bigbrowser.blog.lemonde.fr - 11.01.2012
Une vidéo montrant des femmes issues de la tribu des Jarawa en train de danser pour des touristes en échange de nourriture sur les îles Andaman en Inde provoque la colère de militants sociaux et d'homme politiques. Le quotidien britannique The Observer a diffusé sur son site une vidéo prise par un touriste montrant des femmes, certaines nues, en train d'exécuter des danses après des pots-de-vin qui auraient été versés à un policier pour qu'elles se donnent en spectacle.
Prise par un touriste, la vidéo montre des femmes s'enquérant de la nourriture promise après quelques pas de danse accompagnés de chants. Un "vieil" enregistrement selon la police des îles Andaman. Or, selon la loi indienne destinée à protéger les groupes tribaux de l'influence extérieure et des maladies, il est interdit de les photographier ou d'entrer en contact avec eux. Le ministre indien des affaires tribales, V. Kishore Chandra Deo, a promis de prendre des mesures après l'incident, qu'il a qualifié mercredi de "dégoûtant".
L'ONG Survival International, qui milite pour le droit des tribus dans le monde, a dénoncé la vidéo dans laquelle les touristes semblent apprécier "les zoos humains". Pour le directeur de l'ONG, Stephen Corry, "cette histoire scandaleuse exhale les relents racistes et dégradants de l’ère coloniale et de ces ‘zoos humains’ qui appartiennent à un passé révolu. Tout porte à croire que le comportement de certains individus à l’égard des peuples indigènes n’a pas changé d’un iota. Les Jarawa ne sont pas des bêtes de foire qu’on peut contraindre à faire des pitreries pour des touristes en mal d’exotisme."
En juin, Survival International avait accusé huit agences de voyages indiennes d'organiser des "safaris humains" pour que les touristes puissent photographier les Jarawa. L'organisation avait appelé les touristes à ne pas emprunter la route utilisée pour entrer dans la réserve de cette tribu, qui compte 403 membres et est menacée d'extinction.
Les îles Andaman et Nicobar, perdues dans l'océan Indien, abritent quatre autres tribus dites primitives, dont chacune compte moins de 350 membres. Selon l'ONG, les problèmes des Jarawa ont commencé en 1970 avec la construction d'une route traversant la forêt où ils vivent. Une route qui amena des braconniers, des bûcherons et aujourd'hui des touristes au cœur de leur habitat.
The Observer ajoute que les Jarawa ne sont sortis de la forêt pour la première fois qu'en 1998, quand une jeune fille s'est cassé la jambe à la frontière de leur territoire avant d'être emmenée à l’hôpital. À son retour, elle aurait relaté son aventure à ses proches dans des termes enthousiastes suscitant la curiosité de beaucoup d'entre eux. Mais aujourd'hui, ajoute le quotidien britannique, les Jarawa commencent à succomber à la rougeole, aux oreillons et même au paludisme, alors qu'ils semblaient jusque-là avoir été immunisés contre ce dernier. D'autres ont par ailleurs adopté certains vices du monde extérieur comme le tabac et l'alcool.
(http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2012/01/11/jawara-une-video-relance-le-debat-sur-les-zoos-humain-en-inde/#xtor=RSS-32280322)