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 La politique algérienne de Sarkozy vue par Georges Labica

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Oussan

Oussan


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Date d'inscription : 05/04/2007

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MessageSujet: La politique algérienne de Sarkozy vue par Georges Labica   La politique algérienne de Sarkozy vue par Georges Labica EmptyMar 27 Nov - 18:30

Interview accordée par le philosophe français Georges Labica au journal arabophone algérien « El Khabar », et publiée dans son édition du 25.11.07, sous le titre "Il n'y a pas grand-chose à attendre de Sarkozy."
Mais avant d'aller plus loin, jetons un coup d'oeil sur la biographie de cet éminent philosophe, ami de l'Algérie, qui s'était tant démarqué de la ligne ambiante de ses confrères durant la guerre d'Algérie :

Georges Labica (Toulon/France, 1930). Philosophe ; Docteur en Histoire de la philosophie (1967) ; Docteur ès-lettres (philosophie) (1976) ; Professeur émérite des Universités (Paris-X - Nanterre) ; Directeur honoraire au Centre national de la recherche scientifique ; Professeur honoraire de l'Université du Peuple de Pékin. Spécialiste de philosophie politique, notamment en Histoire de la théorie marxiste.
Militant anti-colonialiste et anti-impérialiste : Algérie, Viet-Nam, Palestine, Irak. Président honoraire du Comité de vigilance pour une paix réelle au Proche-Orient (CVPR-PO), Président de résistance démocratique internationale ; membre de l'Appel franco-arabe, du Forum des alternatives et de En Defensa de la Humanidad
.

La politique algérienne de Sarkozy vue par Georges Labica Files_11Le philosophe français Georges Labica s’est dit pessimiste, quant à l’avenir des relations Algéro-françaises. Il a souligné que les positions du président français, Nicolas Sarkozy, contribuent à la détérioration de ces mêmes relations.

El Khabar : L’Algérie et la France voulaient signer un traité d’amitié, mais ce traité n’est plus à l’ordre du jour. Quelles sont, selon vous, les véritables causes qui ont conduit à ce constat ?

Labica : La façon dont a surgi l’idée d’un traité d’amitié entre la France et l’Algérie ne m’a pas semblé répondre à l’aboutissement d’une maturation politique, qui aurait prétendu établir enfin le bilan d’un demi-siècle de relations confuses et contradictoires, initiées par une guerre coloniale particulièrement dévastatrice. Au contraire, la proposition obéissait, de part et d’autre, à des préoccupations conjoncturelles, fort éloignées des clarifications historiques dont le besoin se fait toujours sentir. Du côté français, il s’agissait, vraisemblablement, de tenter de rattraper le retard pris sur les Etats-Unis en matière d’accords économiques et de contrôle du marché algérien, concernant au premier chef le pétrole et le gaz. On était prêt, à cette fin, à tirer un trait, à la fois sur les contentieux du passé et ceux de l’actualité (immigration, racisme et arabophobie). Il suffit de rappeler le temps considérable qu’avait pris la reconnaissance d’une guerre où l’on n’évoquait que «pacification» et « événements », ainsi que le débat, récent celui-là, suscité par le projet d’une loi consignant dans les manuels d’histoire, destinés aux écoliers, les effets «positifs» de la colonisation. Du côté algérien, la dénonciation des hypocrisies d’une telle attitude et, par voie de conséquence, le rejet du traité s’avéraient tout à fait légitimes ; mais on pouvait également penser qu’elles n’étaient pas indépendantes de la stratégie du président, alors favorable aux intérêts états-uniens.

El Khabar : Le président Sarkozy prévoit une visite d’Etat en Algérie en décembre. Comment voyez-vous cette deuxième visite, depuis son élection ? La première visite de Sarkozy a été un échec, et n’a abouti à aucun résultat positif, surtout que les propos tenus par le président français avaient choqué plus d’un. Peut-on considérer cela comme une maladresse ? ou bien la qualifieriez-vous de style « SARKO » ?

Labica : Je crains que la seconde visite de l’actuel Chef d’Etat français, en réalité la troisième en comptant celle du ministre de l’Intérieur qu’il était, ne connaisse pas plus de succès que la première. Sans doute ses motivations, qu’il s’agisse d’un rapprochement jugé nécessaire pour la reprise des affaires ou d’intérêts stratégiques, sont-elles semblables. Elles n’en sont pas moins plombées par une attitude de principe plus hostile qu’amicale. Il suffit d’évoquer son discours de Dakar, dont les considérants paternalistes et coloniaux, qui révélaient le mépris de l’Africain, avaient suscité une juste indignation bien au-delà du Sénégal, ou son appui déclaré à la politique marocaine envers le Sahara occidental, ou encore ses proclamations réitérées d’inféodation aux USA et à Israël, émaillées de propos islamophobes, pour dissiper tout doute quant aux intentions du personnage. La maladresse n’y a nulle part. Quant au « style », il ne consiste guère qu’à dissimuler sous des gesticulations frénétiques, une solide détermination réactionnaire.

El Khabar : Etes-vous optimiste, quant à l’avenir des relations entre l’Algérie et la France ?

Labica : Dans l’état actuel des choses, ma réponse est négative. S’il est vrai que la politique algérienne a désormais pris ses distances avec les USA, en limitant les ambitions monopolistiques de groupes, tels Halliburton, et en refusant l’installation d’une base militaire au Sahara (Africom), alors qu’il avait pu lui être reproché d’excessives concessions antérieures, consistant, aux dires d’un ancien dirigeant de la Sonatrach, en un « véritable abandon de la souveraineté nationale », au profit d’une « dérive ultralibérale incontrôlée », les conditions d’un rapprochement avec la France, ne sont pas réunies. En effet, du côté du pouvoir issu des élections présidentielles d’il y a six mois, il n’y a pas grand-chose à attendre, comme je viens de le dire. J’ajoute que la page est tournée de ce qui subsistait encore d’une « politique arabe », défendue par le président Chirac, dont le voyage en Palestine était resté mémorable. Son successeur ne se réclame du gaullisme, comme il le fait de l’exemple du jeune résistant communiste Guy Mocquet, fusillé par les nazis, que de manière démagogique, par pur effet de tribune.

El Khabar : Sarkozy parle de regarder vers l’avenir et oublier le passé. Est-ce possible ?

Labica : S’il s’agit du sien, riche famille de féodalité magyare, contrainte à l’émigration au moment de la victoire alliée en 1945, cela peut se comprendre. Quant au reste, la phraséologie opère à géométrie variable : on raye ce qui gêne, la guerre d’Algérie, par exemple, et on fait, au nom d’une « vieille amitié », l’apologie de « ces soldats américains qui nous ont libérés », - en oubliant au passage l’Armée rouge qui avait cependant accompli l’essentiel de la besogne. Notons qu’il est d’ailleurs de mode aujourd’hui, et pas seulement en Europe, de célébrer un « devoir de mémoire », à caractère singulièrement sélectif ! Et l’avenir, en l’occurrence, pour « Sidi Nicolas », ce serait quoi ? Le pétrole ? L’ouverture au camembert du marché algérien ? Le contrôle de l’immigration, grâce au double dispositif d’expulsion des « terroristes » en puissance et de la capture des cerveaux utiles ?

El Khabar : Le président français a déclaré que les enfants ne sont pas responsables des actes commis par leur père. Ne voyez-vous pas là une politique de deux poids deux mesures, alors que la France avait réclamé et réclame toujours que les Turcs reconnaissent le génocide arménien ?

Labica : Bien sûr que les enfants ne sont pas responsables des actes commis par leurs parents ! J’ajoute, s’agissant de la lutte de libération algérienne, que les enfants en question ont été jalousement tenus dans l’ignorance. Il m’arrivait assez souvent, au début de mes cours à l’université, de demander aux étudiants ce que leurs parents, et leur père surtout s’il l’avait faite, leur avaient raconté de la guerre. Réponse la plus fréquente : rien. Parfois ils ne savaient même pas que leur famille avait été concernée. Entre les culpabilités individuelles et les censures officielles (voir la longue indigence du cinéma), relayées par un renouveau du racisme anti-maghrébin, l’oubli fermait l’histoire à clef. On imagine le sacré travail de mémoire qu’il aurait fallu et qu’il faut encore entreprendre. Par contre, le tri fonctionne ici aussi. La conscience morale, qui sert, en sous-main, à retarder l’entrée de la Turquie dans l’Europe, pousse des hauts cris, concernant le « génocide arménien ». Mais elle est bien muette devant celui du Rwanda, où la France est impliquée. Alors, l’Algérie…

El Khabar : Nicolas Sarkozy parle de son nouveau projet d’union méditerranéenne. Comment voyez-vous ce projet annoncé, surtout que les autres pays européens paraissent mitigés à ce sujet, de même que les pays du Maghreb arabe ? Israël, selon vous, sera-t-il appelé à y jouer aussi un rôle ?

Labica
: Pour moi, ce projet est un très vieux rêve, qui remonte au temps des guerres de libération, quand on aspirait à la création d’un grand Maghreb, qui aurait inclus l’Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Libye. Encore au-delà, l’union des nations de la Méditerranée me paraît répondre à une véritable nécessité géopolitique, obéissant elle-même à plusieurs ordres de raisons, que j’énumère brièvement : d’abord l’histoire, qui n’englobe pas uniquement les cultures, religions incluses, mais également, les manières de vivre, les coutumes, la cuisine, les comportements et les goûts ; ensuite, sur ces bases, les complémentarités économiques de productions et d’échanges, qui pourraient faire pièce à cette Union européenne d’hégémonie voracement capitaliste et belliciste (OTAN) ; enfin, la possibilité de réduire et d’éliminer l’impérialisme US sur la mare nostrum (notre mer). Or, on peut tenir pour assuré qu’une telle ambition se situe aux antipodes du projet sarkozien, qui usurpe frauduleusement son prestige, pour faire passer, en l’absence de dispositions concrètes, quelques arrière-pensées au service d’un leadership européen et sans doute d’une position prédominante d’Israël, autrement dit d’une recolonisation, sans exclure l’appui qui pourrait être apporté à l’entreprise US sur le Proche et le Moyen Orient, l’Iran étant plus particulièrement visé.

El Khabar : Comment voyez-vous le rapprochement franco-américain, partant de l'idée que vous avez toujours soutenue d'un « Sarko » homme des Américains ?

Labica : Ses fidèles eux-mêmes nomment Sarkozy « l’Américain ». Ce n’est ni une boutade, ni un sobriquet, mais bien la réalité d’un engagement constamment rappelé par l’intéressé. Il a passé ses premières vacances de président, non pas dans l’une des résidences réservées aux chefs d’Etat français sur le territoire national, mais aux USA, auprès de son ami Bush. On sait que les déclarations d’allégeance qu’il multiplie envers ce dernier se confondent, en bonne logique, avec celles qu’il réserve à Israël. A l’occasion de son dernier voyage officiel outre-Atlantique, il a emmené dans ses bagages, aux côtés de ministres et de grands patrons, Richard Prasquier, nouveau président du CRIF, organe du tout puissant lobby sioniste, et dont la présence n’a curieusement pas été signalée par les journalistes les plus influents (et les plus serviles). Quel paradoxe de constater que cette soumission intervient au moment précis où ledit Bush se voit disqualifié dans son propre pays et subit des défaites sur les terrains mêmes qu’il avait choisi de dominer : Afghanistan, Irak, Liban. On ne s’avancera pas beaucoup en assurant que nombre de Français ne partagent pas ces engagements.

El Khabar : La situation en France commence à bouger surtout avec les grèves. Pensez-vous que Sarkozy ait sous-estimé la réaction de la rue, à propos de ses réformes ?

Labica : Les effets de la gueule de bois qui avait saisi une majorité (seulement électorale) de citoyens du « pays des Droits de l’Homme », semblent se dissiper au bout d’à peine six mois. Revendications, mécontentements et colères, provoqués par les promesses non tenues, les mensonges et les pitreries, en sont venus à concerner les secteurs les plus divers de la population et à susciter des manifestations allant jusqu’aux grèves : cheminots, gaziers, électriciens, marins pêcheurs, postiers, enseignants, étudiants, lycéens, infirmières, internes des hôpitaux, journalistes, mais aussi, artistes lyriques, buralistes, restaurateurs, avocats, magistrats, gendarmes et policiers. Que peut-on en penser, en écartant toute prophétie ? Plusieurs scénarios se présentent. Il sera a priori fort difficile, compte tenu de la faiblesse et du réformisme syndical majoritaire, de regrouper les disparités revendicatives en un mouvement unique. Or, coupés les uns des autres, les groupes sociaux sont menacés de subir le sort des Curiace de la légende, qu’ils soient défaits par l’obtention de quelques carottes ou par leur isolement. Il se peut aussi que le gouvernement, qui s’est engagé à ne pas céder, impose l’épreuve de force à telle catégorie, les cheminots par exemple, et, prenant le prétexte d’une revendication catégorielle, peu soutenue par l’opinion, telle les régimes spéciaux de retraites, parvienne à faire adopter son programme libéral de réformes qui en finira avec l’ensemble des acquis sociaux et pèsera sur l’exigence commune du pouvoir d’achat. L’aggravation continuelle des inégalités de toutes sortes et les difficultés existentielles s’étendant à des couches sociales jusque-là épargnées n’en préparent pas moins les nouvelles étapes de la contestation.

Entretien réalisé par Kamel Zait
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