A la suite d'un article consacré au dépérissement de tamazight, publié dans http://aokas.net, j'ai ajouté, aujourd'hui même, le commentaire suivant qui peut trouver place ici, tant le sujet est d'actualité.
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Nous sommes tous responsables de cette mort lente qui est l'état désespéré et bien déplorable de notre langue.
Nos aïeux, des millénaires durant, qui ont fait tant de sacrifices pour la maintenir en vie de façon particulièrement remarquable - n'oublions pas qu'elle reste orale -, nous l'ont léguée complète et parfaitement utilisable. Qu'en avons-nous fait, depuis l'indépendance ? et c'est bien pitoyable de le reconnaître : une langue à la remorque de l'arabe, langue, pourtant d'emprunt qui nous détache totalement de nos racines, que lui préfère, par notre seule faute, notre propre progéniture dans la rue, les villages et les foyers domestiques. L'Etat, bien sûr, s'est mis en devoir, dès l'indépendance, de "redonner" à l'arabe la place qu'il croit toujours être la sienne, et ce, au détriment du berbère qui se perd tout à fait par ailleurs, hors de Kabylie.
Assistant, en 2002, à un séminaire sur le tamazight, tenu à Boumerdès, à l'initiative du Haut conseil à l'amazighité, j'ai été personnellement frappé de stupeur d'entendre le rapport accablant de cet organisme. Depuis 1996, où la langue berbère a été introduite dans les écoles, le nombre de wilayas, d'écoles et d'élèves qui l'enseignent ou l'apprennent décrit une courbe étonnamment descendante signifiant tout simplement notre détachement de plus en plus affirmé pour ce legs millénaire. Un chiffre, révélateur de notre démission pour ne pas dire hypocrisie, avait été alors prononcé : moins de deux cent cinquante élèves étaient, à cette date, inscrits au cours du tamazight, dans la capitale. Or, à ce séminaire consacré précisément à la recherche de solutions idoines pour endiguer une telle désaffection que l'on estimait, à juste titre, très préoccupante, il y avait pourtant bien plus de militants se déclarant soutiens convaincus du tamazight.
Parce que nous refusons, encore une fois, d'assumer nos responsabilités, il est à craindre que les générations futures nous reprochent cette même et grave cécité qui, hier, a frappé nos aînés, en souscrivant unanimement à la Constituante instituant l'arabe langue unique, nationale et officielle. Il est vrai que ces derniers, pour la plupart incultes et fraîchement sortis du maquis, étaient loin de se douter des conséquences incommensurables de leur geste irréfléchi.
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