Le Point.fr - 07/04/2012
Propos recueillis par Mérième Alaoui
Alors que 13 membres du groupuscule islamiste ont été mis en examen, un ancien a accepté de témoigner.Mohammed Achamlane, leader de Forsane AlizzaSamir(*) a fait partie de
Forsane Alizza, un groupuscule dont des membres ont été arrêtés au lendemain de l'affaire Merah lors d'un coup de filet national. Treize membres ont été mis en examen et neuf écroués. Réfugié à l'étranger, Samir nous dévoile l'organisation de cette association.
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Le Point.fr :
Pourquoi avez-vous quitté Forsane Alizza (Les cavaliers de la fierté) ?-
Samir : Disons que j'ai senti les choses venir... C'était un peu avant la dissolution de l'association (le 29 février, NDLR) par Claude Guéant. On partait dans tous les sens et je ne faisais plus vraiment confiance à notre leader, Abou Hamza (Mohammed Achamlane, appelé aussi Abou Hamza ou Cortex. Il a été mis en examen et écroué pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et acquisition d'armes, NDLR). Il n'avait pas de sérieuses références spirituelles et philosophiques... Il recherchait de plus en plus le spectacle, le buzz sur Internet... Quand une sœur qui porte le niqab a été interpellée par la police à Aulnay-sous-Bois (93), il a récupéré la vidéo de l'altercation et a fait tourner la vidéo au maximum.
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Comment cherchait-il le buzz ? - Comme la plupart de nos manifestations n'étaient pas autorisées par la préfecture, il organisait des rassemblements ou il tenait des sortes de meetings clandestins. Il venait souvent au dernier moment, une fois que la foule était rassemblée. Il voulait qu'il y ait le plus de monde possible... Il voulait aussi éviter d'être interpellé par la police. Mais je pense qu'il aurait aimé être arrêté devant tout le monde et, bien sûr, devant les caméras... Il recrutait des bénévoles pour alimenter le site et pour être présent sur Internet... Mais c'est surtout le recrutement de nouveaux membres qui m'a dérangé. Cela devenait n'importe quoi.
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Comment se passait le recrutement ? - C'est lui qui s'en occupait. Au départ; nous étions structurés, nous avions tous les mêmes objectifs. Puis il a commencé à chercher le plus de "soldats" possible sur Internet. On a vu débarquer des gens bizarres, un peu fous, qui voulaient monter des actions violentes en France... Le recrutement était tellement ouvert que nous avons été infiltrés plusieurs fois par la police...
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Pourquoi vouloir monter une "armée" ? - On était contre les actions violentes gratuites, mais on se préparait au combat dans le cadre du djihad. Nous sommes sûrs qu'il y aura des attaques contre les musulmans et on s'y préparait. On faisait beaucoup de sport, on s'entraînait dans le cadre de mise en situation, on faisait même du paintball pour apprendre à tirer... Toutes nos activités devaient nous permettre de nous préparer. Il y avait des armes. Et, oui, certains se préparaient précisément à les maîtriser. On nous expliquait que le combat serait de la légitime défense et que l'opinion publique comprendrait.
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Vous aviez conscience que vous étiez hors la loi... ?- Soyons clairs, nous savions que ce que nous faisions était limite. Oui, je me suis préparé au combat, on voulait défendre notre religion et nos sœurs qui veulent porter le niqab en toute liberté, par exemple. Pour être discret, il y avait un discours "
on" pour rassurer les médias, les politiques, etc. Mais "
off", entre nous, nous parlions de l'Afghanistan, de Ben Laden... On regardait certaines vidéos. Il fallait se tenir prêt au combat, à tout moment.
(*)
Le prénom a été modifié.
(http://www.lepoint.fr/societe/samir-ancien-de-forsane-alizza-il-fallait-se-preparer-au-combat-a-tout-moment-07-04-2012-1449282_23.php)