Francetv.info - 28.05.2014
par Salomé Legrand
Abus de bien social ? Détournement de fonds ? Faux et usage de faux ? Francetv info revient sur les délits possibles et les sanctions judiciaires qui menacent les principaux protagonistes de cette affaire embarrassante pour l'UMP.
Politiquement, ils sont nombreux à risquer la traversée du désert, voire à songer à une reconversion. Côté justice, tout est possible. Dans l'affaire Bygmalion, le parquet de Paris a ouvert début mars une enquête préliminaire pour "faux", "abus de biens sociaux" et "abus de confiance". Mais après les accusations de l'avocat de la société de communication et les déclarations de Jérôme Lavrilleux, la justice pourrait explorer d'autres pistes.
Si ce n'est ce "Copé boy", ancien directeur de campagne adjoint de Nicolas Sarkozy et directeur de cabinet de l'ex-patron de l'UMP, personne au sein du parti ne reconnait avoir été au courant. Et tous sont présumés innocents. Les juges ont commencé à entendre les différentes personnalités qui ont joué un rôle dans la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012. Objectif : déterminer qui était au courant de quoi. Francetv info revient sur les délits possibles et les peines encourues.
Financement illégal de campagne
L'accusation la plus légère concerne le non-respect du code électoral concernant les comptes de campagne, dont certaines dépenses auraient été retirées ou minorées, et le plafond dépassé. "La loi autorise un parti politique à prendre en charge les dépenses de communication d’un candidat, mais à la condition que ces dépenses apparaissent dans le compte de campagne, ce qui semble ne pas avoir été le cas dans l'exemple qui nous occupe", explique Jean-Christophe Ménard, avocat au barreau de Paris, spécialiste du financement de la vie politique interrogé par Le Nouvels Obs. Il s'agirait donc de financement illégal par une personne morale.
Sanction : Jusqu'à 3 750 euros d'amende et un an de prison.
Favoritisme et détournement de fonds
Le favoritisme est défini par le Code pénal comme "le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique (...), de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié". En l'occurrence, selon Le Point et Le Canard enchaîné, la plupart des nombreux marchés passés entre l'UMP et la filiale de Bygmalion, Event & Cie, société tenue par deux amis de Jean-François Copé alors, l'auraient été sans appel d'offres.
Sanction : Jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende
Faux et usage de faux
"Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support", indique le Code pénal. Sont notamment visées les fausses factures qu'aurait éditées Event & Cie pour des conventions fantômes ou des prestations réelles dont le montant a été gonflé, parfois jusqu'à 30 fois.
Sanction : Jusqu'à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. De plus, le faux commis dans un document délivré par une administration publique est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
Usurpation d'identité
C'est le motif pour lequel le député UMP Pierre Lellouche a porté plainte. Son nom a été associé à une conférence organisée en mai 2012 et facturée près de 300 000 euros à l'UMP. Il n'en a aucun souvenir alors que son nom a été inscrit sur la facture.
Sanction : Jusqu'à un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende.
Abus de confiance
"On a abusé de ma confiance." L'expression revient tant chez Jean-François Copé que chez les responsables UMP éclaboussés par le scandale ou leurs soutiens. Selon le Code pénal, "l'abus de confiance est le fait pour une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a accepté(s) à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé".
En l'occurrence, cela pourrait concerner les subventions de l'État à l'UMP ainsi que les dons des adhérents et sympathisants, qui doivent exclusivement servir à financer les activités (réelles) du parti ou sa campagne en étant déclarés. Ils auraient été détournés par les personnes au courant des fausses factures d'Event & Cie, tant côté UMP que côté Bygmalion.
Sanction : Jusqu'à trois ans de prison et 375 000 euros d'amende. Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende lorsque l'abus de confiance est réalisé par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou au préjudice d'une association qui fait appel au public à des fins d'entraide humanitaire ou sociale.
Abus de bien social
Dans le Code du commerce, l'abus de bien social est défini - entre autres - comme "le fait, pour toute personne, de faire attribuer frauduleusement à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle". Mais aussi "le fait, pour les gérants (...) de présenter aux associés des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice". Et enfin, "le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement".
Sanction : Jusqu'à cinq ans de prison et 375 000 euros d’amende. Outre ces peines, le tribunal peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, dans les cas prévus au présent article, l'interdiction des droits civiques et civils.
(http://www.francetvinfo.fr/politique/affaire-cope/que-risquent-ceux-qui-sont-meles-a-l-affaire-bygmalion_609917.html)