lefigaro.fr - 11.12.2011
Par Marielle Court
INTERVIEW - Le pacte contre le réchauffement climatique conclu dans la nuit en Afrique du Sud englobe pour la première fois tous les pays, se félicite la ministre de l'Écologie Nathalie Kosciusko-Morizet.
Après deux semaines de discussions et deux nuis blanches de négociation, la conférence sur le climat de Durban a trouvé dimanche à l'aube une issue favorable. Les 190 pays rassemblés en Afrique du Sud ont convenu d'une feuille de route préparant la signature d'un premier accord global en 2015. L'objectif général est de réduire suffisamment les émissions de gaz à effet de serre afin que la hausse des températures ne dépasse pas 2°C. Explications de Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre française de l'Écologie et du Développement durable.
LE FIGARO. - Pensez-vous que la conférence se termine sur un bon accord?
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET. - La négociation a été extrêmement longue. À plusieurs reprises, on a failli ne pas aboutir et beaucoup de risques ont été pris avec le calendrier. L'accord intervient en effet plus de 30 heures après la date limite. Énormément de délégués étaient partis, dont un grand nombre des représentants d'Afrique qui n'avaient pas les moyens de changer leurs billets d'avion. Il aurait pu y avoir un problème de quorum. Les conditions de négociation ont été particulièrement stressantes.
Nous avons conclu des accords sur quatre textes. Ils n'ont pas l'ambition souhaitée par l'Union européenne, mais ensemble, ils représentent une véritable avancée.
- Quels sont ces accords?
- L'Europe et quelques autres pays acceptent une deuxième période pour le protocole de Kyoto. On décidera ultérieurement pour savoir si cette période dure jusqu'en 2017 ou jusqu'en 2020. En échange, on met en place un cadre de négociation pour les 194 pays de l'ONU en vue d'un accord au plus tard en 2015. Le texte précise qu'il devra entrer en vigueur à compter de 2020. Ce cadre englobe tous les pays, c'est ce qu'on cherchait à obtenir depuis des années. Cet accord concernera non seulement les États-Unis, qui je vous le rappelle sont le seul grand État industrialisé à ne pas être dans Kyoto, mais également les émergents: la Chine, l'Inde, le Brésil... Enfin nous avons obtenu un accord sur le fonctionnement du fonds vert. Et l'agriculture fait son entrée dans cette négociation climat.
- Quels sont les points de déception?
- Les avancées sur la façon dont on va financer le fonds vert sont trop lentes (100 milliards de dollars par an en 2020). Et en terme de réduction de gaz à effet de serre, le compte n'y est pas. À la demande de l'Union européenne, il est mentionné dans un des textes que les engagements actuels des pays ne sont pas suffisants au regard des nécessités. Les scientifiques nous alertent depuis longtemps: il faut impérativement infléchir nos émissions de gaz à effet de serre avant 2020 si on veut respecter l'engagement pris à Copenhague en 2009 d'une hausse des températures contenue en dessous de 2°C. Un groupe de travail va se pencher sur cette question.
- Ce format de grandes négociations internationales est-il toujours pertinent?
- Pour ces questions de climat c'est partout pareil sur la planète: une tonne de CO2 émise en Chine, c'est la même qu'une tonne de CO2 en France. On ne peut donc négocier que globalement. Mettre tout le monde autour de la table a vraiment un sens.
- Qu'est-ce qui a fait que cette négociation a finalement abouti?
- Je pense que la principale ouverture est venue de la Chine, ce qui est assez cohérent avec ses engagements nationaux. C'est un petit mouvement mais cela a fait bouger les États-Unis et a entrainé l'Inde. Ne soyons pas naïfs, ce sont de tous petits pas, mais c'est la preuve que l'on peut avancer.
(http://www.lefigaro.fr/environnement/2011/12/11/01029-20111211ARTFIG00031-climat-la-chine-a-entraine-les-etats-unis-et-l-inde.php)