Le Soir d'Algérie - 14.03.2012
Zohra Drif-Bitat, pour qui « l’Algérie et la France ne partagent plus le même destin », cinquante ans après l’indépendance, plaide, désormais, pour que la binationalité algérofrançaise soit l’exception, invitant nos compatriotes à choisir, et qu’il n’est plus question d’avoir un cœur qui bat par-ci et un autre par-là.
M. Kebci - Alger (Le Soir) - À l’appui de sa profession de foi dont elle a fait part ce mardi à l’occasion d’une rencontre initiée par l’association Machaâl Echahid sur l’exécutif provisoire, la vice-présidente du Sénat, qui prend soin de mentionner que cette procédure est légale et contenue dans les accords d’Évian qui ont scellé le cessez-le-feu, affirme qu’elle a fait et fait encore mal au pays et profite plus à l’ancien colonisateur.
Et à l’oratrice, qui considère le 19 mars comme la date fondatrice de l’État national, d’inviter l’assistance, majoritairement composée de collégiens et de lycéens, à s’intéresser à l’histoire du pays, considérant que « l’on ne peut construire l’avenir sans tenir compte du passé ». Un passé que l’ancienne puissance coloniale tente de travestir à travers la distillation de contrevérités historiques qui ont, regrettera-t-elle, pignon sur rue et notamment chez les jeunes générations. Entre autres de ces « monstruosités historiques », celle qui consiste à penser que « de Gaulle nous a offert l’indépendance », ou encore cette assertion prêtée au même ex-président français : « Nous vous donnons rendez-vous dans 30 ans. »
La veuve de l’ancien président de l’APN s’inscrira en faux contre ces « inepties », affirmant que de Gaulle a été contraint sous les coups de boutoir de nos valeureux combattants à s’asseoir autour de la table des négociations et à céder au final. Elle en voudra pour preuve le fait que les opérations les plus meurtrières des forces coloniales n’ont été menées qu’une fois de Gaulle au pouvoir dès 1958. Ce même de Gaulle qui, dira-telle encore, en 1945, alors qu’il était chef du gouvernement, n’a pas hésité à massacrer pas moins de 45 000 Algériens comme « cadeau » offert pour leur engagement dans la guerre contre l’ogre allemand.
Quant au rendez-vous dans 30 ans donné par de Gaulle aux Algériens, la vice-présidente du Sénat estime que, et indépendamment des insuffisances enregistrées, beaucoup d’efforts ont été consentis depuis l’indépendance, citant l’exemple de l’éducation. Elle tiendra à relativiser les choses, relevant que 50 ans d’indépendance est peu pour un pays comme le nôtre en comparaison avec la France qui a des traditions institutionnelles plusieurs fois centenaires.
Concernant l’exécutif provisoire, objet de la rencontre, aussi bien Mohamed Bousmaha, ancien officier de la Wilaya IV, et Mohamed Abbas, professeur, se sont contentés de mentionner les missions de cette entité transitoire conformément à ce qui était convenu dans les accords d’Évian.
Une entité présidée par Abderrahmane Farès et comprenant Chawki Mostefaï comme délégué aux affaires générales, Belaïd Abdessalam aux affaires économiques, Abderrezak Chentouf, délégué aux affaires administratives, Boumediene Hamidou, délégué aux affaires sociales, Mohamed Benteftifa délégué aux postes. Ceci du côté FLN, alors que l’administration coloniale y était représentée par Roger Roth comme vice-président, M'hamed Cheikh à l'agriculture, Jean Mannoni aux affaires financières, Abdelkader El Hassar, délégué à l'ordre public, Charles Koenig aux travaux publics et, enfin, Cheikh Hadj Brahim Bayoud aux affaires culturelles, avec comme secrétaire général Saïd Hocine.
Elle avait pour mission d’assurer les affaires publiques en Algérie durant la période transitoire entre le cessez-le-feu suite aux accords d'Évian du 19 mars 1962 et la proclamation de la République algérienne démocratique et populaire le 25 septembre 1962, suite à l’élection de l’Assemblée constituante, avec comme phase charnière l’organisation du référendum d’autodétermination.
Un mandat qui n’a pas été de tout repos pour l’équipe de Abderrahmane Farès surtout qu’il se devait d’assurer l’ordre, chose pas très évidente, comme le révéleront les deux intervenants.
Il fallait négocier la paix avec l’OAS qui avait engagé une véritable politique de la terre brûlée et venir à bout des fameuses forces locales que l’ennemi avait mises sur pied pour contrecarrer le processus d’indépendance qui avançait laborieusement.
Le duo infirmera les assertions colportées par l’administration coloniale quant à une prétendue purge opérée au sein des harkis, mettant cela sur le compte de simples règlements de comptes ayant touché à peine 1 200 collaborateurs.
Vengeance dans laquelle aussi bien le GPRA que l’exécutif provisoire n’avaient aucune responsabilité, Abderrahmane Farès ayant appelé à la paix dans un discours télévisé.
M. K.