Ces scandales qui ont terni l'image du roi d'Espagne
Lefigaro.fr - 02/06/2014
En janvier dernier, 62% des Espagnols réclamaient son abdication.Les frasques de son gendre, la mise en examen de sa fille, ses comptes en Suisse... Les scandales à répétition ont éclaboussé l'image du souverain, qui va céder le trône à son fils Felipe.
Juan Carlos a enfin mis un terme à plusieurs mois de rumeurs. Comme le réclamaient 62% des Espagnols dans un sondage en janvier, le roi d'Espagne va céder le trône à son fils Felipe. Outre ses problèmes de santé, les scandales à répétition ont eu raison du souverain, dont l'impopularité n'a cessé de progresser ces derniers mois. En janvier dernier, l'inculpation de sa fille, l'infante Cristina, pour fraude fiscale et blanchiment de capitaux présumés porte un coup dur à l'image de la monarchie. C'est la première fois qu'un membre direct de la famille royale est touché par une enquête pour corruption.
Les ennuis judiciaires commencent en 2010, quand le juge d'instruction José Castro, du tribunal de Palma de Majorque, aux Baléares, enquête sur une affaire visant Iñaki Urdangarin, le gendre du roi et l'époux de sa cadette Cristina. Le scandale éclate en 2011, lorsque ce dernier est mis en examen. Cet ancien champion olympique est soupçonné d'avoir détourné de l'argent public avec son ex-associé Diego Torres. Les deux hommes auraient capté près de 6,1 millions d'euros via l'institut
Noos, une fondation à but non lucratif que préside le gendre et dont Cristina est porte-parole. Dans le détail, cette entreprise récoltait les subventions d'administrations publiques ou de grandes entreprises et leur vendait à prix d'or des pseudo-rapports et conseils.
La fille du roi potentiellement mêlée à une affaire de corruptionD'autres sociétés seraient également impliquées dans cette affaire: c'est notamment le cas de l'entreprise
Aizoon, détenue pour moitié par les deux époux et qui aurait servi de société écran par laquelle auraient transité les sommes détournées. Cette entreprise facturait à des prix exorbitants des services inexistants ou invérifiables, théoriquement rendus à
Noos. Elle permettait également de couvrir les dépenses personnelles du couple, retrouvées sur le compte de la société: 700 euros de cours de salsa et de merengue, 1741 euros de vaisselle, 15.210 euros pour un voyage au Brésil ou encore 7850 euros de cours particuliers. À cela s'ajoute l'embauche de personnes en situation irrégulière, employées comme domestiques, mais payées au noir et déclarées comme « prestataires » d'
Aizoon.
Au printemps 2012, la fille du roi est mise en examen pour trafic d'influence, mais cette décision est annulée suite à un premier recours du Parquet qui avait jugé les indices insuffisants. Déterminé, le juge ouvre un autre volet de l'enquête, cherchant à établir si la fille du roi avait des liens avec les activités frauduleuses présumées de son époux, dont elle ne veut pas divorcer. Elle est inculpée en janvier dernier et entendue par la justice en février.
La découverte de ses comptes en Suisse passe malParallèlement, des révélations sur la fortune reçue en héritage par Juan Carlos et déposée sur des comptes en Suisse viennent encore ternir l'image du monarque, qui s'est toujours présenté sans fortune. Selon des documents publiés par le quotidien espagnol
El Mundo l'an dernier, le père de Juan Carlos aurait laissé une petite fortune à sa mort en 1993: 729 millions de pesetas (soit, compte tenu de l'inflation, quelque 7,85 millions d'euros actuels), déposés sur trois comptes en Suisse, ainsi qu'un patrimoine immobilier estimé à 3,8 millions d'euros. Le roi en aurait perçu la moitié. Cette découverte passe mal dans l'opinion publique.
Juan Carlos a pourtant longtemps bénéficié d'une image positive auprès des Espagnols. Il a notamment été apprécié pour le rôle qu'il a eu dans la transition démocratique, après la mort de Franco en 1975. Aujourd'hui, la nouvelle génération n'a plus cette mémoire du rôle primordial qu'il a pu jouer et ne lui épargne aucun excès.
« La tolérance est moindre pour les caprices royaux »Son image a commencé à se dégrader avec l'épisode de la chasse à l'éléphant au Botswana. À partir de ce moment-là, les Espagnols reprochent à la famille royale de mépriser les inquiétudes de la population, confrontée de plein fouet à la crise économique et bancaire. Laurence Debray, biographe de Juan Carlos, l'expliquait au
Figaro en février dernier: «
Quand un jeune sur deux est au chômage, que les gens sont expulsés de leur maison parce qu'ils ne peuvent plus en payer les traites, que le gel des salaires est imposé dans la fonction publique, la tolérance est moindre pour les caprices royaux… ».
(http://www.lefigaro.fr/international/2014/06/02/01003-20140602ARTFIG00180-ces-scandales-qui-ont-terni-l-image-du-roi-d-espagne.php)