Dans une émission présentée par Ardisson, sur France 2, Eric Laurent, journaliste, spécialiste des questions internationales, auteur d’enquêtes à succès, lève le voile sur les énormes bluffs entourant le problème épineux du pétrole et tout particulièrement sous son aspect préoccupant des réserves mondiales déclarées.
Eric Laurent a dans un premier temps rappelé le contexte dans lequel les pays producteurs, dépendant de l’OPEP, s’étaient concertés avec les entreprises exploitantes, pour monter la fausse pénurie de 1973, afin de quadrupler le prix du pétrole, lequel se trouvait en fait quasiment gelé depuis de longues années. Pour pouvoir répondre à des gros besoins d’investissements qu’imposait l’exploitation très onéreuse du pétrole de l’Alaska et de la Mer du nord, les entreprises avaient besoin de gros sous et donc de multiplier rapidement leurs bénéfices. En mettant la main sur des ressources nouvelles « tombées quasiment du ciel », les Etats, de leur côté, ne pouvaient qu’adhérer à cette perspective.
En 1986, poursuit l’invité d’Ardisson, les Etats de l’OPEP, de concert aussi sans doute avec les entreprises opérant chez eux, se sont rendus coupables d’un autre bluff plus grave qui compromet l’avenir depuis, en décidant unanimement et sans preuve de relever d’un simple trait de plume leurs réserves de 65 %. Or, il n’y avait pas eu de découvertes pouvant justifier une telle révision et moins encore en Arabie saoudite où la dernière remontait à 1967. Et ces surestimations erronées n’étaient en réalité inspirées que par le besoin pour chaque Etat de renchérir ses réserves et de conserver sa place dans la répartition des quotas de production. De 150 milliards de barils, les réserves dites prouvées de l’Arabie saoudite ont été ainsi faussement réévaluées, du jour au lendemain à 260 milliards. Quand on sait, a ajouté l’orateur, que dans le meilleur des 7 principaux gisements de ce pays, qui s’étend sur 250 km², on injecte quelques 7 millions de m3 d'eau par jour pour maintenir son niveau de production, on saisit plus gravement encore l’incidence de l’autre mensonge consistant à prétendre que ce pays en aurait pour 30 ou 40 ans de réserves, lorsque, tout bien pesé, il ne dispose pas plus de 50 milliards de barils de réserves, soit une consommation mondiale de moins de deux ans seulement.
Il ne reste nulle part de gisement important à exploiter, y compris en Asie centrale, pas plus qu’on ne peut compter sur la découverte de produits de substitution, les pétroliers considérant qu’il n’y a aucune énergie susceptible de remplacer le pétrole, signale, d’un autre côté, Eric Laurent.
En 2001, en réunissant une Commission pour l’énergie, sous la présidence de Dick Cheney, avec pour mission d’étudier la question des réserves mondiales, le Pentagone s’était en vérité penché beaucoup plus sur la question de substituer l’Irak, considéré comme second producteur mondial, à l’Arabie saoudite, en prévision de l’assèchement prochain des réserves de ce dernier pays, d'où la fameuse carte de l'Irak portant un découpage de 8 zones considérées comme réserves probables de pétrole. C'est bien là la preuve que Bush et son équipe préparaient l'invasion de l'Irak, 8 mois avant le 11 septembre, et que tous les arguments présentés ensuite pour justifier sa guéguerre n'ont aucun sens, a laissé sous-entendre Eric Laurent.
Ce dernier termine son propos en observant que pour 6 barils consommés aujourd'hui, le monde n'en découvre qu’un seul et que l'après pétrole risque de pointer son nez beaucoup plus tôt qu'on ne l'imagine.