever. Combien de ces émigrés que vous aviez intégrés dans votre mouvement savaient-ils que votre ambigüité leur déniait le droit d’étudier la richesse de leur patrimoine ancestral? Vous les condamniez au feu de l’enfer s’ils s’y hasardaient : “En Algérie, [soulignez-vous] tenter de privilégier la période antéislamique, c’est succomber à des errements regrettables. Dans un écrit, je les ai fustigés en ces termes : "contrairement aux misérables élucubrations et aux contorsions du journal El Moudjahid et ses hauts commanditaires, ignorants trafiquants de l’histoire et succombant à on ne sait quelles alchimies politiques de mauvais aloi, nous sommes nés véritablement en ce jour où les premiers Algériens ont fait profession de foi … (9)"”

Monsieur le président, vos errements et vos reniements trouvent-ils leurs sources dans votre désir de revanche du fait de la perte du poste présidentiel ou dans votre “haine de soi” propre aux personnes sans références sociales d’un terroir? Quel est le ressort qui vous anime ? Vous naviguez entre une vision ethniciste digne des chercheurs racialistes du XIXe siècle qui théorisaient sur “les races supérieures devant civiliser les races inférieures”. Cette vision sectaire ne peut que nuire au vivre ensemble des Algériens, quelle que soit leur région de naissance ou d’adoption, quelle que soit leur langue et quelle que soit leur spiritualité.

À l’ère des recherches sur les neurosciences et des découvertes sur les nanotechnologies, le concept d’ethnie tel que vous le définissez et le comprenez n’a aucune valeur scientifique chez les chercheurs sérieux. Vous confondez ce qui relève de la culture dispensée par le milieu familial, régional et national surtout dans la diversité algérienne, de la religion, à savoir la foi personnelle ou l’instrumentalisation politique nationale ou internationale, la nationalité qui est acquise par le sang ou le sol suivant les codes du pays où nait la personne.

Savez-vous que les dernières découvertes archéologiques sont venues confirmer les récits oraux transmis depuis des millénaires : les Berbères sont les descendants des autochtones de l’Afrique du Nord, ils ne viennent ni du Yémen ni de Judée ou d’autres continents comme le prétendent les mystificateurs et les incultes. La Berbérie, ce n’est pas uniquement la région de Kabylie. La Berbérie se compose de différents pays : Maurétanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Siwa en Égypte, le Nord du Mali et celui du Niger. La Berbérie, comme tous les lieux du globe, s’est transformée et a subi les changements comme tous les continents : ce n’est pas une région mise sous cloche pour conservation à l’image du fromage.

Votre coreligionnaire Aït Ahmed (10), malgré son ascendance maraboutique, sait sentir l’âme des enfants du terroir algérien dont il est issu. Il relate des bribes de sa conversation lors de son entrevue avec Lahouel, avant son départ au Caire : “Moi aussi je suis Kebayl h’ider (kabyle citadin), comme tous les habitants du Nord-Constantinois”, remarque Lahouel. Je riposte : “C’est Bugeaud qui a baptisé “kabyle” la province du Djurdjura – une façon de rappeler que les Berbères sont encore victimes de ce pouvoir arbitraire de nommer, de définir, qui est issu de la conquête.”(11)

Dans les pages suivantes, il décrit avec finesse son hébergement à Saint-Mandé chez Zidi (animateur de l’AEMNA), qui “parlait l’arabe de Tébessa”. Ses rencontres avec Kabba qui “dialoguait en arabe algérois”, Filali dont le français était enrichi par des expressions de sa “langue natale de Collo”. Il rappelle que c’est l’Aurésien Ben Boulaïd qui lui a remis, à l’insu des dirigeants d’Alger, une fausse carte d’identité établie au nom de Saïd Farhi (12). Même lorsqu’il s’agit de sa vie privée, Aït Ahmed décrit précisément les difficultés à faire cohabiter les règles coutumières berbères, les règles maraboutiques locales, les règles coraniques et les désirs d’un homme du XXe siècle.

Son mariage devant être un acte simple de l’union de deux êtres se retrouve transformé en chapelet de difficultés à cause de systèmes culturels et juridiques contradictoires entre eux.

Monsieur le président, vos comportements agressifs face aux langues parlées et écrites en Algérie illustrent vos difficultés à vous définir et à accepter la différence de vos concitoyens : de votre cas particulier, vous avez fait une généralité nationale. En effet, en 1953 après un séjour clandestin à Paris, vous arrivez au Caire pour rejoindre “vos amis de l’OS”. L’affront que vous subissez et que vous détaillez en ces termes : “(…)La première fois que j’exposai devant la Ligue arabe la situation en Algérie, je dus faire mon exposé en français… Quel scandale ce fut ! Quel sacrilège ! Tandis que je parlais devant mes frères arabes, je voyais leur visage se crisper sous l’effet de la stupeur… Mais qu’y pouvais-je ? J’étais un Algérien de la masse, et la masse algérienne, plongée depuis tant de siècles dans la nuit, avait désappris la noble langue de ses origines (13)”. Cet affront est-il la cause première de votre course à l’orientalisation des Algériens dont la richesse linguistique pouvait donner des leçons de tolérance à vos interlocuteurs de 1953?

En Afrique du Nord, la “noble langue des origines” n’a jamais été la pratique linguistique moyen-orientale puisque les conquérants musulmans (14) sont arrivés au VIIe siècle. Donc, la noble langue des origines est le berbère enrichi par les apports des conquêtes d’avant et d’après l’arrivée des armées musulmanes. Savez-vous que la poignée de combattants du 1er Novembre 1954, qui ont redonné la dignité aux Algériens, étaient en majorité berbérophones et souvent analphabètes ou uniquement scolarisés à la medersa pour quelques privilégiés? Donc la “noble langue” du 1er Novembre est le berbère. Les berbérophones et les arabophones algériens, de toutes les régions d’Algérie, doivent-ils bénéficier du statut de dhimmi et par qui leur sera-t-il délivré selon vous ?

Aït Ahmed est-il votre alter ego ou votre ennemi héréditaire ?

Comme pour votre identité et celle des Algériens, vos rapports avec Aït Ahmed suivent les courbes de vos intérêts respectifs et non celles de la nation.

Été 1962, avec Boudiaf et Aït Ahmed vous comptez parmi les responsables qui se sont affrontés dans des batailles meurtrières au sujet du partage des 20% restants du “Trésor de la Fédération de France” (Wilaya 7), qui étaient estimés à 43 millions de francs suisses de l’époque. Les 80% constituèrent les finances de la Révolution [15]. Ce trésor fut collecté grâce au sang et à la sueur de milliers d’émigrés algériens travaillant et vivant en Europe. Il fut le premier acte de déchirements fraternels et de corruption [16] de l’Algérie indépendante.

En 1964, aucun d’entre vous n’aborde ce partage, car vous situez vos griefs contre Boudiaf et Krim Belkacem sur le plan politique. Dans votre chapitre [17] consacré aux lendemains de l’Indépendance, vous donnez votre version des faits sur les litiges opposant le GPRA et le Bureau politique et entre ceux que vous nommez les nationalistes modérés et les révolutionnaires progressistes : “… le GPRA, qui sentant la partie perdue pour lui, s’inclina, à l’exception de deux de ses membres, Boudiaf et Krim Belkacem. Ces derniers essayèrent de lancer un mouvement de résistance fondé sur le particularisme kabyle… particularisme hérité de l’administration coloniale française qui n’est jamais parvenue à donner un contenu politique définitif et, le moment venu, la Kabylie suivit avec élan le mouvement insurrectionnel et fournit à la Révolution algérienne quelques-uns de ses éléments les plus valables…”.

Selon cet écrit, vous placez le particularisme kabyle de Krim Belkacem sur le plan politique et vous rejoignez Aït Ahmed dans son analyse du mythe créé par l’administration coloniale.

En 1984, vous prépariez, sur les conseils des stratèges américains et sous l’égide de la diplomatie vaticane, vos nombreuses réunions avec Aït Ahmed. En guise de bonne volonté, vous rappelez à votre intervieweur, un ancien message de fraternité qui vous unissait à votre allié du moment. [Vous écrivez] : "Lors de ce qu’on a appelé ‘la révolte kabyle’ et alors qu’Aït Ahmed venait d’être arrêté, je reçus la visite inopinée d’Abd El-Hakim Amer, le Mouchir, envoyé spécialement par Nasser pour me transmettre un message. Le message verbal était : “Ahmed, disait-il en substance, fais attention, évite de verser le sang.” Le sang d’Aït Ahmed, sous-entendait-il, devait être sauvegardé. Ce message allait au-devant de mes intentions [18]." Ces réunions avaient abouti au Contrat de San Egidio de 1995, qui donnait une légitimité internationale aux ennemis du pays, les Algériens s’en souviennent.

Pour bénir et réussir votre sainte alliance ‘vous inventez un discours’ kabylo-islamiste” aussi irréel que ceux sur l’ethnie : “Dois-je rappeler [soulignez-vous par ailleurs] que ce sont des confréries soufies de Kabylie qui ont donné de grands résistants révolutionnaires… Dois-je rappeler aussi que le père de Aït Ahmed dirigeait une confrérie religieuse… L’histoire de l’islam et des Kabyles est une histoire d’épousailles réussies, définitives… Reste la question de la langue, on ne peut pas dire, en tout cas, que cette question est une affaire montée de toutes pièces de l’extérieur [19]. La population de Kabylie, comme celle de toutes les régions d’Algérie, pratique l’islam du rite malékite qui est aux antipodes des rites pratiqués par vos amis chiites et wahabbites.

Les quelques faits de guerre évoqués n’échappent pas à vos changeantes interprétations :

le 1er Novembre 1954

Monsieur le Président, dans votre interview accordée à Jeune Afrique vous abordez, d’une façon éloignée, quelques miettes de faits de guerre d’une Révolution qui a inspiré les plus grands écrivains, artistes et avocats du XXe siècle. Vos liens se sont-ils distancés à ce point pour sacrifier l’Algérie et les Algériens, amputer la mémoire d’un peuple pour diminuer votre rancœur ; est-ce musulman ?

En 1964, vous ne semblez pas atteint par les travaux des révisionnistes et la défense acharnée de vos intérêts particuliers. Donc, vous évoquez objectivement quelques-uns des facteurs qui ont préparé l’embrasement du feu libérateur de nos servitudes : “Les Messalistes rejetaient sans cesse vers l’avenir les décisions inévitables et se réfugiaient, en attendant, dans l’électoralisme… Aiguillonnés par une situation aussi désastreuse, les militants de base finirent par imposer un congrès, en 1949, à Messali et à ses acolytes. Par une ironie frappante de l’histoire, ce congrès tint ses assises dans la région contrôlée par le bachagha Boualem. Nous étions, en effet, les hôtes d’un nommé Djilali, (Kobus) qui nous reçut dans sa ferme à Ezzedine [20]”.

C’est au cours de ce congrès que vous serez désigné responsable de l’OS.
En 1982, vous modifiez vos déclarations dans l’optique de la prise en main des réseaux messalistes évoqués précédemment. De messaliste l’attentiste nous sommes sommés de vouer nos âmes et destins à l’un des pères de notre destinée : [21] “Messali, pour les Algériens, Sid El-Hadj pour nous, militants du PPA, apparaîtra comme un homme ayant une part immense dans notre destinée”. Que fait-on et que faites-vous des actes des résistants de 1954 morts au champ d’honneur avant l’Indépendance? Se sont-ils trompés en déclenchant la Révolution contre l’avis de votre père ?

Est-ce pour cela qu’en 1984 vous vous accordez un rôle que vous ne développez pas par des apports de sources écrites ou de témoignages : “Le 1er Novembre 1954 fut le fruit, [notez-vous], d’une action collective portée par tout un peuple. Plutôt que le terme de fondateur, je trouve plus juste de dire que je fus l’un des dirigeants organisateurs du 1er Novembre [22]”
Déjà en 1963, Aït Ahmed qui se situait au même grade que vous dans cette Révolution relativisait les faits d’armes de certains qui s’octroyaient responsabilités au-dessus de leurs moyens : “Certes, il y a eu des falsifications de l’histoire, il y a des vérités à rétablir, notamment au sujet des “épopées individuelles”, écrit-il. Mais ce sera l’affaire des historiens [23]

Réunion de la Soummam ou Congrès national ?

Didouche Mourad, assassiné le 18 janvier 1955 par l’armée coloniale, et Zighout Youcef avaient programmé la tenue d’un congrès national dans le Nord-Constantinois. Afin de faciliter à tous les combattants de l’intérieur et aux dirigeants de l’extérieur l’accès à ce lieu, d’autres responsables choisirent la vallée de la Soummam dont les conséquences pèsent encore sur bien des mémoires.

L’ouverture des archives en 2012 ne donnera pas beaucoup de clarté sur cet épisode de la Révolution, malgré les précautions d’usage annoncées par l’historien Mohamed Harbi. Tout acteur de la vie publique surtout en période de troubles ou de guerre sait que le feu et les broyeurs de bureau fonctionnent pour ne pas laisser de traces sur des faits ou des personnages trop marqués. Seuls les vivants peuvent nous livrer des bribes d’information à recouper pour lever un pan de notre histoire.

Ainsi, dans votre biographie de 1964, vous exposez, au sujet du Congrès de la Soummam (20 août 1956), les motivations que vous qualifiez “de graves conséquences politiques” à savoir :

- la défaite de la Bataille d’Alger : “Ils ne surent pas apprécier à leur juste valeur les rôles respectifs de la campagne et de la ville dans la conduite de la guerilla. Ils ne comprirent pas que les habitants des villes, vivant, pour ainsi dire, intégrés à l’ennemi, mêlés à lui, entourés de son énorme appareil répressif, ne pouvaient en aucun cas se soulever contre lui sans se faire aussitôt écraser et voir les réseaux démantelés, leur appareil détruit, leurs militants tués ou arrêtés… Comme on sait, elle se solda (Bataille d’Alger) pour nous par une lourde défaite qui mit à terre notre organisation urbaine et, par contrecoup, isola et affaiblit la guérilla des campagnes”.

- “Mais le grief le plus grave que je ferai aux organes de direction mis en place par le Congrès de la Soummam, c’est d’avoir laissé les wilayas sans armes, sans médicaments, sans argent. Je sais bien que les réseaux électrifiés des frontières rendaient par voie de terre la tâche plus difficile, mais il restait encore la contrebande maritime et plusieurs centaines de kilomètres de côte que la logistique de la Révolution aurait pu davantage utiliser… Tout en condamnant le “wilayisme” et ses terribles conséquences au moment de l’Indépendance, on ne dira jamais assez que la responsabilité primordiale de ces errements n’incombe pas aux wilayas elles-mêmes, qui eurent, du moins l’extraordinaire mérite de continuer la lutte dans des conditions très difficiles, mais à un appareil bureaucratique qui, tout à son action internationale et à ses rivalités de personnes, n’accordait plus assez d’attention aux combattants de base”.

En 1984, vous révélez, comme suit, d’autres éléments d’information qui, malheureusement, ne furent pas assez détaillés pour servir l’Histoire : “L’absence par exemple, de Ben Boulaïd et Didouche qui étaient morts, a été très préjudiciable. Avant notre arrestation, les membres du courant dit ‘centraliste’ du MTLD qui avaient été hostiles au déclenchement de la lutte armée et qui avaient tenté de saborder la Révolution, n’avaient alors aucune possibilité d’accéder aux organes de direction de la révolution. Or, ce congrès leur a permis de devenir membres du Conseil de la Révolution, voire membres du CCE qui constituait l’Exécutif de la Révolution… [24]”.

Ce congrès aura des conséquences plus que préjudiciables sur les dirigeants de la WI qui furent décimés, soit par l’armée coloniale, soit par “leurs frères à Tunis [25]”. Aït Ahmed aussi donne à saisir partiellement l’ambiance et quelques conséquences de ce congrès. [26] "Le frère Ben Bella, note-t-il, préconisait en effet en décembre 1956 janvier 1957, la convocation rapide d’un congrès en vue de trancher notamment le conflit de souveraineté qui l’opposait au frère Abbane Ramdane [27]. Un processus était même engagé en Tunisie où les militants avec ou sans uniforme se réunissaient pour voter des motions de défiance contre le CCE et d’opposition à la plate-forme de la Soummam. Nous étions alors à la prison de la Santé.Dans sa correspondance, Abbane dénonçait Ben Bella et annonçait l’envoi de quatre mille djounoud en Tunisie pour réduire les opposants au Congrès de la Soummam. Convoquer un congrès dans cette atmosphère de crise, en pleine guerre, nous allions droit à une catastrophe, à l’éclatement pur et simple de la Révolution. J’y étais pour ma part tout à fait opposé. “Souveraineté à l’intérieur”, “souveraineté extérieure”, “souveraineté partagée”, cela me paraissait un conflit bien fictif, la souveraineté légale continuant d’être détenue en fait pas la puissance coloniale qui nous faisait la guerre…"

L’année 1956 fut l’une des plus dangereuses pour la poursuite de la Révolution, car la puissance coloniale redoubla de férocité et elle avait renforcé ses moyens militaires et politiques, tant au plan national qu’international, pour décapiter l’organisation et arrêter le conflit en instaurant la “trêve civile” chère à Camus et à ses amis. Cette “trêve civile” que vécurent les Algériens depuis 1830 et les Palestiniens depuis 1948.

Monsieur le Président, en guise de formule de politesse, recevez cette pensée de votre ami/ennemi Aït Ahmed. "La résistance algérienne n’a pas été le fait d’un ou plusieurs chefs” sans peur et sans reproche… elle a été l’œuvre de l’ensemble des Algériens, de la nation authentique"[28].
D. D.

[1][1] Un président de la République et un ministre gardent leur titre durant toute leur vie et même si le porteur représente l’adversaire voire un ennemi, administrativement il a droit à son titre.

[2] Aujourd’hui dites-nous lequel ?

[3] Robert Merle, Ahmed Ben Bella, Gallimard, 1965, biographie rédigée en 1964 après 15 séances d’enregistrement durant 2 à 3 heures chacune.

[4] Mohamed Khalifa, Ahmed Ben Bella, entretien en arabe, éditions El-Wahda, Beyrouth, 1985 (édité en français par les éditions Maintenant d’Alger, octobre 1990.

[5] Robert Merle, ibid - p. 23 et 24.

[6] Vous précisez qu’il s’agit de Chleus et de Rifains, donc des Berbères, dont la pratique religieuse était plus dans la spiritualité avec son fond de valeur humaniste et non dans la bigoterie des formes et formules creuses.

[7] Mohamed Khalifa, ibid - p. 14/15.

[8] Mohamed Khalifa, ibid - p. 60.

[9] Mohamed Khalifa, ibid - p; 151/152.

[10] Avec qui nous n’avons aucune attache familiale ou politique.

[11] Hocine Aït Ahmed, Mémoires d’un combattant, l’esprit d’indépendance 1942-1952, éditions Messinger, 1983, p. 210.

[12] Aurèsien vivant à Batna après l’Indépendance.

[13] Robert Merle, ibid - p. 93.

[14] Les armées musulmanes étaient composées en majorité de guerriers convertis ou mercenaires perses, kurdes, égyptiens, dont les langues s’entrechoquaient autant que les lames de leurs épées. N’est-ce pas le Berbère Tarik, à la tête de ses 40 000 cavaliers nord-africains, qui dépassa Poitiers comme l’attestent des recherches universitaires françaises.

[15] Ali Haroun, la 7e Wilaya, la guerre du FLN en France 1954-1962, Seuil, 1986

[16] Djilali Hadjadj, Corruption et démocratie en Algérie, La Dispute, 1999.

[17] Robert Merle, ibid - p. 142 et 143.

[18] Mohamed Khalifa, ibid.

[19] Mohamed Khalifa, ibid - p. 181.

[20] Robert Merle, ibid - p. 77.

[21] Votre préface dans : Les mémoires de Messali Hadj, texte établi par Renaud de Rochebrune, Jean-Claude Lattès, 1982.

[22] Mohamed Khalifa, ibid - p. 151/152/163.

[23] Hocine Aït Ahmed, La guerre et l’après-guerre, éditions de Minuit, 1964, p. 165.

[24] Mohamed Khalifa, ibid - p. 174.

[25] Mohamed Larbi Madaci, Les tamiseurs de sable, Anep, 2001.

[26] Hocine Aït Ahmed, La guerre et l’après-guerre, ibid.

[27] Krim Belkacem revendique la paternité de l’engagement au sein du FLN de Abbane, à sa sortie de prison, un an avant la fin des 6 ans prononcés lors de son incarcération en 1950 avec les autres membres de l’OS. Aït Ahmed écrit en page 193 de ses mémoires : "Certes, Ramdane Abbane, pourtant cadre politique, est emprisonné et condamné, mais c’est en tant que responsable de l’OS pour la région de la Soummam, où l’ont détaché Boudiaf et Didouche… Il ne sera libéré qu’en janvier 1955. C’était Laïmèche et moi qui l’avions contacté et recruté à l’occasion d’un congé qu’il passait dans son village natal d’Azouza, près de Fort National. Il était alors secrétaire de la commune mixte de Châteaudun-du-Rummel (Chelgoum-Laïd), à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Constantine."

[28] Hocine Aït Ahmed, La guerre et l’après-guerre, ibid - p. 12.
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