LEMONDE.FR avec AFP, Reuters | 12.05.11 |
Le régime de Bachar Al-Assad poursuit sa répression en Syrie. L'armée et les services de sécurité ont pénétré jeudi 12 mai dans des villages proches du foyer de la contestation, à Baniyas, et y ont procédé à des dizaines d'arrestations, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Il sont intervenus à Al-Bayda et Al-Qariri, où ils ont arrêté des "dizaines" de personnes, a précisé le groupe basé à Londres. Plusieurs chefs de file du mouvement sont détenus et d'autres continuent d'être pourchassés.
L'armée avait renforcé ces derniers jours son emprise dans plusieurs villes dont Homs, où les soldats sont entrés le 6 mai, et Baniyas, les autorités affirmant être à la recherche de "groupes terroristes armés" instrumentalisés selon elle par l'étranger pour semer le chaos en Syrie. Les militants sur place affirment que les habitants sont "terrifiés" et font souvent état de "corps dans les rues" qui ne sont pas évacués par crainte des tireurs embusqués. Les arrestations ont aussi touché la banlieue proche de Damas.
Mercredi, dix-neuf personnes, dont un enfant, ont été tuées dans les régions de Deraa, dans le Sud, et de Homs, dans le Centre, foyers de la contestation. A Alep, ville qui s'était jusqu'à présent plutôt tenue à l'écart de la contestation, les forces de l'ordre ont dispersé à coups de matraque un rassemblement de deux mille étudiants qui manifestaient en faveur de la démocratie, selon un témoin. Selon un autre habitant, la police secrète a bouclé la grande artère qui mène du centre au campus universitaire, situé dans le quartier de Fourkan, dans l'ouest de la ville.
RÉACTIONS INTERNATIONALES
C'est dans ce contexte que la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, n'a pas exclu d'étendre les sanctions prises à l'encontre de treize membres du régime et du président Bachar Al-Assad lui-même.
Les États-Unis ont renouvelé leurs accusations de "barbarie" envers le régime, et des sénateurs influents ont proposé une résolution affirmant que M. Assad avait perdu sa légitimité. Mais l'administration de Barack Obama n'est pas encore prête à appeler à un changement de régime. Pour la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, la répression syrienne est "un signe de faiblesse remarquable".
Seule voix discordante : celle de la Chine, qui a demandé, jeudi, à la communauté internationale de ne pas s'immiscer dans les affaires intérieures de la Syrie, et de l'aider plutôt, en jouant un "rôle constructif", à retrouver paix et stabilité.
"VENDREDI DES FEMMES LIBRES"
Malgré la tentative du régime de mater la contestation ville par ville, des rassemblements devraient encore se tenir vendredi : un appel à manifester en soutien aux manifestantes détenues en Syrie a été lancé sur la page The Syrian Revolution 2011 créée par de jeunes militants. "Le 13 mai nous manifesterons pour la dignité de nos sœurs détenues", écrivent-ils, baptisant cette journée "Vendredi des femmes libres".
Plusieurs manifestantes ont été arrêtées lors de rassemblements ponctuels de femmes ces dernières semaines, en particulier à Damas et à Baniyas, pour appeler à la libération de leurs proches ou à la fin du siège des villes. Quatre manifestantes avaient été tuées le 7 mai à Baniyas, selon les militants.
La page Syrian Revolution 2011 a affirmé la semaine dernière que les manifestations auraient lieu "tous les jours" en Syrie. Mais celles-ci semblent de plus en plus difficiles à organiser en raison de la répression.
Depuis le début du mouvement, mi-mars, en Syrie, entre six cents et sept cents personnes ont été tuées, et au moins huit mille personnes ont été interpellées ou sont portées disparues, selon des ONG. Très peu de journalistes étrangers sont présents en Syrie et ils ne peuvent se déplacer dans le pays sans l'accord des autorités.