Un commentaire a été apporté aujourd'hui à cette affaire par Yazid Slimani dans TSA qui a donné cette information. Le voici, intégralement.
*********************************************************************************
TSA - 9.04.2011
De nombreuses zones d’ombre l’entourent
À Annaba, l’étrange « affaire d’espionnage » en faveur de la France
Le tribunal criminel d'Annaba a condamné, jeudi 7 avril, trois Algériens à des peines de prison pour espionnage au profit de l'État français. Ces trois personnes, dont deux ex‑militaires, sont notamment accusées d'avoir pris des photos de plusieurs édifices publics stratégiques. Des services qui auraient été commandités par le consulat général de France à Annaba.
Mais cette affaire d'espionnage soulève un certains nombre de questions. En général, lorsqu'un scandale d'espionnage est révélé publiquement, il suscite une crise diplomatique entre les deux pays concernés ou au moins, des réactions officielles au plus haut niveau. Les diplomates étrangers impliqués sont expulsés et des mesures de rétorsion sont décidées de l’autre côté. Dans cette affaire, étrangement, les autorités algériennes sont restées totalement silencieuses. Côté français, bien sûr les soupçons d'espionnage ont été niés, mais l'affaire n'a pas pris de proportions importantes.
Ainsi, à l'époque où les faits ont été révélés, en juillet 2009, la France a officiellement démenti : « Nous démentons formellement toute implication de notre consulat général à Annaba dans cette affaire rapportée par la presse algérienne », avait déclaré à l'époque le porte‑parole adjoint du ministère français des Affaires étrangères dans un point presse. Aujourd'hui encore c'est le même son de cloche. Selon une source diplomatique française, « la France n'a jamais été saisie de ce dossier ».
Autre incongruité : la plupart des affaires d'espionnage sont traditionnellement jugées par des tribunaux militaires. Cette affaire à été jugée par le tribunal criminel d'Annaba. Pourquoi ? Là encore, les autorités ont gardé le silence.
Ensuite, sur le fond, les « missions » qui auraient été assignées aux « espions » sont assez étonnantes. Ils devaient notamment photographier plusieurs sites officiels ou sécuritaires : la Présidence, les ministères, des casernes… et cela avec des téléphones portables. Or, des photographies de la plupart de ces bâtiments existent déjà, ils sont même parfaitement visibles sur Internet (via le logiciel Google earth par exemple). Mieux, certains édifices pris en photo, comme les casernes, ont été construits par les Français du temps de la colonisation. On peut donc supposer qu'ils en ont des plans.
Bref, on comprend mal la nécessité pour la France de devoir « embaucher » trois Algériens pour obtenir ces photos. De plus, quel intérêt aurait la France à posséder des photos et plans de ces institutions ? Pour servir quels objectifs ?
Enfin, ce jugement, largement médiatisé, laisse penser que les services de sécurité algériens effectuent avec succès leur mission de protection de la sécurité nationale. Or, aujourd'hui, de nombreuses missions d'espionnage ont plutôt des objectifs économiques. Et sur ce plan, les services de sécurité algériens ne cessent de montrer leurs lacunes. D'importantes affaires de corruption impliquant des étrangers ont été révélées ces dernières années. Celles de l'autoroute Est‑Ouest et de la Sonatrach en sont une illustration parfaites. Elles montrent l'inefficacité de nos services de renseignements et de sécurité dans des domaines pourtant cruciaux pour le pays, sans doute plus que d'éventuelles prises de photos d'édifices publics.