AFP - 09/06/2011 |
La ministre de l'Économie, Christine Lagarde, était au courant de liens d'affaires entre un avocat de Bernard Tapie et un membre du tribunal arbitral dans le conflit entre l'homme d'affaires et le Crédit Lyonnais, sans le récuser, affirme aujourd'hui le site Mediapart.
Selon Mediapart, Pierre Estoup, l'un des trois arbitres ayant tranché ce litige en faveur de Bernard Tapie, était intervenu à deux reprises, en 1999 et 2001, dans des arbitrages à la demande de Me Maurice Lantourne, l'avocat de l'ex-homme d'affaires.
En 2008, au moment de cet arbitrage privé, Christine Lagarde connaissait ces liens, mais n'a pas choisi de récuser M. Estoup, affirme Mediapart. "A notre connaissance, il n'y a là rien de nouveau. Tout ce qui y est dit était déjà dans le rapport de la Cour des Comptes qui a fait l'objet de publications dans la presse", a-t-on indiqué à Bercy, en réaction à l'article de Mediapart.
"Il ne s'agit nullement d'un fait nouveau"
La commission des requêtes de la Cour de justice de la République (CJR) doit examiner demain une saisine du procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, qui avait demandé l'ouverture d'une enquête pour abus d'autorité à l'encontre de Christine Lagarde, candidate à la direction générale du FMI.
Dans sa saisine, Jean-Louis Nadal avait relevé "le refus ministériel de donner suite à une proposition de récusation de certains des arbitres", qui, à ses yeux, "montre la volonté de conclure rapidement, sans prendre toutes les précautions nécessaires à la préservation des intérêts de l'État".
Dans un communiqué transmis ce soir à l'Agence France-Presse, l'avocat de Bernard Tapie, Me Lantourne, a écarté tout conflit d'intérêt dans la désignation de M. Estoup. "Il n'y avait pas lieu, à l'époque en 2008, à récusation et il ne s'agit nullement d'un fait nouveau qui pourrait permettre un recours en révision à l'encontre de l'arbitrage", affirme Me Lantourne.
Pour étayer ses propos, l'avocat cite un rapport de la Cour des comptes datant d'octobre 2010, selon lequel "l'arbitre a confirmé n'avoir délivré aucune consultation, aucun avis ni reçu aucune note dans le dossier faisant l'objet du présent arbitrage et n'être intervenu, en qualité d'arbitre, dans aucune procédure concernant l'une des parties à l'arbitrage".
En juillet 2008, ce tribunal arbitral avait condamné le Consortium de réalisation (CDR, gérant le passif du Crédit Lyonnais) à verser 240 millions d'euros de réparation à M. Tapie, auxquels s'ajoutaient une centaine de millions d'euros d'intérêts et 45 millions d'euros pour préjudice moral.