Le journal El Watan consacre aujourd'hui un article aux Algériens résidant au Maroc qui ont été spoliés là-bas de leurs terres, en vertu du dahir royal du 2 mars 1973, pris sans doute par mesure logique de rétorsion. Le quotidien se demande en même temps pourquoi tous les autres étrangers touchés par des nationalisations de leurs terres ont-ils été indemnisés, mais pas les Algériens.
Il fait sienne ensuite la déclaration du secrétaire d'État auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé de la Communauté nationale à l'étranger, Halim Benatallah, intervenu sur les ondes de la chaîne III pour dire : « L'Algérie préfère agir dans un esprit de responsabilité par le canal gouvernemental, mais à l'évidence il y a de très mauvaises dispositions à dialoguer », de la part du Maroc, sous-entend-il. Le ministre a ajouté : " Ce fait n'est pas nouveau et le contentieux dure depuis des décennies ».
Examinant ces spoliations dans le détail, le journal indique qu'il s'agit là de 20 000 ha qui sont en jeu, répartis entre 273 agriculteursl. Il termine plus loin en notant qu'il y a au Maroc 7250 ressortissants algériens immatriculés auprès des divers consulats. Et dans ce nombre, 5500 sont sans emploi, etc.
Comme on peut par ailleurs le constater en relisant l'ensemble de l'article, El Watan, s'il a le mérite de rappeler l'existence d'un litige remontant à près de 40 ans avec le Maroc, semble néanmoins ne s'intéresser qu'à un seul volet du problème. Il n'a traduit ici que les souffrances des compatriotes dépossédés injustement de leurs biens. Car, il omet complètement le second volet portant sur les spoliations de l'autre partie.
S'il s'agit ici de 273 agriculteurs algériens seulement qui attendent que justice leur soit rendue, au Maroc c'est bien des milliers de malheureux épiciers et autres petits commerçants qui ont perdu à la même époque leurs fonds de commerce, leurs logements, leurs économies et peut-être aussi leurs terres en Algérie. Leur expulsion manu militari décidée un soir de 1973 s'était déroulée dans des conditions les plus inhumaines, les plus dégradantes qui n'ont en rien grandi l'Algérie sauf d'avoir donné d'elle, ce jour-là, l'image déshonorante d'un pays aux mains d'une dictature de bas étage.
Aussi, si défense il doit y avoir des intérêts de nos compatriotes spoliés, il est juste de réclamer aussi l'indemnisation de ces milliers de commerçants marocains jetés sans le sou dans les trains et dispersés ensuite à la frontière marocaine, à la recherche d'un gîte et d'une pitance hypothétique. Il ne faut surtout pas perdre de vue que ces gens-là étaient nés en Algérie où ils avaient vécu et travaillé durant de longues générations et qu'ils ne connaissaient donc du Maroc que de lointains liens ne pouvant en rien soulager leur détresse d'alors.