Le père et le fils Pasqua rattrapés par la justice

On savait le père enfoncé jusqu’au cou, à propos des détournements de fonds opérés du temps où il exerçait ses fonctions de ministre de l’Intérieur. Il aurait mis main basse sur de l'argent provenant des ventes d’équipements de police à l’étranger réalisées par la Société Sofremi, une entreprise dépendant du ministère de l’Intérieur.

C’est maintenant le fils, Pierre, qui est sur la sellette. Poursuivi au même titre que les Libanais Iskandar et Akram Safa, Pierre Falcone ou Nicolas Maroslavac, pour détournements de fonds commis entre 1993 et 1995, le fils Pasqua doit répondre également devant la Cour d’appel de Paris des dessous-de-table perçus d’Alsthom en 1994. Pour répondre de ces deux affaires qui seront citées en audience les 8 et 4 octobre prochain, Pierre Pasqua vient de rentrer à Paris, venant de Tunisie. Immédiatement interpellé par les policiers à sa descente d’avion, ce dernier qui se trouvait, depuis 2006, sous le coup d’un mandat d’arrêt international, a été aussitôt incarcéré.

Les malversations du fils auraient eu, semble-t-il, pour objectif de venir en aide aux activités financières du père. Ce dernier, mis en examen depuis 2004, devra répondre, le moment venu, des délits qui lui sont reprochés devant la Cour de Justice de la République, seule juridiction habilitée à le juger comme ancien ministre.

Comme disait Boumediene : "Ce n'est pas si simple que de ne pas mettre le doigt dans la miel quand il est à portée de la main."

C'est bien aujourd'hui que le fils Pasqua, Pierre-Philippe, doit comparaître, au côté de 8 autres inculpés, proches de l'ex ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, devant le tribunal correctionnel de Paris, pour répondre des poursuites exercées contre eux pour détournements de fonds au préjudice de la Sofrémi.

C'est par le canal de cette entreprise, la Société française d'exportation de matériels, systèmes et services, placée sous la tutelle du ministère de l'Intérieur français, que des contrats, assortis de commissions occultes partagées par les neuf inculpés, avaient été, du temps de Pasqua, signés avec des pays étrangers, notamment africains, pour leur vendre des équipements de police.

Pierre Pasqua est accusé d'avoir perçu 1.5 million d'euros de commissions occultes de la Sofremi, cette entreprise spécialisée dans la vente du matériel de police placée sous la tutelle du ministère français de l'Intérieur, du temps où Charles Pasqua, son père, était en poste précisément à la tête de ce département.

Le procureur a demandé 3 ans d'emprisonnement, dont un avec sursis, et 300 000 euros d'amende, à l'issue d'un réquisitoire sévère, où il déclare, selon une dépêche AFP : "Pierre-Philippe Pasqua n'a pas perçu de l'argent pour ses efforts. Il ne s'est enrichi que du seul fait de sa filiation, d'une solidarité familiale injuste. C'est une honte pour la République française."

Contre Bernard Guillet, ancien conseiller diplomatique de Charles Pasqua et interlocuteur de la Sofremi, 18 mois de prison, dont six avec sursis, et 100 000 euros d'amende ont été requis. Il avait perçu 600 000 FF ayant servi à l'achat d'une maison.

Quand à Pierre Falcone, l'autre accusé, ayant servi de rabatteur au tandem Pasqua, il encourt 3 années d'emprisonnement, dont deux avec sursis, et 375 000 euros d'amende.

En revanche, Pierre Marchiani, ex préfet du Var, devrait s'en tirer avec une relaxe, l'accusation s'étant rendue compte que les commissions perçues par lui rémunéraient un vrai travail personnel fourni.

En attendant les plaidoieres des avocats, prévues pour mercredi, et le délibéré final, le 24 octobre, l'instruction contre Charles Pasqua se poursuit devant la Cour de justice de la République.

Le fils Pasqua a finalement écopé, en appel, de deux ans d'emprisonnement dont un ferme et à 300 000 euros d'amende, dans l'affaire des pots-de-vin perçus en 1994 de la société Alsthom.

Il avait été relaxé en première instance en janvier 2006, mais le parquet avait fait appel.

Le condamné ne se trouvait même pas à l'audience lors du prononcé du verdict, ayant fait savoir, par l'un de ses avocats, qu'il ferait à son tour appel de ce dernier jugement.

Une nouvelle condamnation du fils Pasqua, pour recel d'abus de biens sociaux aux dépens de la Sofrémi, a été infligée à hauteur de deux ans de prison, dont six mois avec sursis, en sus d'une amende de 300 000 euros.

Pierre Pasqua a été reconnu coupable d'avoir détourné la somme de 36 millions de francs, avec la complicité plus ou moins déclarée de son père, par le truchement de marchés conclus avec la Colombie, l'Argentine, le Brésil et le Koweit. Le père Pasqua reste, lui, poursuivi devant la Cour de justice de la République, depuis octobre 2004.

Pierre Pasqua ne s'est livré que tout récemment à la justice, ayant préféré durant sept ans vivre en exil en Tunisie.

Contre Pierre Falcone, également impliqué dans la même affaire dont les faits remontent à 93/95, époque où le père Pasqua était investi des fonctions de ministre de l'Intérieur, une peine d'un an de prison ferme, assortie d'une amende d'égal montant, a été enfin retenue.

Pour la première fois, l'ancien ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, 80 ans, a été condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis pour usage de faux et financement illégal de sa campagne électorale de 1999.

Le tribunal correctionnel de Paris, qui l'a jugé, a estimé qu'il avait touché 7,5 millions de francs pour sa campagne électorale, fonds provenant de la vente du casino d'Annemasse qui, en dépit d'un avis défavorable de la Commission supervisant les jeux, avait été rouvert sous ses ordres, du temps où il était membre du gouvernement.

L'autorisation de réouverture avait profité alors à l'un de ses proches, Robert Feliciaggi, qui serait assassiné en 2006, et à son associé Michel Tomi. Et c'est des mains de la fille de ce dernier, Marthe Mondoloni, que Pasqua recevrait, à la vente du casino, le montant précité.

L'affaire n'est pour l'instant pas close, l'avocat du condamné déclarant se pourvoir en Cassation.