Le feu a été mis quasiment aux poudres, à Beyrouth, depuis que la coalition, dite du 24 mars, au pouvoir, soutenue par les USA, la Grande Bretagne et la France, a demandé, sans l’aval du Parlement, puis obtenu du Conseil de sécurité une résolution en faveur de la mise en place d’un tribunal devant élucider le meurtre de l’ancien Premier ministre, Hariri.
Par-delà les déchaînements de violence regrettables qui ont suivi, entre l’armée libanaise et le mouvement du Fatah-el-Islam, retranché dans le camp palestinien du Nahr al-Bared, se pose la question de savoir à qui profite, réellement, la situation désastreuse nouvellement créée.
Serait-ce, vraiment, le régime de Bachar-el-Assad, de Syrie, placé de longue date déjà dans le collimateur à la fois du fils Hariri et de ses amis, d’un côté, et des Etats-Unis, principalement, de l’autre ? Rappelons-nous que, pour des raisons encore vagues et non justifiées à ce jour, les services secrets syriens ont été formellement désignés du doigt par les proches du défunt, juste après l’attentat meurtrier. Poussant plus loin leurs accusations, ces derniers, du reste, n’ont pas hésité à s’en prendre même au président de la République, soupçonné de collusion avec Damas.
Sinon, serait-ce les Etats-Unis, dont chacun sait tout le mépris - ou peut-être la haine -, porté par Bush et son équipe à l’endroit du régime syrien ? Non pas à cause de son caractère totalitaire et anti-démocratique – la Syrie est pour l’instant le premier pays arabe où les rênes de l’Etat dit républicain échoient pour la première fois entre les mains d’un descendant, hors de toute consultation populaire -, mais surtout d’une prétendue aide apportée au terrorisme islamiste sévissant en Irak, Damas fait partie de « l’axe du mal », tel que défini par G.W. Bush. A ce seul titre, et n’en déplaise à tous ceux - et ils sont nombreux -, qui braquent leur regard du côté de Ryad, Damas doit être combattu et réduit définitivement au silence, même si les preuves appuyant semblable accusation restent encore à fournir.
A côté de ces deux pays, on semble naturellement oublier qu’un autre a davantage intérêt à déstabiliser non seulement le Liban mais tout le Moyen Orient. C’est, bien sûr, Israël, dont tout le monde feint d’ignorer la réalité des objectifs qui l’animent, l’expansion régionale sans laquelle il ne saurait plus vivre dans le réduit qui est le sien. Il en a pourtant apporté les preuves cinglantes, à travers l’occupation des territoires conquis en 1967, la colonisation de nouveaux enlevés à l’autorité palestinienne. Sa propre agression, d’il y a un an, au Liban, ne rappelle-t-elle d’ailleurs pas qu’il y est toujours, dans le but notamment de défendre les sources aquifères qui l’alimentent ? Ses manigances d’aujourd’hui, voire, plus gravement encore, sa complicité directe dans le projet concocté conjointement avec les USA de vitrifier l’Iran, ne suffisent-elles donc pas à faire ouvrir les yeux sur le danger qu’il nourrit de faire imploser l’ensemble des divers Etats pétroliers de la région ?
Les Libanais font apparemment fausse route, d’autant qu’on prête, par ailleurs, plus sérieusement à Israël la paternité de l’assassinat de Hariri, de chercher en Syrie les meurtriers de leur ancien Premier ministre. Ils devront de toute manière déchanter et faire machine arrière, sitôt que, placés face au mur, en l’absence de preuves tangibles incriminant Damas, ils se trouveront réduits à quia.
Portail 